Droites radicales allemande et autrichienne ne sont pas identiques
Lors des récentes élections parlementaires, la droite radicale allemande, l’AfD et le FPȌ autrichien ont substantiellement amélioré leurs positions. Concernant autant les Juifs qu’Israël, une analyse plus approfondie est nécessaire pour comprendre les différences d’attitudes entre ces deux partis de l’aile droite. Beaucoup d’organes de presse regroupent ces partis comme s’ils étaient identiques. Les intérêts israéliens et des Juifs locaux ne sont pas, non plus, nécessairement les mêmes.
Avec 12, 6% de suffrages, lors des élections du 24 septembre, l’AfD est entré, pour la première fois, au Bundestag – le Parlement allemand -, devenant le troisième parti y siégeant. Une partie de son cercle dirigeant actuel semble viser un rôle de long terme dans l’opposition. La conséquence en est que certaines personnalités sont capables d’adopter des positions extrêmes et que l’AfD ne sente aucune pression le poussant à expulser des représentants douteux.
Martin Hohmann est un membre de l’AfD revenu au Parlement. En 2003, les Chrétiens Démocrates (CDU) ont expulsé ce membre du Bundestag, quelques mois après qu’il ait désigné les Israéliens comme « une nation de criminels ». Il avait employé l’expression “Tätervolk” -« une nation d’assassins »- un terme qui est généralement réservé à l’Allemagne nazie[1].
Le co-Président de l’AfD, Alexander Gauland, est aussi un ancien membre du CDU. Il veut tirer un trait définitif sur le passé nazi, même si une analyse superficielle montre à quel point ce passé continue d’influencer l’Allemagne contemporaine, de bien des façons[2]. Cette réalité s’est encore renforcée, comme conséquence aux nombreuses réactions négatives à l’encontre de la politique d’accueil de plus un million de réfugiés, prônée par la chancelière Angela Merkel.
Gauland a fait l’éloge des soldats allemands qui ont fait leur devoir, lors de la Première et de la Seconde Guerre Mondiale. Il a clairement fait savoir qu’il ne nie nullement la Shoah ni les crimes de guerre commis par la Wehrmacht, l’armée allemande[3]. Gauland a aussi déclaré que les Juifs n’ont rien à craindre de son parti[4]. Plusieurs dirigeants juifs allemands ne sont pas d’accord.
Le dirigeant de l’AfD dans la région de Thuringe, Björn Höcke, a désigné le mémorial de la Shoah à Berlin comme le « monument de la honte ». Il a aussi nié qu’Adolf Hitler puisse avoir été le mal absolu. Höcke a ajouté : « Nous savons qu’il n’y a ni noir ni blanc en matière d’historie ». Sa prise de position a subi les attaques de plusieurs membres de son parti, bien qu’il ne soit pas le seul au sein de l’AfD à avoir fait des remarques qui déforment et abusent du sens de la Shoah[5].
On doit souligner que Frauke Petry, ancienne coprésidente de l’AfD, a quitté le parti. Elle voulait que l’AfD soit conservateur, libre de tout antisémitisme et devienne un partenaire potentiel de la coalition au pouvoir. A la demande de Petry, j’ai écrit un avis affirmant la nature antisémite d’une série de déclarations de Wolfgang, un membre de l’AfD, du Parlement régional du Bade–Württemberg[6]. Peu de temps après, Petry a convaincu Gedeon de quitter le parti AfD[7].
L’avenir de l’AfD demeure peu clair. Probablement, y aura t-il des tensions persistantes entre les nationalistes radicaux et les personnalités plus modérées. Pourtant, on peut douter que les partisans de l’AfD remplaceront les Musulmans en Allemagne en tant que principaux antisémites du pays. Cependant, l’Allemagne est un Etat fédéral et les positions des représentants régionaux de l’AfD ne osntpas nécessairement identiques à celles des dirigeants nationaux. Le négationnisme concernant la Shoah ou les remarques antisémites peuvent refaire surface. Les Juifs d’Allemagne peuvent protester, mais devront vivre avec ça. Les indicateurs restent que l’essentiel parmi les dirigeants de l’AfD sont pro-Israéliens[8].
En Autriche, la situation est partiellement différente. Le Parti conservateur ȌVP, dirigé par Sebastian Kurz, âgé de 31 ans, est arrivé en tête, le 15 octobre, lors des élections parlementaires, en remportant 31, 5% des suffrages. Kurz a décidé de lancer des négociations de coalition avec le FPÖ, dirigé par Heinz-Christian Strache. Ce parti d’extrême-droite est arrivé en troisième position au cours des élections,avec 26% des bulletins recueillis, juste derrière le SPÖ socialiste conduit par l’actuel Premier Ministre Christian Kern.
Kurz a déclaré que le principe de la tolérance Zéro à l’encontre de l’antisémitisme est, pour lui, fondamental. Il a fait savoir au FPÖ qu’il attend d’eux un engagement ferme contre l’antisémitisme. Il a ajouté que c’est « une précondition à toute coalition sous ma gouverne[9]« .
Si cette coalition prend forme, ce ne sera pas le premier gouvernement formé par l’ȌVP et le FPȌ: de 2000 à 2005, ces deux partis ont déjà constitué une telle coalition sous l’égide du Chancelier de l’ȌVP, Wolfgang Schüssel. Plus tôt, en 1970 le chancelier socialiste Bruno Kreisky avait nommé quatre anciens Nazis au sein de son cabinet de 11 ministres. Il les a, à la fois, respectabilisé et blanchi de toute responsabilité. Kreisky était un Juif dint les agissements étaient mus par la haine de soi, proférant à quyi voulait l’entendre que les Juifs ne formaient pas un peuple et que si jamais ils en étaient un, alors ce ne pouvait être qu’un peuple hideux[10].
La communauté juive autrichienne a exprimé son opposition contre l’entrée du FPȌ au gouvernement. Oskar Deutsch, le Président de la Communauté Juive de Vienne a écrit une lettre ouverte au ȌVP et au SPȌ. Dans un communiqué concernant le FPÖ, il dit : « Quand un loup se cache sous une peau de mouton, il modifie son apparence, mais pas sa nature[11]« . Quand Deutsch a écrit contre le FPÖ sur sa page Facebook, il a reçu une flopée de réactions antisémites[12]. L’ancien Président de la Communauté Juive, Ariel Musicant a, en plusieurs occasions, déclaré que le FPÖ est constitué d’un noyau dur nazi dans ses gênes[13].
La réalité actuelle de l’AfD n’exigera pas qu’Israël ait des contacts officiels avec ses représentants. Si le FPÖ entre au gouvernement autrichien, ses Ministres pourraient devoir contacter des représentants israéliens ou se rendre en visite dans le pays. Si le gouvernement d’Israël ne boycotte pas les ministres du parti néerlandais D66, de gauche libérale et incitateur anti-israélien, il n’y pas non plus de raison de boycotter les ministres du FPÖ, à moins qu’ils ne fassent des remarques antisémites. Cela les mettrait de toute façon, en conflit avec les dernières déclarations de Kurz.
Par Manfred Gerstenfeld
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[1] www.welt.de/politik/article308309/Hohmann-vor-Parteigericht-der-CDU.html
[2] www.zeit.de/politik/deutschland/2017-09/afd-alexander-gauland-nazi-zeit-neubewertung
[3] www.welt.de/politik/deutschland/article168696834/Gauland-verteidigt-seine-Aussage-ueber-Wehrmachtssoldaten.html
[4] www.tachles.ch/news/juden-haben-gemaess-der-afd-nichts-zu-befuerchten
[5] www.newsweek.com/jews-germany-anti-semitic-hitler-afd-579952
[6] www.audiatur-online.ch/2016/11/01/definition-von-antisemitismus-eine-graue-theorie/
[7] www.spiegel.de/politik/deutschland/wolfgang-gedeon-tritt-aus-afd-fraktion-aus-a-1101509.html
[8] www.timesofisrael.com/loathed-by-jews-germanys-far-right-afd-loves-the-jewish-state/
[9] http://derstandard.at/2000066522122/Regierungsverhandlung-Warnung-vor-FPOe-loest-antisemitischen-Sturm-aus
[10] Robert S. Wistrich, From Ambivalence to Betrayal: The Left, the Jews, and Israel (Lincoln: University of Nebraska Press, 2012), 496.
[11] http://derstandard.at/2000066468022/Israelitische-Kultusgemeinde-warnt-OeVP-und-SPOe-vor-dem-blauen-Wolf
[12] http://derstandard.at/2000066522122/Regierungsverhandlung-Warnung-vor-FPOe-loest-antisemitischen-Sturm-aus
[13] http://diepresse.com/home/innenpolitik/711439/Muzicant_FPOe-hat-einen-Kern-von-Kellernazis
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