La Russie ne pourra jamais reproduire la stratégie pratiquée en Syrie,  dans sa guerre contre l’Ukraine. Si elle avait les mains libres en Syrie, et était capable de se déployer sur le terrain, en Ukraine, c’est l’inverse. Les États-Unis sont là avec toute leur puissance, et la Russie a du mal à y mettre le pied. Restent les drones dont elle use et abuse sans grand succès, car beaucoup sont descendus avant d’avoir atteint leur cible.

Le bureau du président ukrainien a appelé à la destruction des usines produisant des armes iraniennes.

Le conseiller du chef du bureau du président ukrainien Mykhailo Podolyak a appelé à la destruction des usines iraniennes de production de drones et de missiles, ainsi qu’à l’arrestation de ceux qui les fournissent à la Russie.

« L’Iran, qui prévoit d’augmenter le volume d’armes pour la Russie, humilie avec défi l’institution des « sanctions internationales ». Il est important d’abandonner le concept de “sanctions sans effet”, de “résolutions de l’ONU sans effet”, et de passer à des outils plus destructeurs – la destruction d’installations de production et l’arrestation de fournisseurs”, a tweeté Podolyak le 24 décembre.

La coopération entre la Russie et l’Iran s’est intensifiée après l’invasion russe à grande échelle de l’Ukraine. Dans cette guerre, comme l’ont déclaré l’Ukraine et les pays occidentaux, la Russie utilise des drones kamikazes de fabrication iranienne, qui ont notamment été utilisés lors d’attaques massives contre des villes ukrainiennes.

L’Iran et la Russie ont démenti à plusieurs reprises des informations sur la fourniture de drones. La Russie, utilisant des drones et des missiles, a lancé des frappes massives contre le système énergétique ukrainien il y a deux mois, le 10 octobre. Pendant ce temps, elle a réussi à désactiver une partie importante du système; en Ukraine, des coupures de courant planifiées et d’urgence sont effectuées.

La Russie a lancé près d’un tiers des drones achetés à l’Iran en Ukraine – Budanov.

Depuis l’été, l’armée russe a acheté 1 700 drones Shahed à l’Iran, ils sont livrés par lots, la Russie a déjà lancé environ 540 de ces drones en Ukraine, a déclaré Kirill Budanov, chef de la direction principale du renseignement du ministère ukrainien de la Défense dans une interview au New York Times.

Selon Budanov, les troupes russes lancent des drones lors de frappes le long de la ligne de front, contre des infrastructures civiles : centrales électriques, lignes électriques et sous-stations électriques.

Le chef de la Direction principale du renseignement du ministère ukrainien de la Défense a noté que la plupart des drones iraniens sont abattus et qu’ils n’atteignent pas leurs cibles.

La publication note que les drones iraniens sont peu coûteux. En Iran, selon Budanov, le coût de production est d’environ 7 000 dollars par unité, bien qu’il ne soit pas clair combien l’Iran facture la Russie pour les armes.

Dans le même temps, comme l’a déclaré le chef de la Direction principale du renseignement du ministère ukrainien de la Défense, l’Iran n’a pas encore remis ses missiles balistiques à la Russie, ce dont les autorités ukrainiennes avaient précédemment mis en garde.

“L’Iran n’est pas pressé de le faire pour des raisons évidentes, car dès que la Russie lancera les premiers missiles, la pression des sanctions sur l’Iran augmentera”, a déclaré Budanov.

La guerre des drones, de la Syrie à l’Ukraine.

La Russie a intégré à sa campagne de Syrie, dès 2015, les drones iraniens qui sont aujourd’hui aussi dévastateurs en Ukraine.

Il n’y a désormais plus de doute sur l’importance du « laboratoire syrien » dans l’offensive généralisée de la Russie contre l’Ukraine. C’est en Syrie que le Kremlin a testé, puis banalisé, des techniques de terreur ciblant la population civile pour mieux affaiblir l’opposition armée : destruction systématique de ponts, d’écoles et d’hôpitaux ; simulacres de « corridors humanitaires » pour mieux piéger les civils croyant échapper à l’enfer ; rouleau compresseur de l’envahisseur visant à ne laisser à la population que l’alternative entre la soumission et l’exode, le tout sur fond de paralysie de l’ONU par le veto russe.

En outre, le général Sergueï Sourovikine, que Vladimir Poutine a nommé à la tête de « l’opération militaire spéciale », en octobre dernier, a longtemps dirigé les troupes russes en Syrie. Et c’est dès sa prise de fonction que l’intégration des drones iraniens aux vagues de bombardements russes s’est avérée dévastatrice pour les infrastructures énergétiques, avec pour objectif affiché de briser par l’hiver glacial la résistance ukrainienne.

Les drones « martyrs » de l’Iran

Le régime Assad s’est très tôt doté de drones iraniens d’observation, de type Mohajer-4 ou Ababil-3, d’une autonomie d’une centaine de kilomètres. Ils sont produits par l’Iranian Aircraft Manufacturing Industries, une société désignée par son acronyme persan de HESA. Ces armements portent des noms à forte résonance islamique, Mohajer signifiant « émigré », en référence aux Mecquois convertis à l’Islam qui ont, en 622, accompagné le prophète Mohammed dans son hégire vers Médine. Quant aux Ababil, ils désignent dans le Coran les oiseaux qui auraient protégé, vers 570, La Mecque contre les envahisseurs venus du Yémen.

La campagne de Syrie que déclenche le Kremlin, en septembre 2015, pour sauver le régime Assad menacé d’effondrement, entraîne une collaboration opérationnelle d’une intensité sans précédent entre les forces russes et iraniennes. C’est tout particulièrement vrai à la base aérienne de Tiyas, dite T-4, proche de Palmyre, où cohabitent les contingents des deux pays. C’est sur cette base que les ingénieurs iraniens assemblent et opèrent les Shahed-129, testant et perfectionnant leurs capacités de combat, par embarquement d’un missile antichar.

En juin 2017, les militaires iraniens et leurs milices affiliées se sentent assez forts pour attaquer au Shahed-129 une position américaine dans le sud-est de la Syrie. La fermeté de la riposte américaine, avec deux drones iraniens abattus, oblige Téhéran à suspendre de tels raids. Mais les leçons opérationnelles du théâtre syrien permettent aux industriels iraniens de développer un Shahed-136, sensiblement plus avancé, d’une portée de 2 500 kilomètres, à une vitesse moyenne de 185 kilomètres à l’heure.

De Palmyre à Kiev

Le drone le plus utilisé par l’armée russe en Syrie est le Forpost, lui-même dérivé du Searcher israélien, un drone de reconnaissance fabriqué sous licence, avec transfert de technologie depuis 2010 d’Israël à la Russie. C’est pour préserver cette coopération très sensible avec Moscou qu’Israël refuse, en septembre 2014, de livrer des drones à l’Ukraine, déjà confrontée à l’annexion de la Crimée par la Russie, puis au déclenchement d’une guérilla séparatiste dans le Donbass.

Cela n’empêche pas le Kremlin de fournir la couverture de ses Forpost aux forces liées à l’Iran en Syrie, contraignant Israël à abattre des drones de conception israélienne pour assurer la sécurité de sa frontière nord. Mais, lorsque le général Sourovikine assume le commandement du corps expéditionnaire contre l’Ukraine, c’est le Shahed-136 qu’il décide d’utiliser massivement contre des cibles civiles avec, depuis, plusieurs vagues de bombardements combinant missiles russes et drones iraniens. Ceux-ci sont qualifiés de « kamikazes » du fait de leur explosion programmée au moment de la frappe.

Les États-Unis et l’Union européenne ont dénoncé cette collusion entre Moscou et Téhéran, adoptant très rapidement des sanctions contre les responsables de ce programme de drones iraniens. La République islamique de l’ayatollah Khamenei nie pourtant avec constance toute responsabilité dans l’utilisation russe des Shahed-136, un déni que le ministre de la Défense ukrainien explique parce « qu’une partie des usines qui les fabriquent ne se trouvent pas sur son territoire, mais en Syrie ». Cette affirmation fait sans doute référence à la base T-4, dans un rappel poignant de la centralité de la Syrie dans l’escalade en Ukraine. Car c’est bel et bien en Syrie que se sont forgées les armes de la terreur russe en Ukraine, d’où la récente mise en garde d’Emmanuel Macron contre « une espèce de multilatéralisme du terrorisme ». Quant à la détermination ukrainienne, loin d’être entamée par cette stratégie de la terreur, elle demeure à l’évidence intacte. Et, en ce jour de Noël, un sapin géant, illuminé aux couleurs jaune et bleu du drapeau national, orné de colombes de la paix et surmonté du trident ukrainien, trône sur la place centrale de Kiev.

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