Cavaillon: une des quatre « saintes communautés »  juives

A Cavaillon, la présence d’une communauté juive est attestée par des documents d’archives dès le 13e siècle.

Image associéeIl est possible que cette présence ait été effective dès l’Antiquité : le musée juif comtadin conserve la lampe dite « d’Orgon » du 1er siècle, gravée d’une ménorah (chandelier à sept branches).

Résultat de recherche d'images pour "lampe dite d'orgon"Lampe juive d’Orgon musée judéo-comtadin de Cavaillon

Au Moyen-Age, cette communauté était parfaitement intégrée à la population locale, beaucoup de Juifs occupaient des fonctions importantes au sein de la ville.

Toutefois, cette situation va se dégrader dès le 14e siècle. En effet, en 1307, Philippe le Bel chasse les Juifs de France ; en 1495 Charles VIII les chasse de Provence ; seul le Comtat Venaissin, terre papale, leur reste ouvert.

Cette tolérance est relative car les Juifs doivent porter un signe distinctif et seront contraints, au début du 17e siècle, à habiter les carrières, équivalent provençal des ghettos italiens.

C’est à Cavaillon que fut instituée la première carrière en 1453.

Au centre de la cité, elle occupait une impasse qui était totalement close tous les soirs. Les Juifs ne pouvaient en sortir que durant la journée.

La vie s’organisait en son sein, tout particulièrement autour de la synagogue, à la fois lieu de culte collectif, salle de réunion pour les baylons (administrateurs de la communauté) et enfin école lorsque le rabbin fait la classe….

 

La Synagogue de Cavaillon | Avignon et ProvenceLa tribune du rabbin

La synagogue de Cavaillon, située rue hébraïque, l’une des plus anciennes synagogues françaises, est édifiée par les Juifs comtadins de Cavaillon à la fin du Moyen Âge au xve siècle, les juifs ayant obtenu de l’évêque de Cavaillon l’autorisation de la construire en 1494.

C’est peut-être sur les substructions de ce premier édifice qu’a lieu la reconstruction du xviiie siècle, dont la communauté prend la décision à l’automne 1771. La synagogue est reconstruite entre 1772 et 1774 comme en témoigne l’ensemble des prix-faits et quittances qui permettent de suivre très exactement les étapes de sa reconstruction.

Si l’expulsion des Juifs des États pontificaux en 1569 n’est que partiellement appliquée, ils sont obligés, à partir de la fin du xvie siècle, de s’installer dans une des quatre « carrières » comtadines (« carriero » en provençal, « messila » en hébreu), c’est-à-dire un quartier de quelques rues bien délimitées fermées chaque soir.

Ce sont les Arba Kehilot, dites les quatre saintes communautés d’Avignon, de Carpentras, de Cavaillon et de L’Isle-sur-la-Sorgue se réfèrant aux quatre saintes communautés de Terre sainte : Jérusalem, Hébron, Safed et Tibériade.

C’est seulement à l’occasion du rattachement du Comtat Venaissin à la France en 1791 que le statut de citoyen étant accordé à tous, la communauté juive quitte la carrière, symbole de leur oppression passée.

Au 18e siècle, la communauté n’a jamais dépassé 200 personnes, puis 50 personnes vers 1850 et une trentaine à la fin du 19ème siècle.

La vigilance de la famille Jouve en faveur de tout le patrimoine de Cavaillon, puis la ville de Cavaillon elle-même, ont permis la conservation exceptionnelle de cet ensemble urbain (carrière, synagogue et bain rituel), seul encore lisible aujourd’hui de cette époque.

Les derniers représentants de la communauté juive de Cavaillon devant le tabernacle de la synagogue en 1913, fonds Jouve.

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Comme à Carpentras, Avignon ou l’Isle-de-Venise – devenue L’Isle-sur-la-Sorgue – la communauté juive de Cavaillon vit depuis 1602 dans un quartier à part, un « ghetto ». On l’appelle « la carrière », du terme provençal qui signifie la rue. Cette situation d’exclusion et de tolérance mêlée, spécifique aux Etats du Pape, est la seule encore lisible dans l’urbanisme des villes de l’ancien Comtat Venaissin.

La carrière était strictement délimitée : au sud, sur la rue Fabriciis, actuelle rue de la République se situait jusqu’au XVIIIe siècle son unique entrée, fermée chaque nuit et à l’occasion des grandes fêtes religieuses chrétiennes.

LA FAMILLE JOUVE

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L’histoire des musées et du patrimoine cavaillonnais est intimement liée à celle de la famille Jouve qui en quatre générations, de la Révolution à la première moitié du XXe siècle, a profondément marqué la cité.

Héritiers d’une famille enrichie dans le commerce des « graines (oeufs) de vers à soie », descendants d’un farouche révolutionnaire Mathieu Jouve Jourdan (1746-1794) dit « Jourdan Coupe-Tête », les Jouve sont devenus, à la fin du 19e siècle, des notables de province.

Trois frères et sœurs, Michel (1852 – 1924), Auguste (1854 – 1936) et Marie-Thérèse (1860 – 1938), fortement attachés à leur ville, sensibles à son patrimoine naturel, monumental mais aussi quotidien, conçoivent, organisent, archivent au fur et à mesure de sa constitution une mémoire cavaillonnaise où s’interpénètrent leur propre histoire et de celle de tout un territoire, celui de Cavaillon.

LES BAINS RITUELS

Le bain rituel ou Mikvé (XIIe-XVIIIe s.)

Élément indispensable à la vie de la communauté juive, situé au cœur de l’ancienne « carrière », au fond de la rue Hébraïque, un bain rituel est conservé dans la cour de la Maison Jouve, propriété de la Fondation Calvet.

Constitué de trois salles voûtées sur un plan en »L », accompagnées de trois puits. Le bain proprement dit, accessible par un escalier en équerre, est placé au nord de la salle principale. Il a une profondeur de 7 mètres au-dessous du niveau de la cour. Il était initialement divisé en deux petits volumes voûtés, séparés par un mur de refend percé d’une porte.

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Construit au Moyen-âge, il a été inscrit au titre des Monuments historiques depuis le 17 décembre 2007 .
Le mikvé se situe au centre de la pratique religieuse juive, le concept de pureté physique et spirituelle étant un pilier fondamental du Judaïsme.
Ce bain est alimenté par une nappe phréatique. Il est en effet indispensable que l’eau du bain au caractère sacré et cathartique provienne d’eaux vives (eau de source, nappe phréatique ou eau de pluie), permettant ainsi aux membres de la communauté d’assurer les rites purificateurs imposés par les décrets divins, qu’il s’agisse de rituels liés à la Pureté familiale (pour les femmes 7 jours après la fin de leurs menstruations ou après un accouchement, pour les hommes en cas de souillure et aux prémices des principaux rituels de la vie : Bar Mitzvah, mariage…), de la purification de la vaisselle qui consiste en son trempage Tevila Kelim dans le cadre du concept Casher (le Pur), ou encore après avoir touché un mort ou un objet impur et, enfin pour les nouveaux convertis.
L’immersion complète assure une purification symbolisant la renaissance du corps et de l’esprit.

LA BOULANGERIE

Propriété de la ville de Cavaillon

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La salle haute de la synagogue ne peut se dissocier de la synagogue basse, réservée aux femmes, servant également de boulangerie comme l’attestent encore la table à pétrir en marbre.

Au sud de cette pièce d’environ 7 mètres sur 5 se trouve l’imposant four circulaire et voûté, de 2m50 de diamètre. Il servait, durant la fête de la Pâque juive * (Pessa’h, commémoration de l’Exode), à la cuisson du pain azyme appelé par les Comtadins « Coudole ».

Le contraste entre les deux salles est saisissant : lumière, couleurs et sentiment d’espace en haut ; obscurité, humidité et étroitesse en bas… Deux espaces architecturaux qui témoignent, à leur manière,  des conditions de vie des Juifs dans l’ancienne carrière.

Jforum par www.cavaillon.org

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