Noah: Le courage de vivre avec incertitude

La paracha en bref

 

Il existe un Midrach obscure pour expliquer les paroles de D.ieu à Noa’h. “D.ieu parla à Noa’h en ces termes : “Sors de l’arche” (Genèse 8:16). À ce propos le Midrach dit :

Lorsque la pluie cessa, Noa’h s’est dit: Puisque je suis entré dans l’arche avec la permission de D.ieu, puis-je en sortir sans Sa permission ? Le Saint, béni soit-Il, Lui a répondu : “Cherches-tu une permission ? Dans ce cas, je te donne la permission.” Puis D.ieu dit à Noa’h : “Sors de l’arche.

“Rabbi Yéouda bar Ilaï commente :

“Si j’avais été là, j’aurais brisé les portes de l’arche et j’en serais sorti.”[1]

La leçon de ce Midrach est que lorsqu’il s’agit de reconstruire un monde brisé, on n’a pas besoin d’attendre une quelconque permission. D.ieu nous donne la permission. Il s’attend à ce qu’on avance. Rachi affirme que c’est la raison pour laquelle D.ieu a fondé le peuple juif non pas avec Noa’h mais avec Abraham. La Torah dit de Noa’h qu’il “se conduisit selon Dieu”. Mais D.ieu dit à Abraham “conduis-toi à mon gré” (Genèse 17:1).

Lorsque j’ai appris ce Midrach, j’ai subitement compris qu’il s’agit d’une composante importante de ce que représente la foi: dans le judaïsme, la foi d’avoir le courage d’être un pionnier, faire quelque chose de nouveau, emprunter le chemin moins parcouru, s’aventurer vers l’inconnu. C’est ce qu’Abraham et Sarah firent lorsqu’ils quittèrent leur terre, leur foyer, la maison de leur père, afin de se rendre en Israël. C’est ce que les Israélites firent à l’époque de Moïse lorsqu’ils vécurent dans le désert, guidés uniquement par des nuées le jour et par du feu le soir.

  À l’ère moderne, en dépit du fait que la plupart des grands esprits juifs ont soit perdu ou abandonné leur foi, cet ancien réflexe a malgré tout survécu. Comment pouvons-nous comprendre autrement le phénomène d’une minuscule minorité d’Europe et des États-Unis capable de produire autant d’artisans de l’esprit moderne, chacun d’entre eux précurseur à sa façon.

family home fantasy floating mountains house moon

 La foi, c’est avoir le courage de prendre des risques. Ce principe de marcher en avant, cette idée que le Créateur attend de nous, Sa plus grande création, d’être créatif, est ce qui fait le caractère unique du judaïsme dans la haute valeur qu’il accorde à la personne et à la condition humaines.

    La foi est le courage de prendre un risque pour D.ieu ou pour le peuple juif ; de commencer un voyage vers une destination éloignée, sachant qu’il y aura des épreuves en route, mais en ayant également à l’esprit que D.ieu est avec nous, nous prodiguant de la force si nous ajustons notre volonté à la Sienne. La foi n’est pas la certitude, mais le courage de vivre avec incertitude.


[1] Buber’s Tanhuma, 1885, du Midrach Yélamdénou.

Questions à poser à la table de Chabbath

  1. Pourquoi pensez-vous que Noa’h a attendu d’être invité à quitter l’arche ?
  2. Pouvez-vous proposer quelques grandes réalisations juives de l’histoire provenant de la foi, malgré l’incertitude ?
  3. D’après vous, qu’est-ce qui requiert une plus grande foi : s’attacher à toutes les réponses, ou avoir des doutes mais toujours croire ?

UNE HISTOIRE POUR CHABBATH

La couronne de la Torah

Par le grand-rabbin Warren Goldstein

 

 

Rabbi Sacks m’a guidé et soutenu lors de mes jeunes années en tant que grand-rabbin d’Afrique du Sud, alors que j’ai été nommé à un jeune âge. Ce fut l’une des premières personnes à m’appeler lorsque j’ai obtenu le poste ; il fut là pour moi à un moment décisif alors que j’avançais à tâtons, et ce soutien a perduré au fil des années. Sacks incarnait cette idée à propos de laquelle il écrit avec tant d’éloquence dans la paracha de cette semaine : être courageux, prendre l’initiative. Pendant que les autres étaient tétanisés par les problèmes du monde, ou s’y résignaient, lui les affrontait audacieusement et directement.

warren goldstein
Dr. Warren Goldstein est grand-rabbin des synagogues orthodoxes unies d’Afrique du Sud depuis 2005.

Pour moi, la description la plus appropriée de Rabbi Sacks est une phrase que la Torah utilise pour décrire Abraham : “le prince de D.ieu”. Il était un prince parmi le peuple juif et un prince parmi les nations, loué pour son leadership, son intelligence et ses idées. Il y avait par-dessus tout le keter Torah, “la couronne de la Torah” que Rabbi Sacks portait avec tellement de dignité, d’autorité et d’audace. Il faisait briller sa lumière divine afin de mettre en lumière certains des enjeux les plus difficiles et complexes auxquels notre société est confrontée ; l’intolérance religieuse, l’antisémitisme, la laïcité et le matérialisme, la foi et la science, les “politiques de la colère”. Il n’a pas attendu de recevoir la permission de le faire. Il n’y a pas été de main morte. Le paysage était peut-être incertain, mais il est “allé de l’avant”, incarnant le courage auquel il fait référence dans la paracha de cette semaine ; et à travers cet exemple, il nous met au défi de “reconstruire un monde brisé”.


Un Regard Plus Profond

Approfondir les idées partagées par Rabbi Sacks sur Noa’h, le grand-rabbin Goldstein partage ses propres réflexions sur le texte principal de la semaine.

Lorsque l’on fonde une famille, comment pouvons-nous incarner l’idée de prendre l’initiative et d’agir avec audace dans un monde d’incertitude ?

 L’avenir est incertain, inconnu et mystérieux. Mais nous devons aller “de l’avant”, en risquant d’avancer malgré tout. Et nous devons réaliser que l’avenir juif se crée dans le foyer juif.

Il faut du courage pour construire une famille juive, en particulier pour être un parent juif, pour élever des enfants dans un monde d’incertitude, tout en ayant la confiance et la conviction de les élever avec des valeurs juives dans une société hétérogène qui est en désaccord et souvent hostile envers ces valeurs.

L’unité familiale est le fondement de l’humanité. Nous voyons dans la paracha de cette semaine que ce furent Noa’h, sa femme et leur famille qui formèrent le cœur du nouveau monde bâti après la destruction causée par le déluge. De même, les fondements du peuple juif sont les familles de nos pères et mères fondateurs. L’histoire et le destin juif sont interconnectés au destin de ces familles. La structure même du peuple juif, la délimitation des douze tribus, dérive de la famille de Jacob et de ses fils. C’est pour cette raison que nous sommes appelés “la maison d’Israël”. Et l’histoire du peuple juif est écrite dans nos maisons.

 Si nous faisons preuve d’audace, chaque maison juive peut être un sanctuaire spirituel, un lieu de sainteté et de lumière, une source de bonté et de miséricorde, de foi et de connexion. Ce sont des valeurs que nous transmettons à nos enfants autour de la table de Chabbath, en étudiant la Torah et en vivant notre judaïsme. Tel est notre avenir juif. Et, dans un monde incertain, le moment est venu, pour reprendre les paroles de Rabbi Sacks, “d’aller de l’avant” et de le créer dans nos maisons.

JForum avec  Ce résumé est adapté de l’essai principal de cette semaine par Rabbi Sacks, disponible ici: www.RabbiSacks.org

 

 

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

S’abonner
Notification pour
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires