Nir Barkat, maire de Jérusalem : « L’Europe et les États-Unis ne sauraient pas gérer une intifada des couteaux »

Les Israéliens apprennent à vivre avec une « intifada des couteaux » désormais plus religieuse que réellement nationaliste. Mais l’exportation du phénomène serait-elle aussi « gérable » sous nos latitudes ?

Nir Barkat, maire de Jérusalem : "L'Europe et les États-Unis ne sauraient pas gérer une intifada des couteaux"

 

La « rue israélienne » n’a pas l’air particulièrement perturbée par l' »intifada des couteaux », l’épidémie de poignardages aveugles qu’elle subit déjà depuis des mois. A Tel-Aviv, cette espèce de San Francisco du Moyen-Orient, on continue à jogger en bord de mer et à siroter des mojitos en terrasse rue Bograshov pendant qu’à Jérusalem, le Lourdes local, les orthodoxes en redingotes remontent encore l’avenue Ben Yehuda en marmonnant leurs prières sans souci apparent. 

Les pèlerins chrétiens du monde entier qui ont cassé leur tirelire pour parcourir le pays la Bible en guise de guide du routard sont peut-être un peut moins nombreux, c’est sûr, et les vendeurs arabes d’articles religieux made in China font sans doute un peu moins de chiffre d’affaires entre la porte de Jaffa et le Saint-Sépulcre mais, au final, c’est business as usual en terre sainte…

Nir Barkat, le maire de Jérusalem, attribue cette relative absence de tension à l’habitude qu’ont les Israéliens  de ce genre de situation : « Je crois que la seule différence notable est que les gens ont désormais tendance à regarder devant eux en marchant dans la rue plutôt que les yeux rivés sur l’écran de leur iPhone. Je ne sais pas si c’est efficace contre les terroristes mais ça leur évite au moins de se prendre un poteau de signalisation dans la figure… ». 

Jean-Claude Gaudin en Chuck Norris ?

Du point de vue de ceux qui, en France, et en dépit d’une connaissance parfois lacunaire de ce qui se joue entre Israéliens et Palestiniens, ont choisi de soutenir les seconds plutôt que de se demander comment les réconcilier une fois pour toute avec les premiers, ces poignardages sont de toute manière autant d’actes politiques légitimes. La poursuite d’une diplomatie de désespérés par d’autres moyens, comme dirait Clausewitz s’il était reporter à Al-Jazeera… Mais Barkat serait en désaccord, qui pointe surtout l’absence de référence au conflit proprement-dit dans cette intifada hors-normes : « Les assaillants sont souvent très jeunes, peu politisés, et leur profil est plus fréquemment celui d’ados radicalisés religieusement sur les réseaux sociaux que de défenseurs de la cause palestinienne. C’est « Allah Akbar ! » qu’ils crient en attaquant, pas « vive la Palestine !« « .

La nouvelle perception israélienne de la situation est effectivement que c’est l’expansion de discours fondamentalistes déconnectés de « la Cause » plus que le nationalisme qui alimente cette vague de violence, le Fatah de Mahmoud Abbas comme le Hamas a Gaza étant eux mêmes débordés par l’émergence d’un islamisme plus centré sur le fameux « rétablissement du Califat » que sur la création d’un État palestinien souverain. D’où le parallèle que suggère Nir Barkat entre ces attaques, le plus souvent dirigées contre des civils lambda de tous âges, et les « loups solitaires » qui animent désormais les rubriques de faits divers en Europe et aux États-Unis :  « En France, vous faites déjà face à des phénomènes similaires, comme dans l’affaire du Thalys par exemple. Des gens dont on ne sait pas s’ils agissent de leur propre chef ou s’ils sont téléguidés – et sans doute est-ce un peu les deux finalement–  se lancent dans des attaques souvent suicidaires et totalement indiscriminées et c’est quelque chose avec quoi il va vous falloir apprendre à vivre« .

Dans ce contexte, il constate que son pays est vraisemblablement mieux préparé que l’Europe à en gérer les conséquences pratiques, ne serait-ce que parce que la majorité des Israéliens, hommes et femmes, sont passés par l’armée et ont au moins une vague idée de ce qu’il faut faire face à un homme armé d’un couteau semant la panique dans la file d’attente d’un arrêt de bus :  » Dans le train Paris-Bruxelles, ce sont des militaires américains en vacances qui ont permis d’éviter le drame. Pas spécialement des héros, mais des gens entraînés et aguerris ; un fanatique a plus de chance de tomber sur ce profil à Jérusalem qu’à Paris ou à Londres« . Et le maire de Jérusalem sait sans doute de quoi il parle en l’espèce, cet ancien start-upper passé à la politique, auquel on prête parfois des ambitions nationales, ayant lui même stoppé une attaque en février dernier, Chose que l’on imagine mal sous nos latitudes, un Jean-Claude Gaudin jouant les Chuck Norris étant assez improbable…

Atlantico

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