Mitsvot: par Amour ou crainte de Dieu (2)

Dans la massékhet Shabbat du Talmud de Jérusalem (I,3) il est écrit que la crainte de D. est la couronne de la plus haute sagesse ce qui n’est que le premier échelon qui permette d’accéder à l’humilité.

La haine vouée aux Amants de D. est un obstacle à l’amour de D. mais, les signes de l’amour qui marquent ces Amants de D. comprennent le renoncement à tout ce qui peut troubler la soumission au Créateur car le Craignant D. ou l’Amant de D. doit vénérer le Maître du Monde et Le craindre. Celui qui essaie de ne jamais commettre de faute dans l’observance des mitsvoth est ainsi. Cet amant devient joyeux, il jubile, rempli d’allégresse et de satisfaction tel un jeune enfant qui s’est bien conduit et suppose qu’il va contenter ses parents…tout comme il sera très triste à cause de fautes qu’il aura commises. L’Amant de D doit vivre dans la pénitence et la contrition. La prière doit l’aider dans sa conduite  mais la prière nocturne est plus propice encore car la nuit facilite la concentration et le recueillement et il ne sera pas dérangé….

La solitude protège contre les atteintes extérieures et l’isole dans cette activité  vers D.

Selon Bahya Ibn Paquda, on parvient à l’amour de D. après avoir franchi dix degrés spirituels : reconnaître l’Unicité de D., l’observation des créatures, la soumission à D., l’abandon à D., la purification de l’acte, l’humilité, la pénitence, l’ascèse, (c’est-à-dire : refus du repos et des plaisirs charnels qui ne sont pas strictement nécessaires à la vue) et  c’est ainsi que l’homme peut atteindre le stade de pureté dans l’amour de D.

Rabbi Shim´on Bar Yohai a dit HaKadosh Baroukh Hou a octroyé trois facultés à Israël et toutes s’acquièrent par des souffrances : la Torah, la Terre d’Israël et le Monde à venir. Souffrances morales car il est écrit : « si tu abandonnes la Torah un jour, elle t’abandonnera deux jours….

Dans le Midrash Tadshé (midrash Tadshé ou Beraita de Rabbi Pinhas ben Yair) est écrit le principe suivant : il existe trois sortes de sacrifices : le ôla ou holocauste, les shelamim ou sacrifices de paix, le hatat ou sacrifice expiatoire. Les Justes se divisent eux aussi en trois catégories ceux qui agissent par amour (ahavah) ceux qui agissent en faisant prévaloir leurs requêtes (bakasha), et ceux qui agissent par crainte (yir ´a). En schématisant on pourrait établir le parallèle suivant :

Holocauste…………………. Amour……………………………Gloire de D.

Sacrifice de paix……………Requête………………….A notre bénéfice

Sacrifice expiatoire…………Crainte…………………..A notre bénéfice

 

L’amour a précellence sur la requête et la requête sur la crainte….

La crainte dont il est question ici est la crainte à son niveau le plus bas et la crainte ou plutôt la peur panique de la sanction.

Servir D. avec amour en rendant honneur à la Gloire et au règne de D. est la conduite de certains Justes car D. créa tout ce qui nous entoure par la parole et non en y prenant de la peine.. Et c’est ainsi que la bénédiction de « shé’hakol ni’hya bidvaro » le confirme car Il a tout créé par Sa parole.

C’est pour Le remercier de Ses bienfaits, (puissance, sagesse, bonté et miséricorde) et, parce qu’Il est notre D., notre Père et notre Roi, qu’un holocauste est offert….

Les sacrifices de paix, sont offerts en raison des requêtes que les hommes servant D. ont coutume de Lui adresser en Le suppliant et en Lui demandant de leur donner diverses vertus ou d’autres choses pour leur bénéfice ou pour leur avantage personnel : sagesse, discernement, connaissance, longévité, guérison, une épouse de grande raison, des enfants à la belle nature, réussite professionnelle,…… Salomon n’avait-il pas demandé à l’Éternel qu’Il lui accorde la sagesse ?

Pourquoi alors offrir un sacrifice expiatoire pour la crainte ? Pour ceux qui servent D. avec une grande crainte, voire même une grande frayeur car  les hommes prient pour être sauvés des malédictions proférées par la Torah contre ceux qui transgressent les Paroles divines et que le châtiment  promis devra se réaliser dans ce monde ou dans l’autre.

L’amour a précellence sur la requête et celle-ci sur la crainte ; pourtant. Les trois sacrifices sont offerts dans le même Temple par le même  Cohen à D. Ils sont donc égaux. Ceci veut dire qu’en servant D., l’homme agit par amour en réclamant toujours quelque chose, et en craignant D., l’homme s’abrite toujours dans l’Ombre du Saint-béni- soit- Il. 

George Vajda, zal, (anciennement Professeur de Philosophie à la Sorbonne) s’exprimait ainsi : l’amour de D. est en quelque sorte le ressort principal des relations entre D. et Israël….et, si Israël est fidèle à D, c’est par amour. C’est la raison pour laquelle tout au long de l’Histoire du peuple juif sont citées des personnes qui ont préféré perdre la vie plutôt que d’être infidèle  à D. et L’abandonner.

Aimer D. est donc un engagement total de l’individu et non moins total de la collectivité. L’homme ne devrait donc jamais s’imposer de limites dans l’observance des mitsvoth et par là aussi, à la soumission au Créateur ; l’être humain devrait être vigilant   Afin qu’aucune défaillance de notre part ne vienne entacher cet amour livré au Créateur et au respect ou à l’hommage qui Lui est dû.

L’une des meilleures illustrations d’un amour sans faille pour le Créateur est celle du sacrifice d’Isaac, c’est grâce à cet amour inconditionnel des patriarches a sans aucun doute comme récompense directe l’élection du peuple juif.

Abraham le Patriarche aimait D. inconditionnellement, sans en attendre quoique ce fût tout en Le craignant….

Dans le Sefer Hayashar attribué à Rabbénou Tam (petit fils de Rashi), est posée la question : comment servir D. ? Par la foi est la réponse.

Qu’est -ce que la foi ? Elle résulte de plusieurs vertus : elle dérive de la raison ou de l’intelligence, celle-ci étant un composé d’amour, de crainte et de sagesse. Dans l’analyse de ces notions on peut trouver ceci : les piliers du culte sont au nombre de 5 : l’intelligence, l’amour, la crainte, la sagesse et la foi.

L’intelligence exige des soins attentifs et si l’on y arrive, l’homme atteint presque un degré de perfection car à ce moment- là, il sert D, L’aime et Le craint. En effet l’homme intelligent peut ressentir un amour inspiré de l’une de ces trois façons :

1- Utilité ou espoir d’un avantage,

2-Association ou camaraderie,

3- Inspiré par les vertus de l’aimé.

Or, vis à vis de D., seul l’amour inspiré par les vertus divines est solide.

L’intensité de cet amour est porté aux vertus de l’aimé et est proportionnel à ses propres vertus qui sont l’intelligence et l’âme pure. C’est la raison pour laquelle tout homme à l’intelligence saine et à l’âme pure se sent attiré vers l’amour de D.

L’auteur du Sefer Hayashar, fait remarquer qu’en observant le comportement d´un être qui en aime un autre, il essaie toujours  d’être à son service et, lorsqu’il fait quelque chose qui plaît à l’être aimé, il en éprouve un grand bonheur ;   mais, si, au contraire, il fait quelque chose qui déplaît à cette même personne, il en sera chagriné , désolé voire gêné ou honteux et en concevra un malaise puisque ses actes auront déplu ; aussi, demeurera-t-il dans la crainte. C’est cela la crainte de D. : c’est avoir des attentions et des intentions pures envers D. pour ne pas Le chagriner, D prenant ici l’endroit de l’aimé s’il est possible de s’exprimer de la sorte et de même que la poésie biblique et mystique campe l’amour entre D. et Son peuple…comme s’il s’agissait de l’amour charnel d’un homme et d’une femme. …..

Le Sefer Hayashar et le Maharal de Prague ont en quelque sorte la même  approche  puisque le Maharal s’exprime ainsi pour définir celui qui craint D : c’est la conscience de l’homme qu’il n’est rien devant la Cause, c’est le sentiment d’être une chose créée et du rapport qui existe entre lui et D. (le Créateur). 

Pour le sefer Hayashar, amour et crainte ne sont pas suffisants: il faut y adjoindre la science et la sagesse car, celui qui n’a pas de science ne connaît  pas les vertus de l’aimé donc, l’amour de l’ignorant n’est pas amour, car il n’est pas parfait et ne tend pas même à l’être, or, ce qu’il faut, c’est au moins atteindre à un degré de perfection. L’intelligence lie donc l’amour , la crainte et la science et aucun d’entre ces trois- là n’est parfait sans les deux autres or, ils ont un but: le service de D. : cependant, il ne saurait être question de service de D. sans foi, c’est-à-dire, sans conviction ou sans hypocrisie et, à ce moment-là, il y a obligation désagréable.

Ce raisonnement nous démontre que le fondement du service de D. est la foi et, foi et service de D. se complètent car il ne peut y avoir l’un sans l’autre et procèdent des trois précédents (amour, crainte et sagesse) et par conséquent de l’intelligence.

Pour arriver au service de D. et à la foi, il y a trois degrés à gravir. Le degré inférieur est l’intelligence (degré supporté par quatre piliers qui sont l’étude, le discernement, l’expérience de la vie et la longévité.

A partir de ce degré, l’homme s’élève vers celui de l’amour et de la crainte ainsi que de la science ; ces trois piliers soutiennent le degré supérieur : foi et service. Ces deux piliers composent ce degré supérieur grâce auquel on peut atteindre le plus haut niveau de la conduite humaine : saisir la volonté de D. et être en parfaite communion avec Lui.  C’est-à-dire l’Unité de D. : la Emouna. Il est dit dans le Deutéronome VII, 13 : Il t’aimera et te bénira, si nous- mêmes l’avons aimé et écouté en parvenant à ce haut niveau dont nous venons de  parler. D. aimera cet homme et comblera tous ses vœux, son âme subsistera après la mort et, si un homme souffre sur terre, il peut être assuré de l’amour que D. lui porte car il est de passage sur terre et lors de ce passage, il expie ses fautes ainsi, pourra-t-il dans le monde futur jouir de la récompense à ses bonnes actions, alors que l’autre homme, celui qui a beaucoup de chance sur terre, doit comprendre que cet amour lui est non pas refusé mais qu’il est en examen.

Pour servir D. il faut à l’homme : 

1-Un cœur pur et bon car si l’on est bon avec ses semblables, on l’est forcément vis-à-vis de D.

2- Croire que tout est imparfait hormis D.

3-Postulat lié au second point : reconnaître que D est parfait,

Lorsque ces trois qualités sont réunies, le culte de D. est parfait. De l’amour procède la crainte mais la réciproque n’est pas toujours vraie et D. a loué l’homme pour son amour car la crainte sans amour est propre aux méchants et aux autres nations et non aux tsadikim auxquels s’adresse la mitsva de VeAhaveta.

Reconnaître que D. est parfait. Dans le livre de l’Exode (שמות) il est écrit « ils ont craint D » c’est-à-dire qu’ils ont reconnu D.  il s’agit là de la crainte révérencielle dont il est question supra.

Pour être reconnu comme aimant D., l’homme doit pouvoir disposer des dix qualités suivantes :

Aimer la loi divine

Se délecter du service de D. plus que tout objet de délectation

Mépriser ceux qui méprisent D.(athées etc…) et aimer ceux qui L’aiment.

L’amour des biens de ce monde ne doit pas compter devant le service de D.

Toutes peines, privations, souffrances, seront douces en regard de l’amour de D.

Nulle affaire personnelle ne prendra le pas sur les affaires de D.

Proclamer l’amour de D. devant les hommes et s’en glorifier

Ne point prêter l’oreille aux discours de ceux qui veulent séduire l’amant en le détournant du service de D.

Nul événement heureux ou malheureux ne fait déserter à l’amant le service de D.

Ce service ne visera aucune récompense car il dépendrait alors de quelque chose d’autre et pas de D.

En réunissant ces dix critères, l’homme devient un Amant de D. et atteint un sommet de piété.

Le Sefer HaYashar souligne encore que si l’amour et la crainte ont pour motif une attente, ils ne pourront être durables car, ils disparaîtront dès que l’attente sera comblée ou frustrée. Il ne faut pas que la crainte de D. prenne le dessus de l’amour dont elle procède au risque d’affaiblir cet amour et les vertus qui le caractérisent et en découlent. C’est par rapport à l’équilibre que la créature saura donner à cet amour et la crainte de D. que l’homme sera jugé. Cependant, l’Ecriture et la tradition s’accordent à qualifier de crainte des Cieux, un amour très intense  et essentiel. 

La crainte de D., du Ciel, n’est donc pas une simple crainte-peur, peur de la punition, mais crainte révérencielle qui comporte une note haute en respect,  une notion profonde de l’infiniment petit de la créature face à l’Infiniment Puissant qu’est l’Etre Suprême, de l’être aussi imparfait  que peut l’être l’homme face à la Perfection du Créateur, de la créature impure obéissant à des instincts ou des penchants incontrôlés face à la Pureté et la Sainteté.

En conclusion du livre de l’Ecclésiaste (קוהלת), Salomon s’écrie 

: Crains D. et Ses Paroles, observe-les, car c’est là tout l’homme (  סוף דבר הכל נשמע, את האלקים ירא ואת מצותיו שמורכי זה כל האדם ) dans les Maximes des Pères (פרקי אבות), se trouve un conseil judicieux (פרק 6)Craignez D comme vous craignez les hommes, ce sera déjà un bon point……. ואמרו חכמי המוסר שהלוואי שנירא את ה׳ כמו קטנים ונשים מפני שבדרך כלל פוחדים מאנשים ולא מהקב״ה… 

Caroline Elishéva REBOUH

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