De plus en plus de maires réclament d’être informés de la présence d’individus fichés « S » résidant sur leur commune en arguant de leur pouvoir de police. Cette revendication ne peut pas être acceptée par le ministère de l’Intérieur pour des raisons liées à la nature de ces fiches « S ». En revanche, il me paraît plus opportun, pour les maires qui le souhaitent, de demander à être informés de la résidence d’individus auteurs d’infractions terroristes dans leur commune.

Le fichier « S » doit être considéré comme un outil de travail pour les services de renseignement. Il a pour but de surveiller les déplacements d’individus jugés à risque, sans qu’ils le sachent et sans que personne ne sache qu’ils sont signalés. Il n’a pas vocation à interpellation. Sa pertinence s’amenuise aujourd’hui car la stratégie de l’État islamique tend à promouvoir la « taqiya » auprès de ses combattants, c’est-à-dire, la dissimulation de leur radicalisation, afin de ne pas se faire repérer (terroriste de l’attentat de Nice, commando féminin lié aux bouteilles de gaz à Paris, plusieurs mineurs de 15 ans ces dernières semaines). Je ne pense donc pas que les maires doivent se focaliser sur ce fichier qui sera de moins en moins la panacée.

En revanche, bien plus intéressante me semble être la possibilité offerte par le Fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions terroristes (FIJAIT), créé le 1er juillet 2016 dans la plus grande discrétion.

Ce fichier est, quant à lui, un fichier judiciaire créé notamment par la loi n° 2015-912 du 24 juillet 2015 relative au renseignement. Il a suscité peu de débats et a été inséré dans le Code de procédure pénale par le décret n° 2015-1840 du 29 décembre 2015. Il est nominatif et concerne les infractions terroristes (articles 421-1 à 421-6 du Code pénal) ainsi que les mis en examen sur initiative du juge d’instruction.

Les personnes inscrites au FIJAIT sont soumises à diverses obligations : justification trimestrielle d’adresse, déclaration de changement d’adresse dans les 15 jours, déclaration de déplacement à l’étranger dans les 15 jours précédant le voyage, information préalable lors de déplacement en France pour toute personne inscrite demeurant à l’étranger. Les informations sont accessibles aux autorités judiciaires, aux officiers de police judiciaire habilités et aux représentants de l’État. Toutefois, l’article 706-25-9 du Code de procédure pénale précise que « les maires et les présidents des collectivités territoriales et des groupements de collectivités territoriales sont également destinataires, par l’intermédiaire des représentants de l’État dans le département, des informations contenues dans le fichier pour les décisions administratives de recrutement, d’affectation, d’autorisation, d’agrément ou d’habilitation ».

Plusieurs centaines d’individus sont sortis ou sortiront de prison dans les années à venir, avec un risque important de récidive d’actes terroristes, compte tenu de l’inefficacité de toute tentative de déradicalisation et de l’absence de dispositif de rétention judiciaire. Les services locaux de police et de gendarmerie auront donc connaissance de la localisation des individus auteurs d’infractions terroristes, mais pas les polices municipales dont la proximité avec la population est évidente et qui sont, elles aussi, soumises au même risque.

Les maires me semblent donc parfaitement légitimés à demander une modification de l’art 706-25-9 du Code de procédure pénale, afin d’y inclure leur information, par le préfet, de l’implantation ou du déménagement d’auteurs d’infraction terroriste dans leur commune, en arguant de leur qualité d’OPJ qui leur est conférée par le même Code de procédure pénale et de leurs pouvoirs de police. Le grand rendez-vous entre les acteurs publics sur le thème de la lutte contre la radicalisation, organisé à la Cité des sciences et de l’industrie de la Villette, le 24 octobre prochain, pourrait leur fournir cette occasion.

Consultant en sécurité Bld Voltaire

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