Comment Harvard est devenue une université anti-américaine

Dans le Wall Street Journal du 24 avril, Ruth Wisse, universitaire canadienne et spécialiste de littérature yiddish, décrit la prestigieuse université américaine Harvard – elle y a enseigné entre 1993 et 2014 – comme « un avant-poste de l’islamisme ». Un jugement sévère qui, selon elle, serait la conséquence d’un long positionnement à gauche. Harvard s’est opposée à la guerre du Viêt Nam, a pratiqué avant l’heure l’embauche préférentielle de femmes et de représentants de minorités, a laissé des organisations extrémistes noires diffuser leur propagande sur le campus, et seuls des professeurs de gauche ont été embauchés. Conséquence de cette évolution, aujourd’hui, des « organisations djihadistes » ont pignon sur campus et agissent de concert avec les « administrateurs progressistes » qui dirigent Harvard, affirme Ruth Wisse.

L’esquisse de cette évolution historique a été corroborée par des études très étayées. Dans son livre, The Closing of the American Mind (1987), Allan Bloom, philosophe américain, décrit comment les cris de révolte des années 1960-1970 (guerre du Viêt Nam, droits civiques des minorités de couleur) ont été figés en slogans gauchistes par de nouveaux dogmatiques qui ont présenté leur conformisme comme « le nec plus ultra de la rébellion ».

Heather Mac Donald, professeur de science politique, a décrit dans The Diversity Delusion (2018) comment les universités ont enseigné à leurs étudiants à voir l’« oppression partout » et à devenir aveugles « à la tyrannie exercée par leurs propres institutions ».

John Ellis, professeur d’histoire littéraire (The Breakdown of Higher Education, 2020), a décrit lui aussi ces universités comme des « terrains d’entraînement pour l’activisme politique ».

Mais dire qu’Harvard est devenu un bastion de l’islamisme signale plus qu’une évolution culturelle fâcheuse. Cela signifie qu’une idéologie hostile à ce que sont les Etats-Unis, peut-être manipulée par une ou des puissances étrangères, a conquis une position stratégique sur le territoire américain. Un peu comme des soldats qui ont conquis une colline stratégique sur un champ de bataille.

L’idée que ladite colline stratégique aurait permis aux ennemis de l’Amérique de se frayer une voie en direction du pouvoir politique a même déjà été suggérée par un chercheur égypto-américain, Hussayn Aboubaker Mansour.

En 2023, à l’occasion d’un portrait consacré à Robert Malley, conseiller spécial du président Obama, Hussayn Aboubaker Mansour a présenté l’accord sur le nucléaire conclu entre l’Iran et l’administration Obama en 2015 comme une reddition organisée et voulue de l’Amérique à l’un de ses pires ennemis, l’Iran.

Cette reddition dont Malley a été l’artisan principal n’aurait, selon Aboubakr Mansour, rien eu d’exceptionnel. Malley n’est pas décrit comme ayant participé à « un complot mondial anti-américain ». Il n’a pas reçu d’ordres de Téhéran et n’était pas une cinquième colonne de l’Ayatollah. Ce n’est pas un Juif qui se détestait, ni qui avait comploté secrètement avec le Hamas et l’OLP pour détruire Israël ». Non, Robert Malley était décrit comme le prototype d’une nouvelle classe d’Américains « déterminés à démanteler leur propre pouvoir. Nul besoin d’être marxiste ou islamiste pour en être, il suffit d’être issu d’une famille de la classe moyenne supérieure de la côte américaine, ayant fait ses études dans les écoles les plus prestigieuses du monde ».

L’idée qu’Harvard est devenue une machine à produire des élites antiaméricaines est aussi une conséquence de la cupidité de ces universités d’élite.

Un rapport du Network Contagion Research Institute, une association américaine dédiée à l’étude de « la désinformation à motivation idéologique », a défrayé la chronique l’an dernier. Ce dossier a révélé qu’entre 2014 et 2019, « 349 collèges et universités ont reçu 18 milliards de dollars en provenance de l’étranger (donations, subventions…) ». Pire, près de 200 universités américaines ont dissimulé 13 milliards de dollars de donations en provenance de régimes étrangers. Le rapport a également établi une corrélation entre fonds reçus et violences : entre 2015 et 2020, les établissements ayant reçu de l’argent du Moyen-Orient auraient enregistré 300 pour cent d’incidents antisémites en plus que les autres institutions. Au cours des vingt dernières années, le Qatar a été, de loin, le plus grand donateur étranger des universités américaines, avec un montant total avoisinant les 4,7 milliards de dollars.

Cet argent n’était pas donné gratuitement, mais assorti de conditions quant à son utilisation : création d’instituts d’études moyen-orientales destinés à ruiner la légitimité d’Israël et le soutien que les États-Unis apportent à ce pays.

La ministre de l’Éducation, Linda McMahon, a déclaré le 23 avril que des milliards de dollars provenant de pays comme la Chine et le Qatar ont été injectés dans l’enseignement supérieur américain sans aucun contrôle. « Cette infiltration financière a permis à des gouvernements étrangers de voler la propriété intellectuelle financée par les contribuables et de remodeler la manière dont nos campus d’élite enseignent Israël et le Moyen-Orient », a-t-elle déclaré.

Par cupidité encore, les universités ont massivement ouvert leurs inscriptions aux étudiants étrangers. Moyennant un surcoût, les grandes universités américaines ont importé massivement des étudiants riches de plusieurs pays d’Afrique, du Moyen-Orient ou d’Asie. Non seulement ces étudiants payaient des droits d’inscription plus élevés, mais ils permettaient en sus aux établissements d’enseignement de se pavaner en affichant des critères élevés d’« inclusion et de diversité », la nouvelle idéologie woke qui gangrène les campus. En 2024-2025, Harvard comptait 6 793 étudiants internationaux, représentant 27,2 % de l’effectif total de l’université.

Cette frénésie financière a conduit les universités d’élite à fermer les yeux sur le fait que les étudiants étrangers trichaient plus que la moyenne. Et surtout, tant pis si l’admission d’un riche étudiant du Qatar ou de Shanghai sacrifiait les chances d’un étudiant pauvre américain d’accéder à l’université de ses rêves. En 2015 déjà, Business Insider remarquait que les étudiants étrangers représentaient 12 % de la population étudiante, mais fournissaient 28 % des recettes de droits d’inscriptions annuels (9 milliards de dollars en 2015).

Les violences qui ont perturbé nombre de campus américains tout au long de la guerre entre Israël et le Hamas sont la conséquence des admissions de masse d’étudiants étrangers. Ces derniers ont manifesté leur haine d’Israël et l’administration universitaire les a couverts au nom du droit à la « liberté d’expression ».

Harvard n’est pas une exception, ni aux États-Unis ni en Europe.
On l’aura compris, Harvard n’est ici qu’un exemple. Le même dérèglement a frappé l’ensemble des institutions d’élite au Canada et en Europe. « Sciences Po Paris et Grenoble sont devenus des établissements islamo-gauchistes woke. » Et cela s’est remarqué même à l’étranger. Le journal britannique Spectator estime que « la politique identitaire a corrompu les écoles d’élite françaises : les recruteurs d’entreprise se détournent de ses diplômés, perçus comme des militants plutôt que comme des professionnels ».

Que dire des dirigeants de l’université de Lyon II qui condamnent un professeur au lieu de le défendre quand il est conspué par des islamo-gauchistes et dont le vice-président, Willy Beauvallet-Haddad, twitte son chagrin à la mort de Hassan Nasrallah, feu le chef du Hezbollah ?

Au Royaume-Uni : SOAS (School of Oriental and African Studies) soutient BDS et a accueilli des conférenciers islamistes, tout en étant extrêmement critique d’Israël et de l’Occident. Goldsmiths (University of London), université très engagée sur les questions de race, s’est aussi fait remarquer pour ses harcèlements d’étudiants juifs, les mêmes que ceux qui ont eu lieu à Harvard ou à Yale. En 2010, une association nommée Institut de la cohésion sociale avait listé toutes les universités qui avaient invité des prêcheurs islamistes sur leur campus : University College London, Queen Mary University, City University, School of Oriental and African Studies, King’s College London, University of East London, London School of Economics, Imperial College London, Goldsmiths, University of Westminster…

En Belgique, l’ULB (Université libre de Bruxelles) s’est fait remarquer par ses étudiants islamistes, la pression qu’ils exercent sur le corps professoral et le nombre d’orateurs islamistes invités à s’exprimer dans l’enceinte universitaire.

Une guerre civile
La guerre que mène Donald Trump contre Harvard, Princeton, Yale, Columbia… doit être observée de près. Elle est le prototype de la guerre que tout dirigeant occidental doit mener contre sa propre fabrique d’élites. Il ne s’agit pas de détruire ces établissements, mais de les réancrer dans la culture de la nation qui les a fait naître. Une révolution de type MAGA en quelque sorte.

Auteur : Yves Mamou
Source : https://mamou.substack.com/p/comment-harvard-est-devenue-une-universite

Yves Mamou est un journaliste et essayiste français, connu pour ses travaux portant sur le radicalisme islamique, l’antisémitisme contemporain, les droits de l’homme, et certaines critiques des institutions internationales. Il a travaillé pendant près de 20 ans pour le journal Le Monde, principalement comme journaliste économique et social.

Depuis plusieurs années, il publie des articles et essais dans une veine plus engagée, notamment sur les questions de laïcité, d’islamisme, et du conflit israélo-palestinien. Il contribue régulièrement à des plateformes comme le Gatestone Institute, un think tank américain conservateur. Il tient également un blog intitulé « Yves Mamou : Décryptages », où il publie ses analyses personnelles.

Il est aussi l’auteur de plusieurs ouvrages, dont :
– Le Grand Abandon (2017), un essai critiquant ce qu’il considère comme la démission de l’État face à l’islamisme.
– L’Alliance islamo-gauchiste (2021), qui explore les convergences idéologiques entre certains courants de gauche radicale et des mouvements islamistes.

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

S’abonner
Notification pour
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

0 Commentaires
Le plus récent
Le plus ancien Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires