Israël coincé entre le marteau américain et l’enclume chinoise

Polyamour

L’État hébreu est de plus en plus tiraillé entre le grand allié américain et la Chine, un partenaire économique de première importance. Les pressions des États-Unis pour réduire les échanges économiques et technologiques avec Pékin montent en grade. Objectif : réduire voire interdire des investissements d’entreprises chinoises dans des secteurs israéliens considérés comme « stratégiques » ou susceptibles de favoriser des opérations d’espionnage. Mais Israël traîne les pieds et Pékin hausse le ton.

Victime de sa propre réussite et symbole de la « start-up nation high-tech », Israël se retrouve désormais dans la très inconfortable position d’un pays placé malgré lui entre le marteau et l’enclume. Entre le marteau étasunien et l’enclume chinoise très exactement.

Les Américains ont plusieurs opérations dans le collimateur : en premier lieu desquelles la construction par des Chinois d’un nouveau terminal à Haïfa, le plus important port d’Israël. Détail important : cette installation se trouve à proximité de la base secrète des sous-marins israéliens, dont certains, selon des experts étrangers, pourraient être équipés de missiles nucléaires. De plus, des navires de marine américaine qui voguent en Méditerranée font régulièrement escale à Haïfa. « Cette présence permanente va permettre à la Chine d’obtenir des renseignements sur les déplacements de nos bateaux », a récemment déploré Gary Roughead, ancien chef des opérations de la marine américaine.

Mais les mises en garde, les avertissements en sous-main n’ont pas suffi à freiner l’expansion tous azimuts de la stratégie portuaire menée par la Chine à l’échelle mondiale. Une entreprise chinoise vient ainsi de remporter un appel d’offres pour la construction et assurer le fonctionnement d’un terminal dans le port d’Ashdod situé plus au sud d’Israël. Des sociétés chinoises ont également raflé une partie des contrats pour le prochain tramway de Tel Aviv tout en présentant leur candidature pour d’autres lignes.

10 % DES INVESTISSEMENTS ÉTRANGERS EN ISRAËL SONT D’ORIGINE CHINOISE

Cet activisme se traduit aussi par un vif intérêt chinois pour des start-up israéliennes actives dans des secteurs aussi « sensibles » que la robotique ou l’intelligence artificielle. Environ 10 % des investissements étrangers en Israël sont d’origine chinoise. Cette coopération, qui a connu un léger coup de frein à la suite de la pandémie de Covid, suscite à Washington des « discussions franches » – autrement dit des rappels à l’ordre – adressés lors de rencontres au plus haut niveau avec des responsables d’Israël, le plus grand bénéficiaire, de loin, de la générosité de l’oncle Sam.

Jusqu’à présent, le gouvernement de Naftali Bennett pratique l’art de l’esquive. « La Chine est très importante pour l’économie israélienne et nous devons trouver un moyen d’aborder ce dossier de telle sorte qu’on ne porte pas atteinte aux intérêts israéliens », a-t-il affirmé, ménageant ainsi la chèvre et le chou.

Un exemple : Israël s’est abstenu récemment de s’associer à un texte à l’ONU soutenu par les États-Unis et la France notamment, condamnant la terrible répression exercée par la Chine à l’encontre des Ouïgours, une minorité musulmane vivant dans le Xinjang au nord-ouest du pays.

Mais jouer ainsi sur les deux tableaux pourrait s’avérer périlleux à terme car les Chinois ont commencé à exprimer leur mauvaise humeur. En mai, par exemple, lors du dernier round d’affrontements sanglants dans la bande de Gaza entre Israël et les islamistes palestiniens du Hamas au pouvoir dans cette région, Pékin a condamné beaucoup plus durement l’État hébreu.

RISQUE D’UN RENFORCEMENT DES RELATIONS IRANO-CHINOISES

Plus grave encore : céder sur toute la ligne aux Américains en allant au clash avec la Chine pourrait avoir un effet boomerang en renforçant l’alliance de Pékin avec l’Iran, alors que ce pays et son programme nucléaire sont considérés comme le danger numéro pour l’existence même de l’État hébreu.

La Chine et l’Iran ont d’ores et déjà conclu en mars un énorme accord de coopération économique de 25 ans portant sur des centaines de milliards de dollars. La Chine, premier partenaire commercial de l’Iran, est un des principaux importateurs de brut iranien. Cette alliance s’est également traduite sur le front militaire par des ventes d’armes chinoises et des manœuvres communes. Comme le souligne un diplomate israélien, « il serait stupide de notre part de faire le jeu des Iraniens en les poussant encore plus dans les bras des Chinois ».

Par Julien Lacorie Publié le 09/11/2021 à 11:51  www.marianne.net

MARK RALSTON / AFP

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Charles DALGER

Franchement, tant que TRUMP n’est pas encore revenu au pouvoir, Israël a tout à gagner à faire de fructueuses affaires avec la Chine !

victor nizard

ne faire confiance à aucun des deux