Tribune : David-Olivier Kaminski, avocat et conseiller spécial du président de la Licra *, considère qu’il est de son devoir de dénoncer tout autant l’antisionisme que l’antisémitisme.Combien faudra-t-il de crachats et d’injures, de blessures et d’horions, de morts, enfin, pour admettre qu’une partie, peut-être infime, de la population française a un comportement antisémite et, partant, est elle-même antisémite?

Au point où en sont les choses, n’ayons pas peur des mots forts: la première exigence d’un diagnostic ne consiste-t-elle pas à nommer justement les causes et leurs effets?

Depuis la guerre, la France avait connu cet antisémitisme d’extrême droite qui s’exprimait dans la contestation publique de la Shoah, tout en présentant, de façon plus discrète, le juif comme la cause de tous les maux: n’était-ce pas cet antisémitisme que définissait Jean Paul Sartre?

Aujourd’hui, ceux qui reprennent ces antiennes négationnistes reçoivent systématiquement la sanction méritée d’une condamnation pénale, rendue au nom du peuple français.

Certains voyous, issus de groupuscules néonazis, profanent des cimetières juifs, mais ils sont toujours identifiés par la police, châtiés par les tribunaux, puis remis dans le rang par des juges de l’application des peines: force reste à la loi.

Cet antisémitisme est désormais identifié, contenu et réprimé, car les associations dont l’objet est la lutte contre toute forme de racisme ont su se montrer efficaces pour apporter les réponses judiciaires ou sociétales à cette haine de l’autre particulièrement abjecte.

C’est donc à juste titre que, parmi elles, la Licra a voulu dénoncer l’antisémitisme de l’extrême droite radicale, en le fustigeant, chaque fois que cela a été possible, tant dans son discours politique que dans les actes faussement manqués de ses dirigeants ; il est vrai que cet antisémitisme «classique» ne tue pas, ou ne tue plus.

Mais il en existe un autre, plus moderne, qui a choisi, pour mode d’expression, la radicalisation, l’horreur au nom d’une religion, les actes de violences fondés sur le vieux conflit israélo-palestinien: or, le jeune Français, de religion musulmane, qu’il soit ou non d’origine maghrébine, a-t-il des comptes particuliers à régler avec son jeune concitoyen de religion juive?

Le droit de tuer, de blesser, de haïr serait-il reconnu au nom d’un conflit lointain, complexe et aux réalités mal perçues – voire totalement méconnues – par ceux qui les prennent pour prétexte de leurs actions meurtrières?

Les images entourant la tuerie de Toulouse ont révélé aux Français ce cautère qui infecte la blessure au lieu de la guérir: l’endoctrinement dont la jeunesse est la cible, exhortée à ce djihad, qui n’est qu’un appel au meurtre.

La France de 2012 peut-elle accepter qu’au nom d’une religion, qu’au nom d’un prophète, on instille la haine de l’autre, ici du juif comme en Orient du chrétien?

Passé le temps de l’émotion, de la colère, de l’hommage de la nation endeuillée, il incombe à nos dirigeants de garantir à chacun de nos concitoyens la liberté de vivre sa pratique religieuse, sans se faire agresser en allant prier.

Cela pourrait passer par l’interdiction faite à certains édiles de brandir le portrait de tel ou tel terroriste, au cœur de la commune qu’ils administrent: la république ne peut cautionner un appel à la haine.

Sinon, comment vivre ensemble?

Quand d’autres déclarent que «Gaza est un camp de concentration à ciel ouvert», se rendent-ils compte de la caution politique qu’ils apportent à un Mohamed Merah?

Et combien d’entre eux sont allés à Auschwitz pour en comparer l’horreur à la souffrance d’une ville borne?

Cet antisionisme, propre à certains politiques, le masque tombé, ne laisse apparaître qu’un visage: celui de l’antisémitisme.

Là encore, il appartient à chacun de dénoncer les accords politiques entre la gauche républicaine et la gauche extrême, car il en émane des déclarations foncièrement antisémites sous couvert d’antisionisme.

Alors, la Licra s’est-elle politisée en n’attaquant que l’extrême droite xénophobe, raciste et antisémite sans, en même temps, s’attaquer à l’extrême gauche antisioniste et ce qu’elle abrite?

Sans doute.

Doit-elle y remédier?

Assurément.

* L’auteur s’exprime en son nom personnel.

Paru dans le Figaro, le 10 Aout 2012

Nos non-dits Article original

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