Le camp de Buchenwald, où le PCF contrôlait “l’administration des forces du travail”.
Coup de tonnerre à l’automne 1983. Dans un article du Courrier des Yvelines, le conseiller municipal centriste de Sartrouville Laurent Wetzel proteste contre la volonté de la municipalité, alors communiste, de donner à une rue le nom de Marcel Paul (1900-1982), ministre PCF de la Production industrielle dans le gouvernement du général de Gaulle en 1945. En cause : son attitude à Buchenwald. Selon Wetzel, Paul « entra dans la direction interne » du camp de concentration nazi, où il « disposa du sort, c’est-à-dire de la vie et de la mort, de nombreux camarades de déportation ». Et d’ajouter : « Dans ces fonctions, il tint compte essentiellement de l’intérêt de son parti. » «Outrage », « indignité »… : la réaction du Parti est tonitruante. Mais la polémique va se retourner contre les communistes. Normalien et professeur agrégé d’histoire, Wetzel — qui, comble d’humiliation, leur enlèvera la mairie de Sartrouville en 1989 ! — produit en effet plusieurs témoignages d’ex-déportés publiés après guerre et confirmant ses accusations. Parmi eux, celui de l’écrivain communiste Jorge Semprún dans son livre Quel beau dimanche ! (Gallimard, 1980) : « L’organisation communiste clandestine, qui contrôlait l’administration des forces du travail à Buchenwald, se débrouillait pour que les membres du parti, les résistants véritables, ne soient pas envoyés dans les Kommandos extérieurs les plus durs (Dora, S III), sauf accident imprévisible… »
Combien de “politiques” français, tchèques ou polonais ont-ils été, à des postes d’encadrement, des bourreaux pires que certains SS ?
Autre témoignage accablant, celui de l’ancien déporté Henri Blanc, dit Paul Noirot (1923-2010), devenu par la suite membre de la section économique du comité central du PCF. Dans La Mémoire ouverte (Stock, 1976), il écrit : « Quand les SS exigeaient mille hommes, il fallait les choisir : par exemple désigner ceux qui partiraient à Dora creuser sous la schlague les tunnels à V2, c’était désigner qui mourrait et qui survivrait. Or ce partage des hommes se fit jour après jour, à divers échelons de l’appareil clandestin. Nous y avons tous plus ou moins participé, et nous en avons profité. […] On essayait de tirer d’affaire ceux que les dirigeants du Front national [mouvement de résistance communiste, NDLR] estimaient nécessaires à la France d’après-guerre […]. La communauté du camp se partageait entre une “aristocratie”, elle-même à cercles concentriques, que nous voulions sauvegarder, et les autres. » Et l’ex-déporté de s’interroger : « Y avait-il toujours une différence d’essence, si j’ose dire, de nature en tout cas, entre nos bourreaux et nous-mêmes ? Combien de “politiques” français, tchèques ou polonais ont-ils été, à des postes d’encadrement, des bourreaux pires que certains SS ? »
“Ils planquaient les communistes importants”
Pilote de chasse et membre de l’Organisation de résistance de l’armée (ORA), déporté à Buchenwald en mai 1944, le lieutenant Albert Bannes, non-membre du Parti, a lui aussi témoigné, en 1996, de cette “collaboration” du PCF avec les gardes de Buchenwald : « Toute l’organisation intérieure du camp était dirigée par des déportés. À Buchenwald, les communistes avaient pris le pouvoir et ne risquaient pas de le lâcher. […] Il y avait un Lageraltester, des chefs de block, avec toute l’armada des Kapo, des Stubendienz, Forarbeiter, etc. »
Et de citer le “héros rouge” Marcel Paul : celui-ci, accuse-t-il, « n’était pas kapo, il était bien au-dessus, il était chef de l’Arbeitstatistik », directement placé « sous l’autorité des SS ». « Théoriquement, explique-t-il, ce service devait sélectionner les détenus selon leur métier et capacités pour les envoyer dans les différents Kommandos. En réalité, ils planquaient les communistes importants, mais envoyaient systématiquement tous les officiers à Dora, où la moyenne de vie était de 45 jours ».
Toute l’organisation du camp était dirigée par des déportés. Les communistes avaient pris le pouvoir.
Selon l’ancien pilote, « ce système n’a pas été mis en place par Marcel Paul, il fonctionnait bien avant ». Le chef marxiste n’en a pas moins accepté d’en prendre la tête. Bannes, lui, refusera d’en profiter. Peu après son arrivée au camp, deux communistes s’approchent de lui. Paul, lui disent-ils, a appris qu’il avait fourni armes et cartes d’identité à la résistance rouge en Auvergne et en Corrèze. S’il accepte de « marcher avec eux », Paul lui trouvera « une bonne planque » . L’officier décline. « Faut être c… pour refuser quand Marcel Paul te propose une planque. T’as pas fini de le regretter ! » , lui lancent-ils. Quelques jours plus tard, trois « types à brassard » le font sortir du rang. Puis le rouent de coups. Avant, le lendemain, qu’il soit expédié à Dora…
Miraculé, Bannes survivra à l’épreuve. Mais n’oubliera pas.
Apprenant que Marcel Paul, alors ministre, participait à Clermont-Ferrand, en janvier 1946, à une réunion de la Fédération nationale des déportés et internés résistants et patriotes, il s’y rend, se lève et prend la parole devant les veuves présentes : « Vous, Mesdames, dont les maris sont morts à Dora, savez-vous qui les a désignés pour aller à Dora ? C’est lui ! » Furieux, Paul tente de le frapper, mais l’ancien pilote esquive et riposte par un coup de poing au visage. Jamais, pourtant, Paul ne portera plainte.
L’Histoire interdite, le nouveau hors-série de Valeurs actuelles.
« Il y a deux histoires : l’histoire officielle, menteuse, puis l’histoire secrète, où sont les véritables causes des évènements », écrivait Balzac. C’est à cette histoire de France secrète, rendue taboue par la bien-pensance, qu’est consacré le nouveau hors-série de Valeurs actuelles, présenté par Jean Sévillia, l’auteur de Historiquement incorrect (Fayard).
Par Eric Letty
HEUREUSEMENT QUE LE PCF NE REPRÉSENTE PLUS RIEN AUJOURD HUI SAUF QU IL A ENFANTE UNE LFI QUI NE VAUT GUÈRE MIEUX.