Le lien inextricable
« Et la Terre est divisée en départements de mémoire et régions d’espoir… Et la terre est un paquet bien attaché et tout s’y trouve rassemblé et il est fermement attaché et ces liens blessent parfois », écrivait le poète israélien Yehuda Amichai, dans son poème « Amour de la Terre », réussissant semble t-il à capturer ce moment unique de discordance que nous éprouverons ce soir où la Journée du Souvenir s’évanouit pour faire place au Jour de l’Indépendance.
C’est un enchaînement fort et déroutant et, même s’il est douloureux, il est nécessaire, alors que la joie exprime la gratitude envers ceux que nous pleurons. Ces moments sont similaires à l’accouchement d’un enfant , quand la forte douleur du travail fait place à la félicité d’une nouvelle vie qui est venue au monde.
Le calendrier juif est plein de telles transitions brusques, nous transportant de l’obscurité à la lumière et de la douleur à la joie immense. Pourim est précédé par le jeûne d’Esther et la Haggadah de Pessah lie entre eux l’amertume de l’esclavage à l’élan joyeux vers la liberté. Shabbat et les prières des fêtes juives comprennent souvent la prière communautaire et nationale de l’Yizkor honorant ceux que nous aimons, les victimes de la Shoah et les soldats tombés pour la défense d’Israël.
Il semble que la douleur est nécessaire pour rendre la joie complète, il semble que l’obscurité et la lumière coexistent dans une alliance des contraires.
La mémoire est la fondation sur laquelle notre maison nationale a été bâtie et toutes deux sont inextricablement liées. La mémoire est le mât où s’accroche le drapeau et où nous le ferons flotter ce soir, le composant indispensable illustrant la transition émotionnelle et cognitive de la douleur à la joie.
Par Marc Brzustowski
 |
 |
