Suicide du commandant de bord, avion abattu par un missile, désintégration de l’appareil en vol… En l’absence de toute trace de l’avion et de la moindre preuve, les pilotes interrogés par Le Figaro imaginent les hypothèses les plus folles pour expliquer le drame.

Cinq jours après la disparition du vol MH370 de la Malaysia Airlines, les enquêteurs n’ont toujours pas la moindre piste aussi bien pour retrouver la trace de l’épave du Boeing 777 que pour construire le début d’un scénario s’appuyant sur des faits établis.

Du coup, chez les pilotes comme les chez les internautes, ce sont les scénarii les plus fous qui sont imaginés. Comment expliquer cette disparition des écrans radars qui n’a pas émis d’alerte suite à un éventuel changement du plan de vol, qui n’a émis aucun message automatique (Acars) de maintenance suite à une éventuelle série de panne, qui a eu lieu dans une zone à fort trafic maritime sans que personne ne voit ni n’entende quoi que ce soit, et le tout sans que la balise de détresse – l’ELT «Emergency Locator Transmitter» – ne soit enclenchée par l’impact.

Autre fait troublant: les «Pingers», ces émetteurs solidaires des boîtes noires de l’appareil qui émettent durant un mois, ont une portée de 2 à 3 kilomètres. Dans des eaux profondes de seulement de 50 à 100 mètres, l’un des nombreux navires déployés sur la zone aurait dû capter un signal.

A moins que les enquêteurs ne cherchent pas au bon endroit. «On n’a jamais vu ça, explique un commandant de bord d’Air France qui officie sur Boeing 777. Pas un indice, pas une trace.

Juste un avion qui disparaît soudainement dans une zone qui n’a rien à voir avec le désert maritime de l’Atlantique sud dans le cas du Rio-Paris de juin 2009».

La dépressurisation explosive

La révélation mercredi d’un cas de fissure sur un Boeing 777 découverte l’an dernier au États-Unis et l’instruction donnée par l’agence américaine de l’aviation civile (FAA) d’inspecter 120 Boeing 777 immatriculés aux États-Unis afin de «détecter et réparer d’éventuelles fissures et signes de corrosion dans le fuselage qui peuvent provoquer une soudaine dépressurisation et la perte de l’intégrité de l’avion» a relancé plus que jamais le scénario de la panne technique ou de l’incident ayant provoqué la désintégration de l’avion en vol.

«Pourtant, même avec une fissure de 40 cm, un avion ne doit pas disparaître comme ça des écrans», explique un pilote d’Air France.

Pourtant, en 2002, le vol 611 de la China Airlines avait lui aussi soudainement disparu des écrans radars. Désintégré en vol, il s’était écrasé dans le détroit de Taïwan.

D’après l’enquête, c’est une fente dans le fuselage et la fatigue structurelle de l’avion qui aurait entraîné l’explosion de l’appareil. Mais dans le cas de l’appareil de la Malaysia Airlines, la vétusté de l’appareil ne semble pas pouvoir être mise en cause.

La thèse du suicide du pilote

Le scénario du suicide ressort régulièrement lors de drames mystérieux. Selon l’agence américaine de l’aviation civile (FAA), le suicide du pilote représente moins de 0,5 % des accidents aériens mortels. Cette thèse avait également été invoquée lors de l’accident du vol AF 447. «Lorsque nous n’avions rien à nous mettre sous la dent, durant cette longue période avant que l’épave soit retrouvée, la Gendarmerie du transport aérien a réfléchi à cette hypothèse, explique un proche de l’enquête.

Mais les psychiatres interrogés avaient alors expliqué qu’une pulsion suicidaire et l’instinct de survie résistaient mal aux trois minutes de chute vers l’océan».

Pourtant, la phase de vol au cours de laquelle est survenu l’accident duu vol MH370 est tout à fait propice à un drame humain. En effet, quarante minutes après son décollage, l’appareil avait atteint son altitude de croisière depuis quelques minutes.

Ce moment où tout le monde se décontracte. Où le personnel navigant commercial commence ses allées et venues et où un pilote peut très bien sortir du cockpit pour satisfaire un besoin naturel ou saluer une connaissance dans l’avion. Ce moment du vol est tout à fait propice à une folie du pilote resté dans le cockpit ou à une intrusion.

Il y a plusieurs cas de suicides de pilotes dans l’histoire de l’aviation civile. Les deux cas les plus connus sont le drame du vol Egyptair du 31 octobre 1999 qui s’est écrasé dans l’océan Atlantique avec 217 personnes à bord, ou encore celui du vol SilkAir 185 du 17 décembre 1997 qui s’est écrasé en Indonésie en tuant 104 personnes.

L’avion abattu par un missile

L’hypothèse selon laquelle l’avion aurait été abattu par un missile semble tout à fait en phase avec les seuls faits en la possession des enquêteurs: une brusque disparition, pas de message d’alerte, pas de débris. «Ca peut sembler fumeux mais c’est pourtant une hypothèse crédible quand on voit le mystère qui entoure cette disparition, explique un pilote d’Air France au Figaro. Il y a des précédents qui rendent imaginable un tel scénario. Le 1er septembre 1983, le vol Korean Air Lines 007 avait ainsi été abattu par un chasseur de l’Union Soviétique à l’ouest de l’île de Sakhaline.

Le 27 juin 1980, c’est le vol 870 Itavia, un DC-9-15, qui s’était écrasé en mer Tyrrhénienne après avoir été touché par un missile. Les 81 personnes à bord ont disparu dans le drame.

L’incendie à bord

Un possible incendie à bord est également une hypothèse crédible, renforcée par la disparition rapide du Boeing 777 de Malaysia Airlines. «En cas d’incendie à bord, ça va très vite et l’équipage a à peine le temps d’appeler au sol», explique un expert aéronautique.

Le 3 septembre 2010, un Boeing 747 d’UPS avait détecté un incendie à bord 22 minutes après son décollage. L’appareil n’a jamais pu revenir se poser et il s’est finalement écrasé non loin de Dubaï.

Les autorités ont établi que le feu s’était déclenché à l’avant du compartiment cargo du pont principal qui contenait une cargaison de batteries au lithium. «L’incendie lié à du fret à bord est une hypothèse possible pour le vol MH370, explique un expert. Le Boeing 777 a un seul pont passagers et donc beaucoup de place pour du fret».

Le détournement qui se termine mal

Le scénario d’un avion détourné ou d’un détournement qui se termine mal est également possible et coïncide bien avec la soudaine volatilisation de l’appareil. En coupant le transpondeur du bord, une main malveillante peut en effet faire disparaître l’avion des écrans des radars secondaires (ceux qui captent le signal du transpondeur).

«Ensuite pour totalement disparaître et n’être capté par aucun radar primaire (qui perçoit la présence métallique) l’avion doit descendre au ras des flots, explique un expert, mais il doit également couper les messages automatiques de maintenance Acars.

Une opération qui n’est pas à la portée du premier venu».

L’ensemble de ces hypothèses alimentent les discussions entre pilotes. «Pourtant qui eut cru que l’AF 447 avait décroché suite à une erreur de pilotage, interroge un pilote.

La disparition du vol MH370 est sans doute liée à une combinaison de facteurs, c’est souvent le cas, et liée à un incident que nous ignorons et qui fera sans doute avancer la sécurité aérienne quand il sera découvert».

Fabrice Amedeo

13-03-2014/ Le Figaro.fr Article original

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Richard

Les interrogations des pilotes sont largement fondés et ils savent doit quoi ils parlent. C’est incroyable cette manie de faire passer pour des cons les gens les plus informer, cela vient peut-être d’abrutis comme De Chavanne qui a initié ce genre de comportement dans ces émissions télévisées dont on connait les résultats aujourd’hui.
Pour les imbéciles utiles qui croient encore à une justice indépendante il y a 2 cultures dans l’aviation:
Boeing, on reconnait les faits et on agit, puis Airbus, on sait mais on se tait, le pognon d’abord les rectifications et il faut se donner le temps de créer une vérité plus ou moins partagée……. Mais il y a aussi les politiques, comment affronter la réalité des problèmes ? Alors la meilleur parade qu’ont nos responsables est de donner homéopathiquement des éléments de vérité et éviter de parler des choses à chaud, sous l’émotion. C’est comme cela qu’ils laissent insidieusement le monde s’installer sous la soumission du terrorisme. A cogiter.