Photo: des enfants dans une ambulance pendant une évacuation médicale de la ville assiégée de Douma, dans l’est de la Ghouta, quartier de Damas, Syrie le 27 Décembre, 2017. REUTERS/Bassam Khabieh

Y a t-il le moindre espoir que les vœux du nouvel an pour que la paix et le calme reviennent en Syrie, s’accomplissent? Oui, il y a toujours de l’espoir. Mais s’il y a quelque chose à retenir du triste spectacle de la politique de l’Occident (principalement celle des Etats-Unis) en Syrie, au cours des sept années passées – c’est que l’espoir – seulement accompagné par une rhétorique hautaine et des protestations plaintives – est le plus vide et le plus inutile des sentiments.

En l’absence du moindre engagement à protéger les civils syriens, 2018 et les années qui suivront seront marquées par le dépeçage d’un pays où l’espoir est sans domicile fixe comme des millions de Syriens, hommes, femmes et enfants.

Certains observateurs voient de l’espoir dans les signes de dégoût populaire iranien à l’encontre des kleptocrates religieux qui dirigent le pays. Il ne fait aucun doute que de nombreux Iraniens pensent que le soutien apporté au régime Assad en Syrie débouchera sur une longue période de dépenses (militaires) sans contrepartie : c’est une observation dont l’exactitude est manifeste. Même si le régime Assad devait bénéficier d’une perfusion financière de la part des gouvernements européens, par crainte d’un chantage aux flux migratoires incessants, il n’y a tout simplement aucun moyen que le clan Assad et son entourage puissent exercer son emprise sur le pays, sans des milices chiites organisées, financées et dirigées par l’Iran.

L’instabilité persistante en Iran pourra t-elle persuader le Guide Suprême qu’il faut réduire les pertes investies à fond perdu en Syrie? Probablement pas. S’il décidait de lâcher un os à ronger à l’opinion publique d’Iran, ce ne serait probablement pas la Syrie. Le joyau de la couronne de la politique régionale iranienne, sous la direction actuelle, est le Hezbollah au Liban, pour lequel la Syrie est une plaque tournante vitale.

La dépendance du Hezbollah à l’égard de la Syrie, puisqu’elle lui sert de profondeur stratégique et de lien logistique avec sa maison-mère en Iran, ne diminuera pas, alors que l’étendue tentaculaire des trafics de drogue et du blanchiment d’argent fait se font au vu et au su du grand public, au Liban et au-delà.

Le Hezbollah est au cœur de la « Révolution Islamique », le nom sous lequel se cache la kleptocratie cléricale soutenue par un « Corps des Gardiens de la Révolution » violent et prospère. « Un système de truands jouissant d’un vernis de respectabilité internationale, qui les fait passer pour un gouvernement « modéré ».

Bien qu’on puisse espérer du changement, ceux qui se font passer pour les « modérés », les « pragmatiques » et même les « réformateurs » de la République Islamique, n’ont jamais minimisé l’importance du Hezbollah pour la santé et le bien-être de l’opération qu’ils mènent.

D’autres observateurs professent qu’ils nourrissent l’espoir d’une perspective où la Russie pousserait Assad vers la sortie. Bien qu’on puisse prier pour que le Président Vladimir Poutine, réélu par ses concitoyens en mars 2018, tourne alors la page en Syrie et oblige Assad à partager le pouvoir pour déclencher une transition politique, il y a très peu de preuves qu’il ait, soit suffisamment de pouvoir, soit même la volonté, de réaliser un tel changement politique.

Le régime lui-même évalue le partage du pouvoir d’une façon identique à toute entreprise criminelle : comme une façon de signer son propre arrêt de mort. Bien que la puissance aérienne russe ait été importante dans la stabilisation militaire du régime, c’est l’Iran qui est la clé de la survie politique d’Assad.

Et si la malfaisance, la corruption et la violence de l’entourage du dirigeant pousse des millions de Syriens supplémentaires dans la direction de la Turquie et de l’Europe de l’Ouest, ce sera d’autant mieux du point de vue du Kremlin. En effet, la seule perspective de migrations de masse alimentera les tentatives russes pour faire chanter l’Europe, en l’obligeant à rendre hommage à son client syrien.

Depuis bientôt sept ans, l’Occident a, d’une manière commode, minimisé la menace que lui pose le viol de la Syrie commis par le régime Assad. La Russie, l’Iran et le régime lui-même ont mis plus de poids et de moyens à maintenir le clan au pouvoir, que l’Occident ne l’a fait à limiter ses déprédations violentes, ceci dit pour tester les limites de l’euphémisme.

Certains qui ont tenté, de l’intérieur, de façonner la réponse adéquate de l’administration Obama aux atrocités commises par Assad, au début de la vague de crimes, n’avaient aucune idée du fait que le président américain avait renoncé à protéger les civils syriens, par crainte de contrarier un Iran courtisé pour obtenir un  accord nucléaire. Des reportages récents démontrent que l’administration a obligé le Département du Trésor à alléger les sanctions contre le Hezbollah ou à ne pas l’inculper pour trafic de drogue, à cause de cette même peur et ces révélations sont malheureusement sans surprise.

Laissons de côté les pour et les contre du JCPOA. Comment se fait-il que personne au sommet de l’administration Obama ne se soit rendu compte que Téhéran chercherait un accord nucléaire pour ce qu’il lui rapporte et qui soit cohérent avec ses propres intérêts? Pourquoi les Syriens, les Européens et même les Américains (cibles du trafic de drogue du Hezbollah) soient soumis à un tel risque de cette façon?

Si son espoir consiste à avoir le moindre rôle réaliste à jouer en Syrie, en 2018, l’Occident devra enfin percevoir le régime Assad comme la menace sécuritaire qu’il a toujours été. Non, ce n’est pas un appel à un changement violent de régime. Le point de départ de l’autodéfense de l’Occident est la protection de ses civils. L’administration Obama l’a rejeté presque gratuitement pour complaire à l’Iran.

Un Occident sérieux quant à sa propre défense, commencerait par déterminer des moyens pour entraver, compliquer, sanctionner et bloquer ces actions punitives menées par le régime syrien, pour lequel aucun crime n’est assez vil qui vaille qu’on l’évite.

Espérer que Bachar el Assad, Vladimir Poutine et Ali Khamenei respecteront, en 2018, la vie des Syriens et serviront de bouclier à l’Occident pour l’abriter des conséquences de leurs homicides de masse est pire qu’un coup dans l’eau. On espère plutôt que l’Occident redécouvrira les mérites d’une défense active contre ceux qui menacent sa sécurité en pratiquant le massacre à grande échelle en Syrie.

Par FREDERIC C. HOF

Frederic C. Hof est directeur du Centre Rafiq Hariri de Conseil de l’Atlantique sur le Moyen-Orient. 

atlanticcouncil.org

Adaptation : Marc Brzustowski

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