ONU : le discours de Netanyahu était un pur chef-d’œuvre

Le discours prononcé jeudi par le Premier ministre Benjamin Netanyahu à l’Assemblée générale des Nations Unies était peut-être le meilleur qu’il ait jamais donné hors des frontières d’Israël. Non seulement en raison de son anglais éloquent et de ses talents exceptionnels de rhétorique, mais aussi de sa capacité presque parfaite à communiquer des messages pratiques et idéologiques à différents publics cibles, de sorte que ses messages produisent des résultats pratiques qu’il recherche.

L’exemple le plus frappant est son affirmation concernant l’entrepôt d’équipement et de matériel nucléaires à Téhéran. Netanyahu a pris les ressources apportées par les renseignements et les a utilisées pour mettre au défi l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et l’a présentée comme une organisation inoffensive et peu fiable, incapable de remplir son mandat.

La révélation, jeudi, du Premier ministre Benjamin Netanyahu à l’ONU d’un site nucléaire iranien précédemment inconnu a provoqué « une pression croissante à l’intérieur de l’Iran », a déclaré un haut responsable israélien ce week-end.

« Ils se demandent comment gérer cette installation, comment l’évacuer, comment la couvrir », a déclaré le responsable. «Il ne fait aucun doute que c’est un site très important pour eux ; ils cherchent à le cacher et à bloquer les accès et fuites de toutes les manières possibles.

Selon le responsable, les 15 kilogrammes de matières radioactives que Netanyahu aurait dit avoir été retirés des installations et dispersés autour de Téhéran ont été enlevés début août.

 

Netanyahu a déclaré qu’il avait transmis les informations sur l’entrepôt atomique à l’AIEA et à son directeur, Yukiya Amano. En principe, son message était sans ambiguïté : notre discussion discrète et le transfert d’informations ne vous ont pas encouragé à prendre des mesures.

Il a dit qu’il souhaitait que l’AIEA fasse face à la communauté internationale et aux médias du monde entier, lorsque le monde occidental sait au moins qu’il est habilité à mener des inspections de sites nucléaires quand il le souhaite, selon les termes du traité nucléaire iranien de 2015.

Les Etats-Unis ont demandé vendredi à l’AIEA d’enquêter sur les nouvelles allégations de Netanyahu, bien que Reuters ait également cité un responsable américain selon lequel les informations du Premier ministre étaient trompeuses et que le site contenait de la documentation et non des matières nucléaires.

Le haut responsable israélien a rejeté ces allégations, vendredi en disant: «Ce ne sont pas que des documents. Il y a d’autres choses là-bas »et a ajouté : « l’a-t-il vérifié? Tout d’abord, laissez-les vérifier. »Il a noté qu’il semblait« très important pour l’Iran de le cacher, de disperser les preuves à travers Téhéran ».

Le haut-responsable a reconnu qu’Israël n’avait pas d’informations sur tout ce qui se trouvait sur le site et a déclaré que c’était la raison pour laquelle l’AIEA devrait «aller vérifier».

 

Mais Netanyahu ne s’est pas contenté de contester l’AIEA dans l’espoir qu’elle finirait par agir. Il a également parlé au monde des 50 kg de matières radioactives que le régime iranien a répandu dans toute la ville de Téhéran, pour tenter de dissimuler ses projets, soulignant que tout habitant de la capitale pourrait être touché par la radioactivité. Ce faisant, il a alimenté le feu du ressentiment envers le régime qui consume le cœur de nombreux Iraniens.

Netanyahu ne s’est pas non plus contenté de révéler l’emplacement de l’entrepôt atomique de Téhéran. Il a également délivré un carton rouge aux civils libanais, soulignant que le Hezbollah dispose d’installations à proximité des quartiers chiites pour améliorer la précision des missiles et des roquettes. Il a montré exactement où se trouvaient ces installations et a averti que toute personne vivant près d’elles est en danger.

En soulignant ses points, Netanyahu a présenté à la communauté internationale un objectif important. Israël ne veut pas, pour le moment, bombarder par les airs ou saboter ouvertement ces installations afin d’éviter de déclencher une guerre avec le Hezbollah au Liban. L’exposition de ces installations oblige néanmoins le Hezbollah à prendre une décision : les déplacer ailleurs ou mettre en danger les civils de la région. En tout état de cause, cela va certainement interrompre les activités de ces installations et forcer le Hezbollah à les déplacer dans des zones moins peuplées où elles seront plus faciles à frapper.

 

Pour assurer la réalisation de ces objectifs, Netanyahu a coordonné par avance une déclaration de l’Unité du porte-parole de Tsahal, qui fournissait aux citoyens libanais les informations manquantes de façon à humilier le Hezbollah et à semer la peur parmi la population civile.

L’utilisation judicieuse par Netanyahu des informations de renseignement sensibles à des fins diplomatiques et dans la guerre pour mettre l’opinion publique de son côté, peut être considérée comme révolutionnaire à l’ère actuelle et s’avérera probablement efficace.

 

Au même moment, Netanyahou a réussi à faire honte à l’Europe pour son attitude d’apaisement envers l’Iran. Ce faisant, il a aidé Trump et peut-être même compliqué les efforts européens pour saboter les sanctions américaines contre l’Iran. Netanyahu a fait cela en établissant un parallèle clair entre l’apaisement de l’Union européenne face à l’Iran aujourd’hui et la politique d’apaisement du Premier ministre britannique Neville Chamberlain envers Hitler en 1938.

Cette imposition de la honte a un but et il ne fait aucun doute que certains dirigeants en Europe se sont trouvé mal à l’aise lorsque le contenu du discours de Netanyahu a été porté à leur attention.

 

Le reste du discours a constitué un débat sur les accusations palestiniennes, libérales et de gauche en Occident, accusant Israël de racisme et d’apartheid pour avoir adopté la loi sur l’État-nation.

Netanyahu a habilement soulevé argument après argument, tout en renforçant sa base de soutien politique à partir de son propre parti et d’autres. L’autre public cible de son discours était le président Trump, que Netanyahu a félicité et encouragé par des compliments.

 

Il a, non seulement, dit les choses qu’il a dites comme récompense à l’égard de la position pro-israélienne de Trump, mais aussi pour le réconforter en faisant applaudir la continuité de sa politique pro-israélienne sans équivoque, le désignant comme digne d’éloges et honoré par les applaudissements qu’il a déclenchés depuis la tribune de l’ONU.

Les évangéliques qui soutiennent Trump ont également reçu leur propre message, destiné à leur rappeler, en citant la Bible, qu’Israël est toujours le peuple qui mérite leur soutien.

Chaque message a été soigneusement calculé pour présenter deux ou trois objectifs et lorsque Netanyahu a adressé ses remarques aux évangéliques, il a également adopté le style de langage employé par les prédicateurs évangéliques. Il ne fait aucun doute que ce discours était une œuvre d’art que peu de dirigeants dans le monde seraient en mesure de réaliser ; néanmoins, l’expérience nous enseigne que nous ne pouvons pas surestimer l’importance des discours prononcés lors de l’Assemblée générale annuelle des Nations Unies.