La Crimée, terre de J. Trumpledor et des 1ers Kiboutzim du futur Etat Juif !

Avant que la Crimée ne devienne une place forte de l’implantation ethnique russe, c’était un foyer Juif potentiel. Les Juifs ont vécu dans cette région depuis les temps antiques et les grands dirigeants, de la Grande Catherine à Staline, y ont encouragé leur implantation.
Trois jeunes gens en tenue de travail dans les champs, dans l’implantation de Ḥakla’i (Ferme), à Dzhankoi, Ukraine, URSS, dans les années 20 (YIVO Institute for Jewish Research, New York)

Sur le chemin de Sevastopol, pas si loin de Simferopol ”, ainsi commence ce qui est probablement la plus célèbre chanson Yiddish de toute l’Union Soviétique, “ Hey Dzhankoye Article original.”, chanson, intitulée d’après le nom d’une ferme collective de la Ville de Dzhankoy, en Crimée, qui glorifie les victoires de la collectivisation soviétique, entre les années 1920 à 1930. Selon cette chanson, elle aurait miraculeusement transformé les marchands juifs en fermiers. « Qui prétend que les Juifs ne peuvent faire que du commerce ? » demande le verset final de la chanson, « Il n’y a qu’à voir à Dzhan ».

Aujourd’hui, alors que le gouvernement ukrainien cherche ses marques, après l’éviction de Yanukovitch, les troupes russes occupent la Crimée Article original, soi-disant pour protéger les Russophones, et alors que Sergey Lavrov, le Ministre des Affaires étrangères, prétend, devant les Nations-Unies, combattre les Ultra-nationalistes antisémites – on peut faire un détour ironique, il y a moins d’un siècle, alors que le Kremlin ait envisagé de faire de cette Péninsule, le lieu d’une possible patrie juive.

Les Juifs ont vécu dans la péninsule depuis les temps antiques, essentiellement divisés en deux communautés : Les Krymchaks , qui suivaient le Judaïsme rabbinique et les Karaïtes , qui rejetaient la Torah orale. Peu après que la Grande Catherine a conquis la région en l’arrachant à la tutelle de l’Empire Ottoman, en 1783, elle a voulu y développer une implantation juive, en espérant que les Juifs jouent le rôle de rempart contre les Turcs . En dépit du fait que les Juifs se sont, plus tard, vus interdire de vivre dans les grandes villes, la péninsule promettait des espaces ouverts et la totale liberté à des Juifs aventuriers à la recherche de conquête de nouvelles frontières et qui souhaitaient prendre la pelle et la pioche.

Des dizaines de milliers de Juifs, jeunes pour la plupart, se sont installés dans cette partie de la “Nouvelle Russie”, au cours du siècle suivant. La Crimée s’identifiait alors tellement à l’histoire juive russe, en fait, que les militants juifs de Saint-Petersbourg insistaient sur la valeur de l’héritage déjà ancien et enraciné des Juifs de Crimée comme argument pour promouvoir l’émancipation juive au sein de l’Empire.

Après tout, affirmaient-ils, les Juifs vivent là depuis plus longtemps que les Russes (l’historien du Karaïsme, Avraam Firkovich tentait même de démontrer que les Karaïtes vivaient en Crimée avant l’époque de Jésus-Christ, qu’il en est venu à fabriquer des inscriptions de pierres tombales pour le prouver).

Les résidents juifs de Crimée étaient aussi profondément engagés dans le problème le plus sensible de la “Question Juive” de l’époque : le Sionisme. Et, vers la fin du 19ème siècle, cette zone est devenue un camp d’entraînement pour les futurs pionniers sionistes, qui y pratiquaient les techniques agricoles, avant d’être relocalisés en Palestine. Joseph Trumpeldor — resté célèbre pour avoir donné sa vie en défendant l’implantation de Tel Haï, dans le Nord de la Galilée, avec cette devise : « Il est bon de mourir pour note pays »- a, souvent, préparé les futurs Olim (migrants) en Crimée ( Une implantation collective de Crimée a été rebaptisée Tel Haï, en son honneur.

Au début des années 1920, le nouveau Gouvernement soviétique s’est, une fois encore, tourné vers la péninsule. Inquiet du fait que les Tatars de Crimée, les Ukrainiens et les Allemands qui représentaient les populations les plus nombreuses de la région, étaient anticommunistes, les responsables à Moscou étaient avides de s’acheter la loyauté des nouvelles recrues par l’offre de terres et des promesses d’autonomie dans cette péninsule riche en terres agricoles.

Lorsque l’ingénieur agronome et militant communautaire américain Joseph A. Rosen a suggéré de fournir un soutien financier, grâce au Joint Distribution Committee, afin de réinstaller les victimes juives des pogroms dans la région, le Kremlin a sauté à pieds joints sur l’opportunité. En 1923, les Politburo a accepté une proposition de ré-établissement d’une région juive autonome en Crimée, avant de revenir sur sa décision quelques mois plus tard.

Quoi qu’il en soit, de 1924 à 1938, le Joint (DC), par le biais de sa Corporation Agricole du Joint Juif Américain et avec le soutien financier de philanthropes Juifs Américains, comme Julius Rosenwald, a appuyé le développement des implantations agricoles juives dans la Crimée soviétique.


Julius Rosenwald, philanthrope américain.

De nombreuses fermes collectives et même des districts entièrement juifs ont poussé comme des champignons, au cours des années suivantes. Le rêve de bâtir une république juive est demeuré bien vivace, jusqu’à l’invasion nazie de l’Union Soviétique, en juin 1941. La plupart des « colons » juifs de Crimée se sont enfuis vers l’Est, pour trouver refuge loin du front. Des fermes collectives toutes entières se sont évadées ensemble, voyageant par des convois vers l’Est, juste avant l’arrivée des troupes allemandes, sans s’arrêter, jusqu’au Kazakhstan ou l’Ouzbekistan.

Là, ils ont restauré leurs fermes collectives et beaucoup ont rejoint l’Armée Rouge pour combattre les Nazis. Alors que la guerre se prolongeait, Staline a envoyé deux représentants du Comité Juif Soviétique Antifasciste, nouvellement institué – l’acteur yiddish Solomon Mikhoels et le poète yiddish Itsik Fefer— aux Etats-Unis et dans d’autres pays alliés, pour provoquer le soutien des Juifs Occidentaux à l’effort de guerre soviétique. A New York, Mikhoels et Fefer ont rencontré les représentants du Joint Distribution Committee, qui ont parlé de renouveler leur appui aux colonies juives de Crimée, lorsque la péninsule serait libérée de l’emprise nazie.

En 1944, l’Armée Rouge a mis les Allemands en déroute et les a boutés hors de Crimée. Staline a ordonné la déportation d’environ 180.000 Tatars de Crimée en représailles pour leur collaboration présumée avec l’ennemi. Les troupes soviétiques ont ordonné aux familles Tatares de faire leurs bagages, de prendre 80 kgs de leurs biens, puis de prendre le train pour quitter la région ; peu de temps après, des dizaines de milliers de Juifs sont revenus en Crimée, à partir de l’Est, pour restaurer les implantations qu’ils avaient été contraints d’abandonner.


Salomon Mikhoëls, applaudi avant d’être assassiné.

C’est dans ce contexte chaotique que Mikhoëls et Fefer ont rencontré le Ministre des Affaires étrangères soviéitique Vyacheslav Molotov et rediscuté de l’idée d’établir une patrie juive en Crimée.

Molotov semblait être un allié sympathisant de ce projet. Staline l’avait nommé pour remplacer Maxim Litvinov, dont les origines juives faisaient de lui un choix maladroit pour mener les négociations en cours avec l’Allemagne nazie. Trois mois plus tard, Molotov signait le pacte de non-agression qui permettra à l’Allemagne d’envahir la Pologne, déclenchant la 2ème Guerre Mondiale. Pourtant, Molotov n’était pas inamical envers les Juifs. Sa femme Polina Zhemchuzhina, appartenait à une famille juive du Sud de l’Ukraine, dont la sœur avait émigré en Palestine mandataire. Mikhoels et Fefer sont sortis de la réunion convaincus que Molotov soutiendrait leur plan et ont poursuivi en envoyant un mémoire soulignant l’importance de leur proposition, à Staline.

Mais, contre toutes leurs prévisions et aspirations, Staline a utilisé la proposition en Crimée comme un prétexte pour lancer une agression sans précédent contre la communauté juive d’Union Soviétique. Le vote des Nations-Unies en faveur de l’établissement de l’Etat d’Israël, en novembre 1947, avait rendu superflue l’idée d’une patrie juive en Crimée et renforcé les soupçons de Staline contre les aspirations nationales des Juifs. La nuit du 12 janvier 1948, Staline a fait assassiner Mikhoëls, signifiant ainsi le début de la campagne de terreur stalinienne contre les Juifs. Au cours des 13 mois suivants, Fefer, Zhemchuzhina, et de nombreux autres membres du Comité Juif Antifasciste ont été arrêtés. Zhemchuzhina a été exilée au Kazakhstan. Quinze autres ont subi un procès inique, tenu au secret, accusés de conspiration avec les Etats-Unis, en vue d’établir une République Juive en Crimée. C’est le déclenchement de la Guerre Froide, où l’Etat d’Israël jouera un rôle important en battant les armées arabes, alliées de Moscou et en renseignant les Américains sur les équipements soviétiques fournis à ses supplétifs arabes.

Le 12 août 1952, dans ce qui est devenu “ La Nuit des Poètes Assassinés ”, 13 des accusés, dont Fefer et les écrivains Yiddish réputés : Dovid Bergelson, Dovid Hofshteyn, Leyb Kvitko, Peretz Markish, et l’acteur Yiddish Benjamin Zuskin, ont été exécutés dans les sinistres prisons de la Lubyanka, à Moscou. Deux ans plus tard, le Kremlin a scellé le sort de la Crimée, en transférant la gestion des affaires de Crimée à l’Autorité administrative de la République Soviétique Socialiste d’Ukraine.

Par Jeffrey Veidlinger| 4 mars 2014 12:00 AM

tabletmag.com Article original

Adaptation : Marc Brzustowski.

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Richard

C’est bien pour cela qu’Israël est notre seule terre et qu’il ne faut rien concéder.