Si les hommes politiques se conduisent enfin en hommes d’Etat et prennent la mesure de la gravité de la situation, les solutions existent pour sortir l’Europe de la crise.
Les marchés ne laissent aucun répit aux peuples aussi longtemps que les hommes politiques ne se conduisent pas en hommes d’Etat.
Cette vieille loi, valable depuis des siècles, est aujourd’hui d’une cruelle actualité.

Il ne sert a rien de refaire l’Histoire ; de répéter que si les décisions prises au dernier sommet européen l’avait été 18 mois plus tôt , il n’y aurait pas de crise de l’euro aujourd’hui, car l’eurozone disposerait de l’outil technique et de l’arme juridique pour contrer la spéculation. En particulier, les banques ne pourraient plus, en même temps et au sein du même établissement, constater des pertes sur les emprunts d’Etat d’un pays et vendre à découvert ces mêmes obligations.

Il est désespérant d’avoir à répéter qu’existe aussi une solution aux problèmes structurels de l’Eurozone ; une solution que beaucoup proposent depuis des années : la mutualisation d’une part plus grande de la TVA entre pays de l’Union, pour financer le service d’eurobonds émis par une entité ad hoc de l’euro zone. Ces eurobonds pourraient utilement se substituer à une partie des dettes nationale et permettre à l’Europe de réinventer son avenir industriel, entrepreneurial et technologique ; et de rembourser sa dette par la seule manière raisonnable, la croissance. Cela ne dispenserait pas d’effort les pays les plus endettés ; c’est à leur portée : il suffirait par exemple de taxer pendant dix ans de 1,5% la fortune privée des Italiens (qui est, en proportion, près de 25% supérieure a celle des autres européens) pour faire disparaître la dette publique de ce pays.

Seulement voilà : les dirigeants européens, sous l’influence de groupes de pression a courte de vue, et incapables de penser la politique hors des exigences de la finance, n’ont pas cru à la gravité de la dynamique en marche depuis la fin de 2007. Ils se sont contentés de naviguer au plus près, d’illusoires sommets européens en G20 de pacotille, repoussant les échéances par des mesures minuscules et de déclarations contradictoires.

S’ils ne veulent pas rester dans l’Histoire comme les fossoyeurs de l’euro, et de l’Union, les dirigeants européens doivent agir très vite. Ils doivent convoquer un nouveau sommet de l’eurozone, qui décidera enfin de ce pas nécessaire vers le fédéralisme en Europe. Et qui, en attendant que cela puisse entrer en vigueur, après le vote des parlements nationaux, qui devront pour cela être convoqués au plus tôt, autoriserait la BCE à défendre la valeur de l’euro et la liquidité du système bancaire par tous les moyens a sa disposition, même les moins orthodoxes.

S’ils ne le font pas, ou s’ils ne réussissent pas à convaincre leurs partenaires de le faire avec eux, les événements continueront de s’enchaîner vers le pire. Ceux qu’on accusait, il y a peu encore, de pessimistes, passeront alors pour de doux rêveurs. En particulier, dans ce cas, les élections présidentielles françaises se dérouleront dans un contexte de débandade, de remise en cause de l’existence même de l’union et d’une récession plus grave encore que celle de 2008.

Alors, les peuples rappelleront à ceux de leurs dirigeants qui n’auront pas su maintenir l’Europe comme la région économique la plus riche et la plus prospère du monde la dimension tragique de l’Histoire.

Jacques Attali

Cet article a été également publié par L’Express

Slate.fr

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Armand Maruani

D’après certaines rumeurs Jacques Attali serait le fils caché de madame Irma et de Nostradamus.

liche

Jacques Attali a raison lisez son livre je l’ai lu c’est très clair ,votre capitalisme incensé conduit le monde à l’impasse ,il va falloir penser que le partage doit se faire ,mais comme tous les financiers et ceux qui ne voyent que par ca vous avez des oeillères on risque pas d’avancer dans ce monde ,toujours les mêmes crises et les mêmes effets sauf que depuis 1929 cela s’accélére le monde est un village avec internet !donc tous les principes des vieux routiers de la finances ne marche plus et de toutes façon comme vous Attali crois dans ce systéme ,hors il ne marchera pas lorsque la population de la planéte va atteindre un certains seuils ,déjà on peut manipuler le génome humain ,on risque de transformer l’humanité dans une sorte de clonage parfait ,alors rassurez vous quand toutes votre saleté de mentalité de crispé du fric auras mi la main sur le controle des individus ,l’homme et la femme de la base ne sera plus indispensable à votre sale vision capitaliste du monde !
l’ouvrier n’existera plus et ne sera plus un frein à votre folie !
la race humaine à ce momennt là n’en auras plus pour longtemps !
terminator pourras prendre le pouvoir

viking

Monsieur J DERVILLIERS, Je vous en veux terriblement ! Pourquoi ? Tout simplement parce que vos remarques sur J ATTALI sont aussi les miennes ! Et du coup, mon  » post » envolé ! Mais très honnêtement, je n’aurais su dire mes remarques aussi bien que vous, et nous voilà quitte(s) !
Oui, vous avez tout à fait raison : Les  » Conseils  » sont toujours bons quand ils assument leurs rôles de Conseils, donc sans obligation de résultats, comme le ci-devant (je n’anoblis avant de l’assassiner)ou comme A. MINK, le premier à la tête d’une banque européenne, dont il a été viré après avoir pris ses fonctions depuis quelques mois seulement ! Mais cela a suffi pour juger des capacités du personnage ! Il est vrai qu’à l’E.N.A. (Ecole Nationale d’Administration, créée en 1945 par un ministre gaulliste, Michel DEBRE – qui aurait mieux fait de se casser la jambe ce jour là -) les futurs hauts fonctionnaires apprennent surtout à faire de beaux discours, et la science politique de nous enfumer, nous petits veaux !
Pour le deuxième, notre Alain MINK, c’est pareil, au niveau du discours , d’un cours magistral, ou sur un plateau de télévision, avec un parterre de nuls, incapables d’un contredit : champion ! Sur le terrain, au pied du mur, comme disent si bien les maçons (pas les francs) on ne voit plus personne ! Et notre cher BERLUSCONI l’a viré à temps !
Mais avec ces champions de Conseils en conseils ou sans eux, espérons ! Espérons que l’€uro ne s’écroulera pas ! Autrement, effectivement, nous risquons tous d’être ruinés ! C’est du moins ce que je pense en toute humilité !
VIKING

J.dervillers

Encore une leçon de « MONSIEUR » Attali…

Dommage qu’il se trompe régulièrement dans ses analyses; il suffit de reprendre ses « prédictions » depuis des années.
Et puisqu’il est si bon analyste, avec de si bonnes solutions pour l’Europe, que dis-je, pour le Monde, comment expliquer qu’il se soit fait « virer » alors qu’il dirigeait une banque européenne?

En soi, c’est peut être une bonne nouvelle que ce monsieur nous annonce une telle faillite, cela indique que nous allons nous en sortir…