livre de Jonas: l’interprétation allégorique du Gaon de Vilna

Le thème du livre de Jonas est unique, tout entier consacré à la valeur du repentir. C’est la raison pour laquelle il a été inscrit dans la liturgie de Yom Kippour, dans l’office de Minha.

Le Gaon de Vilna propose sur le livre de Jonas une interprétation allégorique. L’idée générale du livre est la suivante: l’âme humaine est envoyée sur terre pour améliorer l’état du monde. Cependant, loin de l’améliorer, elle le pervertit davantage.
Aussi doit elle en passer par un processus de réincarnation (guilgoul) afin d’accomplir la tâche qui lui est dévolue, mais cette fois dans la douleur.
Jonas, Yona, c’est l’âme humaine (yonathi tamathi,“ma colombe, mon amie parfaite” (Note 9), que D.ieu (Amitaï, de émeth : “vérité”) envoie dans le monde ici bas, représenté par Ninive (èl newei qodchékha, Chemoth 15, 13 : “vers la demeure de ta sainteté”).
Mais le cœur (ici le capitaine du navire) et les organes qui composent le corps (ici les matelots) ont besoin de l’âme pour assurer leur survie, et celle ci, que son état de torpeur laisse insensible, ne répond pas à leurs sollicitations.

Le tirage au sort (1, 7) symbolise la question que se posent les organes du corps : A qui et auquel d’entre nous faut il attribuer la “faille” génératrice de nos malheurs ? Est ce la faute de la langue, du cerveau, d’un autre organe du corps ?
Le poisson symbolise la tombe, ainsi que l’ange préposé à ceux qui sont morts. Les trois jours et les trois nuits que Jonas passe dans le ventre du poisson (2, 1) représentent les trois premiers jours après la mort pendant lesquels l’âme se morfond du corps qu’elle a quitté et attend de pouvoir le rejoindre.
Au terme de ces trois jours est annoncée à nouveau à Jonas la mission de partir à Ninive (3, 1 et s.).
Il s’agit là du renvoi de l’âme sur terre au moyen de sa réincarnation dans un corps nouveau, réincarnation dont le but est de lui permettre de réparer les erreurs et les péchés qu’elle a commis dans sa première existence.
Quant au qiqayone, il figure les richesses matérielles que l’homme reçoit dans ce monde ci, émanations du Gan ‘Eden.
S’il est vrai qu’une prophétie annonciatrice de malheur ne se réalise pas nécessairement, le repentir de celui ou de ceux à qui elle est adressée pouvant la révoquer, encore convient il d’apporter quelque nuance à cette affirmation.
Le Ram‘hal (Note 10) fait observer qu’il est exact, en ce qui concerne l’annonce par Jonas de la destruction de Ninive, que la catastrophe prédite ne s’est pas réalisée.
Les habitants de la métropole, grâce à leur techouva, ont fait révoquer l’édit divin. Cependant, il serait inexact de prétendre que la prophétie de Jonas s’en est trouvée abrogée. Ce que D.ieu l’avait chargé d’annoncer, c’est que, quarante jours plus tard, Ninive serait néhpékheth (3, 4).
Ce mot peut certes signifier la destruction. Mais il peut tout autant exprimer l’idée de “renversement”, voire de “révolution”.
Le pardon que D.ieu a octroyé à ses habitants leur a épargné la destruction de leur ville, mais il a entraîné un “renversement”, spirituel celui là, qui n’a rien ôté à la pertinence de la prophétie de Jonas.

JForum avec JACQUES KOHN  www.lamed.fr/
9 Cantique des cantiques 5, 2 ; 6, 9.
10 Dérekh Hachem 3, 4.

JACQUES KOHN 

1 II Rois14, 25.
2 II Rois 10, 30.
3 Rachi sous II Rois 14, 25.
4 Exode 4, 10.
5 Isaïe 6, 5.
6 Jérémie 1, 6.
7 Radaq sous Jonas 1, 1.
8 Da‘ath Miqra p. 7.

Un extrait de “Va, prophétise à Mon peuple !”, Histoire biblique et midrachique des prophètes d’Israël, par Jacques Kohn

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