Mitterrand l’homme de toutes les contradictions. Son affiche de campagne par exemple … Sa vie qui va de la droite, même la droite extrême avec Vichy à la gauche. Il y a ceux qui parlent de Vichy et ceux qui ont collaboré avec Vichy. A ces derniers, à ce dernier, la communauté juive a apporté son soutien (J Attali, J. Lang, R Hanin, P. Mendès France, R Badinter, Théo Klein…) bien qu’il fût le sauveur d’Arafat et l’un des fervents partisans d’un État palestinien. À cette communauté qui exclut l’un des seins avec un discours de gauche, un peu d’histoire n’est pas inutile.

Toile de fond d’une affiche historique, Sermages, 220 habitants et une église romane, ignora un temps sa bonne fortune. Et balance aujourd’hui, comme la France, entre gauche localement et droite nationalement.

Le décor le plus célèbre de l’histoire des affiches électorales françaises compte à peine 220 habitants. Sermages, petit bourg de la Nièvre, a accédé à la célébrité au printemps 1981 en ornant les panneaux électoraux de 36.000 communes sous l’intitulé «La Force tranquille» lors de la campagne victorieuse de François Mitterrand.
«Mitterrand disait toujours à son chauffeur: “Roulez doucement pour que je puisse regarder le paysage” —c’est pour cela qu’il était toujours en retard aux réunions, d’ailleurs. En revenant sur Château-Chinon, il a vu le clocher de Sermages sur fond de paysage du Morvan et ça lui a plu. Il a repéré le coin.»
Un beau village, bien français, avec son église, dont la grande croix a été gommée, l’école, la mairie, le ciel bleu blanc, bref tout pour faire la concurrence au FN de l’époque. Faire de la politique est un art qui n’est pas donné à n’importe qui… Se faire comprendre de la gauche, tout en ne méconnaissant pas la droite même celle de vichy avec qui il a fricoté.

 

 

Allocution de M. François Mitterrand, Président de la République, à l’occasion du colloque sur « la pluralité des cultures » organisé par la Fondation « France-Libertés » à La Sorbonne, Paris, lundi 18 mai 1987.

Texte intégral

Je n’ai pas participé à vos travaux, je ne les ai pas vécus de l’intérieur, cependant j’en ai été informé et j’ai pu donc à la fois de loin et de près tenter d’approcher votre pensée et votre raison d’agir. Les brefs compte-rendus, fournis par Mme Ahrweiler, et l’intervention de M. Stéphane Hessel, tout cela me permet davantage de me mettre dans l’ambiance, si votre accueil n’y avait suffi.

– Je vous remercie de la manière précisément dont vous avez réservé votre hospitalité au Président de la République. Je n’ai pas le sentiment qu’il s’agissait d’un accueil spécifiquement révérentiel, mais d’une sorte de relation qui s’est créée à travers le temps, par les combats et les prises de position que la rigueur des temps oblige, surtout lorsque l’on parle du sujet qui vous occupe : culture, race, ethnie, origine, langage, avec tout ce que le mot culture évoque, la façon d’avancer, de comprendre et de sentir d’une société donnée. Qui pourrait croire un instant que je ne suis pas, au moins autant que quiconque, attaché aux valeurs dites traditionnelles qui ont fait la France ?

– Mais je constate, pour commencer, que parmi ces valeurs traditionnelles, il y a toujours eu l’ouverture. La France est un pays qui a été fait à travers le temps et dès le premier jour par l’apport de cultures, cet apport de cultures étant représenté par des peuples en mouvement, un certain nombre d’invasions, de conquêtes, qui se sont imbriquées avec le fond même de notre population, avant la conquête romaine et les entrées massives venues de Germanie.
Tout cela s’est fondu. Une sorte de langue commune a fini par s’édifier, une sorte de bas latin, mélangé de celte et de mots germaniques. Le français, vaille que vaille, est sorti de là, pour former une langue assez pure pour qu’elle apparaisse aujourd’hui comme l’un des grands rameaux capables d’exprimer la pensée de l’humanité.

– Alors cela, naturellement, nous y tenons, j’y tiens. Ce fut une très lente conquête, jusqu’au moment, après les siècles foisonnants, où naquit une certaine forme de culture classique, ayant trouvé ses formes, assez rigoureuses et même parfois conservatrices, mais en même temps ayant su magnifier le meilleur d’elle-même. Fallait-il, à partir de là, figer la nation française, arrêter soudain son évolution parce qu’une forme assez parfaite avait résulté des travaux antérieurs ? Cela eut été une conception qui aurait condamné la culture française à mort. On a pu pendant un siècle ou deux siècles, imaginer que l’on était parvenu au sommet d’une expression et d’une forme d’esprit. Mais précisément parce qu’on y était parvenu, il fallait déjà rechercher les chances du renouvellement, afin de repartir à la recherche d’une forme supérieure qui paraîtrait un jour à son tour classique, achevée, et c’est à ce moment là que le signal aurait été donné de nouveau, pour reconstruire une troisième forme de culture française.

`Suite sur la culture française`


– De quoi est faite celle que nous exprimons aujourd’hui ? Non seulement de l’évolution qui nous a conduit jusqu’au 17ème et au 18ème siècles, mais après les bouleversements politiques de la fin du 18ème, les formidables transferts et les luttes profondes du 19ème, les guerres mondiales du 20ème, un brassage énorme qui fait que depuis déjà près d’un siècle, la France a reçu des apports successifs. Chaque fois, ils ont représenté pour elle, un acquis, un profit, quelque chose de plus et non pas quelque chose de moins. En quoi, et je vous pose la question, en quoi la France, son peuple et sa culture, auraient-ils été diminués, auraient-ils été privés d’un peu d’eux-mêmes, parce qu’on serait venu d’Italie, dans le département du Lot, ou dans le Sud-Ouest, ou dans le Sud-Est, fournir des paysans, des artisans, des commerçants, en quoi la France a-t-elle souffert de l’apport des Polonais des mines du Nord ou du Pas-de-Calais, ou bien de quelques autres en Lorraine ? En quoi la France a-t-elle souffert de l’apport des Espagnols au travers des conflits du siècle dernier ? En quoi …, la liste serait longue. Chaque fois cela a signifié quelque chose de plus. Oh, cela aurait peut-être été un moins si la culture française et notre génie propres n’avaient pas eu le temps de se former auparavant, s’ils avaient été si fragiles que le moindre choc, que le moindre contact aurait pu l’altérer. Non, ce génie français sans orgueil, ou sans vanité particulière, ce quelque chose d’achevé et de complet, d’assez bien réussi, il faut le dire, que représente la civilisation française, s’est enrichi. Celle-ci s’est enrichie partout où elle a su communiquer, recevoir. Elle s’est enrichie chaque fois qu’elle a reçu sur son sol des étrangers, chaque fois que ces étrangers ont été porteurs d’autres cultures.

– Certes il ne s’agit pas d’assimiler. Il s’agit de composer en commun : un bouquet de fleurs c’est un ensemble de couleurs. Si vous voulez distinguer le bleu du jaune, ou du rouge, vous perdez son sens, sa beauté ou son équilibre. La France ne peut qu’être l’oeuvre de la patience, une patine comme sur les objets déjà anciens. On ne rendra pas cet objet plus valeureux si l’on cherche à effacer la patine, au contraire on l’appauvrira. Il intéressera moins les amateurs, les amateurs de belles et anciennes choses.

– Mais qu’est-ce qui nous oblige à considérer que nous devons désormais nous placer de nous-mêmes dans un musée, objets derrière une vitre auxquels personne ne pourra toucher ? Moi je veux que l’on puisse venir en France. Je veux que l’on puisse bousculer la culture et les usages français. Je veux que les usages et les coutumes français soient suffisamment vigoureux pour se défendre eux-mêmes, mais pas se défendre en excluant, se défendre en recevant et en faisant la démonstration que désormais cela fait partie de nous. Encore faut-il que les autres le veuillent ? S’ils ne le veulent pas, s’ils refusent ce que nous sommes ? Alors bien bientendu, il y a maldonne. Il est normal qu’une culture, qu’une civilisation qui s’expriment dans le cadre de certaines frontières qui sont celles d’un Etat, lequel contient une nation, un peuple organisé, il est normal qu’elle cherche à affirmer en toute circonstance sa propre identité. Il est normal qu’elle ne veuille pas s’altérer. Mais l’altère-t-on lorsque l’on puise à toutes les sources qui permettront de franchir le temps qui vient ? En plus de ce que l’on était avec un peu ou beaucoup de ce que sont les autres ? Ainsi, peu à peu, se forme une identité nouvelle qui n’est pas trahison, mais qui est complément, qui est parachèvement afin d’aller vers cette nouvelle et future époque classique où tout cela formant un tout, représentera un point d’achèvement.

J’ai quelquefois voyagé et j’ai pu observer sur place la manière dont les choses se passaient. Je crois qu’il y a une dominante dans ces colloques d’aujourd’hui : une dominante africaine, qui me rappelle tout ce que j’ai vu dans les pays où se sont développées les langues créoles qui se ressemblent toutes et qui sont différentes. J’ai pu constater que dans notre vocabulaire, les mots à ajouter dans le dictionnaire venaient désormais en grand nombre d’autres langues. Et cependant, elles sont admises par nous de plus en plus. J’observe qu’on les intègre de plus en plus. Je serai au mois de septembre au Québec pour représenter la France dans les deuxièmes assises de la francophonie. Désormais la francophonie, le français – quel honneur pour nous que cela s’appelle le français – le français est bouleversé, mais non pas changé dans ses structures, bouleversé par sa puissance : puissance des mots, puissance des expressions, puissance de sa grammaire. Transformé, c’est vrai, soit par des méthodes regrettables de domination, soit par l’acceptation volontaire des populations, malheureusement plus souvent résultat du premier phénomène que du second. Mais au total, les fusions se sont produites et je m’énervais de voir ces peuples africains ou ces peuples des Caraïbes, en particulier, me parler aussi bien français et d’un français dont je sens bien que s’ils étaient privés de leur identité, il serait déjà comme figé, comme une langue qui s’apprête à s’appeler comme d’autres : morte.

– C’est très beau les langues mortes. J’en ai appris quelques-unes dans mon adolescence, et cela peut apporter à l’esprit de ceux qui en ont reçu le privilège, – privilège de plus en plus rare – une immense satisfaction, une sorte de goût esthétique qui repose sur lui-même. Mais comment pourrait-on prétendre qu’un peuple tout entier peut s’assimiler à des langues mortes alors qu’il est sollicité par la vie ? Et quelle joie, et quelle force que de constater que la langue française est une langue essentiellement vivante, qu’elle est aujourd’hui parlée par quelques 120 à 130 millions de personnes. Qu’elle peut être comprise, en tout cas, qu’elle est encore employée dans bien des tribunes, des conférences, des enceintes internationales comme une langue – non pas plus facile à parler, mais plus facile à comprendre dans ses structures que tout autre – une langue qui ne demande qu’à revivre ! Surtout là où quelque négligence, quelque abandon, une sorte de perte de conscience d’eux-mêmes par les Français, aurait fait que le français ne serait éloigné de la conscience universelle des hommes.

– Je suis très fier de cela, lorsque je vois que le français apparaît – avec d’ailleurs les langues voisines, les langues romanes – comme une des langues du présent et des langues de l’avenir. Devenir le premier langage, les premières structures dans le monde, contrairement aux modes d’aujourd’hui, à ce que l’on croit être les besoins commerciaux, la nécessité des échanges faciles, des échanges rapides. Et d’où nous sera venue cette capacité ? Elle nous sera venue d’un peu partout. Elle sera venue de l’Afrique, de quelque azimut que ce soit, aussi bien du Sénégal que de Djibouti, aussi bien des Antilles lointaines que des îles de l’Océan indien. Partout, on nous a apporté, on nous a fait don à nous, la France, d’une façon de penser, de sentir, d’une façon de s’exprimer, soit dérivée de notre langue, soit venue tout à fait d’ailleurs et cependant pour composer notre langue commune.
Je me souviens d’un jour où je me trouvais dans un pays étranger et ami. Il y avait là des dizaines et des dizaines d’hommes et de femmes qui comprenaient le français. Ce n’était pas la France bien entendu, et ce n’était pas leur langue naturelle, et j’avais commencé mon discours d’une façon peut-être un peu démagogique en leur disant « je suis très heureux, mesdames et messieurs, de m’exprimer dans votre langue ». Je dois dire la joie de ces quelques 100000 personnes d’un pays d’Afrique, fort loin de chez nous, très loin de la Sorbonne, qui se trouvaient enchantées d’être considérées comme parlant une langue qu’ils pouvaient enseigner à celui qui représentait la France. Enchantées par une sorte d’orgueil qui était désormais un orgueil partagé. Le français, c’était notre propriété.

– Les cultures – vous dites « plurielles » c’est le mot à la mode, voilà un mot que je n’avais pas mis dans mon vocabulaire habituellement, je savais bien ce que c’était que le « pluriel », je l’avais appris dans ma grammaire, les cultures plurielles cela fait partie de ces mots, de ces expressions qui traversent tout d’un coup, puis ensuite deviennent quelque chose d’inscrit dans les modes de langage constant. Les cultures plurielles sont différentes, elles ont parfois quelque peine à communiquer. On croit parfois qu’elles ne pourront pas communiquer. Que de fois ai-je entendu dire l’émigration italienne, portugaise, espagnole, c’est facile, c’est le même rameau. Ce n’était pas si facile que cela lorsqu’ils sont arrivés : les parents de Zola ou ceux de Gambetta étaient considérés comme des gêneurs qui venaient prendre la place des paysans ou des commerçants français. Cela aurait été dommage de les renvoyer.

– Puis on a dit que ce serait beaucoup plus difficile avec des Slaves. Parce que les Slaves, naturellement, écrivent d’une façon bizarre, là-bas, du côté de Byzance. Enfin, ce n’est pas tout à fait du voisinage. Ensuite, qui pense aujourd’hui que les Polonais de France n’ont pas été – je vous le disais pour commencer – un enrichissement de tous ordres : ethnique, industriel, commercial, linguistique, culturel pour la France ?

Alors, on entend dire quand même, c’est beaucoup plus difficile maintenant avec les Arabes, avec la langue arabe, avec la culture et une religion différentes. Ce n’est pas tellement sûr que les religions des pays que je viens de citer eussent été si semblables qu’elles apparaissent. Mais enfin, celle là, c’est différent, c’est peut-être le même Dieu, mais ce n’est peut-être pas pareil et c’est une culture différente. Il y a eu des conflits, il y a eu des combats, il y a eu des luttes pour la possession du sud de l’Europe, des côtes méditerranéennes. Les religions ont inspiré des luttes parfois fanatiques.

– Il y a eu des haines que l’on croyait puisées dans le sang et puis finalement, si l’on écrivait la contre-histoire de tout cela, on s’apercevrait que l’interpénétration dans chacune des zones terrestres où la civilisation islamique et la civilisation chrétienne se sont rencontrées, où les langues romanes ont rencontré la langue arabe, que cette interpénétration a produit des richesses culturelles considérables, remarquables et durables. Et que cela peut être parfaitement assimilé par les uns et par les autres. Regardez de quelle façon la France, à dominante catholique pendant si longtemps, fut impressionnée par la culture biblique, à quel point tout ce qui vient de la civilisation juive, fait partie finalement presque de nos réflexes. Sans doute parce qu’une tradition s’est établie par les rites religieux, par les explications dogmatiques.

Nous sommes français, nos ancêtres les gaulois, un peu romains, un peu germains, un peu juifs, un peu italiens, un petit peu espagnols, de plus en plus portugais, peut-être qui sait polonais, et je me demande si déjà nous ne sommes pas un peu arabes ? Je reconnais que voici une phrase imprudente. C’est celle-là qui sera épinglée. Et qui incitera à dire vous voyez bien, c’est le Président de la République qui l’a dit. Ils me la répèteront peut-être sans mettre exactement le même sens aux propos que je tiens.

Je voudrais vous faire comprendre pour terminer, que je suis l’un de ces Français de province, d’une toute petite province, qui ont beau rechercher leurs origines, – c’est un goût que l’on prend à mesure que l’on vieillit – venu du centre de la France, et qui n’arrive pas à trouver l’un de ses ancêtres. Un de ces Français qui a poussé l’audace d’aller chercher sa femme en dehors de ses trois provinces : le Berry, le Limousin, le Saintonge. A ma génération, c’était déjà presqu’inconvenant que mes frères et moi soient allés jusqu’en Bourgogne ! De telle sorte que je peux vous montrer mon pedigree, il ne manque rien ou plutôt il manque tout. Il manque tout ce qui n’y est pas, et ce qui n’y est pas, c’est le reste de la France. Pas une goutte de langue d’oc, pas mal de langue d’oil. Je veux dire par là le Limousin, qui est plutôt d’oc. La ligne historique coupe vers le nord, et justement mes ancêtres viennent du nord. Bref, je devrais me sentir tout à fait engagé pour la défense de mon identité ; surtout qu’on n’y touche pas ! Il est trop tard pour que je recommande à mes fils de ne pas s’égarer !

– Je dis cela simplement pour vous montrer que l’expérience de ma vie, et la connaissance de l’histoire du pays qui est le nôtre m’ont conduit à recevoir tout ce qui venait de l’autre, dès lors qu’il était reçu dans la volonté de préserver l’essentiel de soi-même, sa propre continuité, sa propre identité, dès lors que l’on n’opposait pas sa propre faiblesse à la force d’expansion des autres, dès lors que l’on avait le sentiment qu’en fin de compte, rien n’avait de sens qui ne serait universel.

– Ayant compris cela, je suis sorti de ma province et je souhaite qu’à travers les générations, les Français qui viendront après moi, fiers quand même de ce qu’ont été ceux d’avant, considèrent que ceux d’après, ceux du siècle prochain seront plus forts, seront plus riches de culture, seront des Français plus proches de l’universel et donc de la compréhension des affaires du monde, s’ils savent admettre et comprendre les autres cultures pour en faire aussi leur propre culture. Cela se lie à des choix politiques en certaines circonstances. Je voudrais bien que ces choix politiques n’altèrent pas ce type de débat, et que puissent siéger dans des assemblées comme celle-ci, des femmes et des hommes dont les conceptions de politique intérieure sont diverses, mais qui sauraient s’allier pour refuser tous les appels de l’inconscient ou de je ne sais quel subconscient mal réglé ou mal dirigé. Qui seraient capables de choisir l’unité de la France à construire plutôt que le regret vain, parfois inintelligent, le refus de vivre dans son temps, ou le rêve de je ne sais quel âge d’or qui n’a jamais existé. Savoir que si âge d’or il y a jamais, c’est celui que nous construirons, celui que vous saurez construire, vous qui vous appliquez à la définition de cultures – plurielles -. Celui que nous construirons, avec les autres et par les autres, pour être davantage encore ce que nous sommes. Merci.

 

La période noire de Mitterrand

L’ombre du maréchal Pétain a toujours plané sur François Mitterrand. Malgré les témoignages de son soutien au gouvernement de Vichy et sa décoration de l’ordre de la Francisque au printemps 1943, l' »omerta » sur le passé de l’ancien président de la République a toujours été la règle dans la classe politique française, où il ne comptait pourtant pas que des amis. Pendant des années, il y eut une « vérité officielle », celle du blessé à Verdun, puis du prisonnier envoyé au Stalag (camp pour prisonniers de guerre en Allemagne), d’où il s’évada pour rejoindre Jarnac, sa ville natale de Charente, son entrée dans la Résistance et la rencontre avec le général de Gaulle à Alger en décembre 1943.
Mais, après le stalag et avant les maquis, un grand trou noir. Un non-dit jalousement gardé, un silence lourd, une mémoire occultée, un grand flou entretenu par Mitterrand lui-même malgré ses fréquentations affichées après guerre avec René Bousquet, secrétaire général de la police du régime de Vichy de 1942 à fin 1943. Il aura fallu attendre que l’ancien chef de l’Etat arrive au seuil de la mort pour qu’il « mette sa vie en ordre » et reconnaisse publiquement, en 1994, ce passé vichyste dans le livre de Pierre Péan Une jeunesse française (Fayard, 1994). En couverture, une photo du jeune François Mitterrand serrant la main du maréchal Pétain le 15 octobre 1942.
S’inspirant librement de l’enquête de Pierre Péan, le réalisateur Serge Moati, proche de François Mitterrand, et le journaliste Christophe Barbier, directeur de la rédaction de L’Express, aidés par l’historien Hugues Nancy, ont construit un docu-fiction mêlant images d’archives et scènes reconstituées. Mitterrand à Vichy raconte l’itinéraire peu commun du jeune François Mitterrand, pétainiste convaincu qui glissera progressivement vers la Résistance.
Dès le début du docu-fiction, la question est d’ailleurs immédiatement posée : « Qui était vraiment François Mitterrand ? Des secrets, des non-dits, des ombres, nous allons remonter le temps. » Le pari est réussi, notamment grâce à l’interprétation de Mathieu Bisson, qui, dans le rôle de Mitterrand, arrive à montrer dans un jeu très personnel toute la complexité du personnage. La mise en scène, sobre, est à l’image des films de l’époque. « La sortie du livre de Péan a été un choc », reconnaît Serge Moati, qui revendique toujours « une affection » pour l’ancien président de la République. « Pourtant, je ne m’étais jamais exprimé publiquement sur cette question alors que mon père a connu les persécutions en tant que juif et résistant », explique le réalisateur.
Le scénario a été construit à partir de plusieurs sources historiques et journalistiques appuyées sur la correspondance de François Mitterrand au cours de cette période et sur ses publications ultérieures.
« L’expérience du Stalag a changé sa vision de l’ordre social », souligne Christophe Barbier. « Au cours de cette période, un Mitterrand meurt et un autre naît. Celui qui meurt, c’est le fils de bourgeois de province, imbu de lui-même, plein de certitudes sociales. Au Stalag, il découvre la promiscuité, les différences sociales, l’importance du collectif, poursuit le journaliste. A partir de ce moment, son obsession est de servir la cause des prisonniers. C’est ainsi qu’il intègre l’administration de Vichy et commence le lent parcours qui, de pétainiste, le conduira à devenir résistant. »

Serge Moati et Christophe Barbier affirment que leur film ne se place ni du côté hagiographique ni du côté de la polémique. « Nous avons juste tenté de répondre à des interrogations », disent-ils.

Une interrogation qui pointe particulièrement le silence de François Mitterrand sur le sort des juifs français pendant l’Occupation. « Comment expliquer ce silence ? C’est une énigme », remarque Serge Moati, qui reste toutefois persuadé que l’ancien président de la République n’a jamais été antisémite. « Sa vie, ses amitiés, ses convictions ont prouvé le contraire. A cette époque, la question juive n’était pas au centre des préoccupations des Français. « On ne savait pas », ont-ils toujours répété après la guerre », souligne- t-il. « La question est de savoir si son obsession des prisonniers de guerre l’empêchait de voir le sort des juifs, dit Christophe Barbier. En écrivant les dialogues du film, je me suis demandé comment parlait ce Mitterrand de 24 ans et j’ai longtemps cherché à le mettre en mots. Le documentaire cherche la vérité, la fiction opte davantage pour l’allusion. »

En revanche, pour la reconstitution de l’entrevue avec de Gaulle, qui voulait l’unification des réseaux de Résistance des prisonniers, le journaliste s’est appuyé sur les nombreuses archives pour écrire la scène. « Votre sympathie pour Vichy sera mise sur le compte d’une erreur de jeunesse », lui a dit, à sa manière, le général.

Avant même la diffusion de ce docu-fiction sur France 2, la veuve de l’ancien président, Danièle Mitterrand, a fait savoir qu’elle reprochait à ce film « des erreurs historiques importantes et des contre-vérités » et qu’il « défigurerait gravement l’Histoire et François Mitterrand », sans pour autant préciser ces erreurs. « Nous avons travaillé en toute transparence et je me suis longuement entretenu avec Danièle Mitterrand lors de l’écriture du scénario », répond Serge Moati en ajoutant qu’il « n’a aucune envie de polémiquer ». Soixante ans après, Vichy reste toujours un passé qui ne passe pas…
JForum – INA

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

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2 Commentaires
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galil308

« Vichy est un passé qui ne passe pas »
Tout à fait d’accord, tout comme l’invasion teutonne, passée, tout comme une autre invasion actuelle ne peut passer, tout comme l’analyse historique ne semble pas faire réfléchir et agir ceux qui nous « gouvernent » et répètent des erreurs tragiques !

Bonaparte

Plus on approchait de la fin de la guerre…..plus il y avait de résistants .
A la fin de la guerre tout le monde était résistant .
Où sont passés à la fin de la guerre ceux qui acclamaient par centaines de milliers le maréchal ?
Les Juifs les connaissent …….ils étaient aux premiéres loges .

Encore aujourd’hui on parle beaucoup de ces  » résistants  » vrais ou faux mais on a oublié les victimes ……..les vraies victimes dépouillées de tout…jusqu’à la vie .
Victimes du gouvernement et de la police française .

Nous ne sommes pas rancuniers , nous sommes encore en premiéres lignes avec tous les patriotes pour défendre la France contre l’envahisseur . .