Ukraine : « Militairement, les Russes ont déjà perdu la guerre », selon un ancien officier de l’armée française

Selon Guillaume Ancel, il est « probable » que les Ukrainiens préparent une troisième contre-offensive, qui serait « fatale » à l’armée russe.  

Les Russes ont « déjà perdu la guerre » sur le plan militaire, estime sur franceinfo, Guillaume Ancel, ancien officier de l’armée française, alors que l’armée ukrainienne est entrée, samedi 1er octobre, dans la ville stratégique de Lyman, à l’est du pays, dans la région de Donetsk. Vendredi, l’annexion par Moscou de cette partie du territoire ukrainien a été fermement condamnée par la communauté internationale. Selon Guillaume Ancel, les dernières déclarations de Vladimir Poutine ne seraient qu’un moyen de « masquer la débâcle de son armée ».

franceinfo : Qu’est-ce qui explique cet échec pour la Russie à Lyman ?

Guillaume Ancel : La situation à Lyman illustre parfaitement la situation de l’armée russe. Cela se fissure de toute part, les unités n’obéissent même plus aux ordres de Vladimir Poutine, tout simplement parce qu’elles n’ont plus les moyens de résister. L’armée russe a perdu l’essentiel de son équipement et de son potentiel, en particulier en termes de commandement et de renseignement. Les unités sont quasiment aveugles aujourd’hui, alors que les Ukrainiens sont très bien approvisionnés et surtout remarquablement renseignés. Sur le front de Kherson, dans le Sud de l’Ukraine, les Russes résistent avec la plus grande difficulté. Il est probable que les Ukrainiens, compte tenu des moyens dont ils disposent aujourd’hui, préparent une troisième contre-offensive. Elle serait alors fatale à l’armée de Vladimir Poutine.

Les Russes pourraient-ils perdre la guerre relativement rapidement ?

En fait, ils l’ont déjà perdu militairement. Ils n’ont pas les moyens de résister, ils peuvent seulement prolonger un petit peu leur débâcle. C’est simplement une question de temps. Vladimir Poutine a laminé son armée. Ses rodomontades, y compris sur l’utilisation de l’arme nucléaire, montre notamment qu’il essaye de masquer la débâcle sur le terrain.

La Russie a annoncé la mobilisation partielle de sa population, le 21 septembre, ce qui représente 300 000 réservistes. Cela pourrait-il permettre de redresser la situation ?

C’est une pure fiction. Leur mobilisation est trop tardive et totalement chaotique. Ce n’est pas au moment où un incendie se déclare qu’il faut aller recruter des sapeurs-pompiers ! Nous voyons bien que les Russes n’ont aucune intention d’aller se battre et qu’ils ne se sentent absolument pas menacés par les Ukrainiens. C’est déjà un échec. Quand on voit par ailleurs l’état des unités qui sont sur le terrain, qui sont censées être les meilleures, je vous laisse imaginer à quoi ressembleraient des unités mobilisées, mal équipées, absolument pas formées et pas commandées. Ce serait rajouter une catastrophe à la catastrophe : aujourd’hui, l’armée russe est en total échec.

Pourquoi la reprise de Lyman est-elle un atout stratégique pour l’armée ukrainienne?

L’armée russe a déclaré ce samedi après-midi s’être retirée de la ville de Lyman, encerclée par les Ukrainiens.

Les militaires ukrainiens affirment ce samedi avoir encerclé plusieurs milliers de soldats russes à l’est de Lyman, symbole de l’occupation russe au début du conflit, et être entrés dans la ville. « C’est une défaite pour l’armée russe », estime le général Jérôme Pellistrandi, pour qui cet encerclement « traduit bien cette dynamique offensive maintenant du côté de Lyman ». « Les forces d’assaut aériennes ukrainiennes entrent dans Lyman, dans la région de Donetsk », a annoncé ce samedi sur Twitter le ministère ukrainien de la Défense.

Un « carrefour stratégique »

Pourquoi cette ville ukrainienne précisément constitue-t-elle une prise importante pour les forces de Kiev ? Selon le consultant, elle est cruciale car « la ville de Lyman était un carrefour stratégique, logistique pour les forces russes vers le Donbass ».

« Il faut rappeler que les distances sont très importantes donc on utilise le chemin de fer. Il faut des points de regroupement et Lyman faisait partie de ces sites logistiques importants pour le soutien des forces russes », détaille-t-il ce samedi. La ville constituait un « nœud ferroviaire qui était très important pour la logistique des forces russes », résume-t-il.

Une nouvelle dynamique

Plus largement, la prise de cette ville permet à Kiev, après deux semaines d’avancée à pas comptés, d’afficher une nouvelle dynamique positive, en espérant marquer un point de bascule dans le conflit. « C’est une manière de mettre la pression non seulement sur Donetsk, mais également sur Lougansk, donc de bien montrer que rien n’est figé et que les Ukrainiens sont capables de porter des coups et de désorganiser les Russes », développe le général Jean-Paul Paloméros, ancien chef d’état-major de l’armée de l’air et ancien commandant suprême de l’Otan.

Un peu plus tôt ce samedi, l’armée ukrainienne avait affirmé avoir « encerclé » plusieurs milliers de soldats russes dans cette ville de la région de Donetsk, annexée vendredi par la Russie. Selon un porte-parole, « environ 5000-5500 Russes » étaient retranchés dans et autour de Lyman ces derniers jours.

Moscou minimise ce nouvel échec

Du côté de Moscou, la perte de Lyman « traduit la désorganisation, voire la débandade des forces russes dans cette région », souligne Jérôme Pellistrandi. Le Kremlin minimise de ce fait, sans surprise, cet échec en assurant ce samedi s’être « retiré » de la ville, comme si c’était un « acte volontaire », souligne le général Pellistrandi. « Ce retrait leur permet d’échapper peut-être à la capture d’une centaine de prisonniers », estime par ailleurs le consultant Défense.

L’annonce n’en fait pas moins tâche pour les forces russes, alors qu’elles revendiquaient vendredi encore l’annexion de quatre nouveaux territoires ukrainiens, dont fait partie Lyman. Le contraste est saisissant entre les déclarations victorieuses de Vladimir Poutine sur la Place rouge vendredi. « Sur le terrain, la réalité est toute autre », constate Jérôme Pellistrandi.

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