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Les femmes à l’heure de l’irruption de la culture musulmane

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Après 1968 s’impose la reconnaissance dans les sociétés libérales du droit des femmes à se déplacer librement, en sécurité, à tout moment et en tout lieu. L’apprentissage de cette liberté ne va pas de soi pour les hommes occidentaux, et a fortiori pour ceux issus de sociétés patriarcales arabo-musulmanes.

Les agressions sexuelles commises en masse sur des jeunes femmes allemandes dans les gares de Cologne et d’autres villes le soir de la Saint-Sylvestre donnent lieu à un intense débat sur la responsabilité de la culture arabo-musulmane dans l’irruption de cette forme de criminalité. Une première façon d’éviter certains amalgames est sans doute d’appliquer la notion sociologique classique de contrôle social à ce qui s’est passé ce soir-là, lorsque des jeunes de la périphérie sont descendus en centre-ville pour participer à une fête violente, comme le faisaient déjà les loubards des années 50. Typiquement, dans ce genre de situations, le contrôle social se relâche, et la conjonction de la masse et de l’ivresse favorise l’expression débridée de toutes sortes de frustrations et de rancœurs.

Cette remarque ne rend pourtant pas compte de la spécificité sexuelle de cette violence de la Saint-Sylvestre, exercée contre des femmes, dans une Allemagne libérale et démocratique, par de jeunes arabo-musulmans, sur le modèle de ce qui pouvait se passer autour de la place Tahrir pendant la révolution égyptienne. Toute la question est, en effet, de savoir si le ressort de cette violence réside dans le caractère particulier des cultures moyen-orientales, ou s’il relève d’un caractère masculin beaucoup plus universel ayant donné lieu à différentes sortes de contrôle et de régulation suivant les sociétés.

On pourrait rappeler ici une étude fameuse du psychologue David Buss sur un campus américain, qui avait trouvé que 75 % des garçons auxquels une étudiante demandait d’aller au lit immédiatement acceptaient la proposition, tandis qu’à l’inverse aucune fille n’acceptait la même proposition faite par un étudiant – la moitié d’entre elles accordant néanmoins un rendez-vous ! On tire de ce genre d’étude l’idée plausible que la motivation sexuelle, quoiqu’aussi intense chez les deux sexes, ne donne pas lieu à la même hâte réalisatrice chez chacun d’entre eux.

Les différentes écoles d’anthropologie ou de sociologie s’accordent sur la présence dans la plupart des cultures de cette dissymétrie, considérée comme un trait distinctif de ce qu’on appelle le sexisme. Le sexisme ne relève pourtant pas d’une différenciation «biologique» des sexes, puisque chez de nombreuses espèces animales, les femelles sont, au contraire, beaucoup plus intrusives que les mâles, mais plutôt d’une préculture ancestrale liée à la lutte des mâles pour contrôler la fécondité féminine et assurer la reproduction des patrimoines et des lignées masculines. La sélection sexuelle des mâles par les femelles, qui est le modèle dominant en éthologie animale, a pu ainsi être inversée à l’avantage des hommes dans les sociétés humaines.

Cette préculture sexiste ancestrale, qui place l’initiative sexuelle dans les seules mains (baladeuses) de l’homme, a donné lieu à toutes sortes d’avatars historiques et culturels : les sociétés bourgeoises du XIXe siècle protégeaient la respectabilité des femmes honnêtes par leur tenue à l’écart non pas de l’espace public, mais de l’espace populaire, source de tous les dangers masculins. Dans celui-ci se mouvaient au contraire librement non seulement les femmes des classes pauvres, mais aussi les bourgeois qui trouvaient dans les rues nocturnes des villes européennes de quoi alimenter leurs désirs de conquête. De même, les patriciens romains pouvaient tout se permettre à l’égard des femmes du peuple et des esclaves, mais risquaient les peines les plus lourdes s’ils se «frottaient» aux femmes de leurs classes.

De son côté, le monde arabo-musulman a généralisé la mise à l’écart detoutes les femmes en les éloignant, sous des modalités plus ou moins sévères, de l’espace public afin de les soustraire aux regards, aux désirs et aux attouchements des prétendants et des concurrents. Le beau film tunisien de Leyla Bouzid, A peine j’ouvre les yeux, qui se préoccupe d’ailleurs moins de religion que de commune humanité, offre un instantané saisissant de cet état, lorsque la mère de l’héroïne concentre tous les regards sur elle en entrant à l’improviste dans un restaurant fréquenté uniquement par des hommes – la scène a, paraît-il, été tournée en situation réelle.

Ce qu’on a inventé dans les sociétés libérales postérieures à 1968 pour faire face aux mêmes enjeux est radicalement nouveau, puisqu’il s’agit d’une reconnaissance du droit des femmes à circuler librement et en toute sécurité dans l’espace public. Ce droit est étroitement associé à celui du sexe hors mariage pour tous, lequel n’est donc plus une tache indélébile sur la réputation des femmes mais a, au contraire, le double effet de relâcher la pression de la domination masculine sur la fécondité féminine et de rendre moins compliqué la rencontre sexuelle pour les femmes comme pour les hommes. La baisse générale du niveau de misère sexuelle réalise ainsi le grand vœu du psychanalyste Wilhelm Reich, tout en favorisant la liberté et la sécurité de tous.

La plupart des femmes ont appris à leurs dépens que l’apprentissage de cette liberté ne va pas de soi, pour les hommes occidentaux qui ont eu pourtant une bonne cinquantaine d’années pour se familiariser avec elle, et, a fortiori, pour des individus issus de sociétés patriarcales, devant en outre faire face au quotidien à une propagande religieuse qui revendique le retour aux fondamentaux du Moyen Age. Face à cette situation, il ne s’agit pas pour les politiques de bavarder de façon sommaire sur le débat savant excuse versus compréhension, mais d’appliquer fermement les lois démocratiques qui protègent les libertés des femmes, pour que chacun finisse par comprendre pourquoi on ne doit en aucun cas les violer.

Derniers ouvrages parus : la Dépendance amoureuse, Paris, PUF, 2015 ; Ethica erotica, Presses de Siences-Po, 2013.

Patrick Pharo Sociologue, directeur de recherche au CNRS

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2 Commentaires
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BAY

Ils arrivent ici sans leurs femmes, il faut bien qu’ils dégorgent ( l’homme a des besoins sexuels et tous le moyens sont bons pour satisfaire ces besoins ) quitte a attaqué des femmes européennes pour satisfaire leurs besoins, de plus c’est écrit dans leur coran il peuvent donc sauter sur les femmes pour satisfaire leurs besoins.

Richard

Entre la pornographie sur internet, et les politiques défroqués Européens, je n’arrive pas à savoir ce qui excite le plus ces « pauvres musulmans » en manque de « liberté ».

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