Un an seulement après la fin de son mandat, le septième président de la Ve République publie ses « Leçons du pouvoir ». Avait-il peur qu’on l’oublie déjà ?

A quoi s’occupe un ancien président de la République ? A rédiger ses Mémoires, pardi ! Après de Gaulle, Giscard d’Estaing, Mitterrand, Chirac et Sarkozy, voici donc Hollande qui s’y colle.

Et promptement. Un an seulement après la fin de son mandat, le septième président de la Ve République publie ses « Leçons du pouvoir ». Avait-il peur qu’on l’oublie déjà ? Au fil des pages, il apparaît surtout qu’il brûlait de s’expliquer. Lui qui a souvent confondu « pédagogie et expression » durant son quinquennat semble espérer qu’un livre permettra enfin de faire saisir la cohérence de sa politique et apprécier son action à sa juste valeur.

Macron lui cherche des poux dans la tête ? Ses camarades socialistes pourraient bientôt lui faire le coup du « droit d’inventaire » ? Qu’à cela ne tienne, Hollande établit lui-même son bilan « qui avec le temps se défendra tout seul ». Aux yeux de l’ancien président, le « pataquès Leonarda », le scandale Cahuzac ou les turbulences de sa vie privée ne sont que billevesées. L’histoire retiendra l’essentiel, plaide-t-il, c’est-à-dire les promesses tenues – maîtrise du déficit, inversion de la courbe du chômage et regain de la croissance – ainsi que les réformes accomplies. Oubliant un peu vite ce que ce redressement doit à la baisse du prix du pétrole et des taux d’intérêt. Fier d’avoir maintenu la cohésion nationale face aux assauts terroristes, l’ancien « président normal » attelé à une tâche anormale met en scène sa proximité avec les grands de ce monde.

« Sortant mais pas battu »

Hollande, qui ne supporte pas l’idée d’être considéré comme un roi fainéant, jure avoir pris les décisions qui s’imposaient. Et les assume crânement. S’il n’a pas été en mesure de briguer sa propre succession, c’est que les résultats de sa politique ne se sont pas fait ressentir assez tôt. Et que les divisions de la gauche l’ont empêché de représenter son camp. Mélenchon ? « Le rassemblement ne fait pas partie de son vocabulaire. Il veut toujours être ‘le seul' », tance Hollande pour qui « la gauche radicale ne forge aucun système alternatif ». Hamon ? Il n’en a fait qu’à sa tête. Résultat :

« Une défaite cuisante pour lui. Un désastre pour sa famille politique, qu’il s’empresse de quitter en signe de gratitude. »

En politique, il faut avoir de la chance. Et elle a souri, cette fois, à ce renard de Macron. Pour ne pas paraître aigri, Hollande doit retenir ses coups. Mais tout indique qu’il n’a pas digéré l’affront de son ancien protégé. Entre les lignes, et le plus souvent sans le nommer, il ne cesse de le critiquer et de lui administrer, un brin paternaliste, ses fameuses « leçons du pouvoir ». « Sortant mais pas battu », l’ancien président qui ne saurait renoncer à la politique ne croit guère au « nouveau monde ». « L’ancien monde, c’est le mien. Et il a de l’avenir », grince-t-il.

Avec le recul, il semble regretter amèrement « ce qui aurait pu advenir » après l’implosion de Fillon.

« Un candidat de la gauche, si elle avait été unie, était en mesure de l’emporter. »

Vraiment ? Encore un petit effort, monsieur le Président. Vous semblez oublier les onze années pendant lesquelles vous avez gouverné le PS et qui n’ont pas permis de clarifier la ligne entre posture d’opposition et culture de gouvernement. Et s’il fallait chercher là l’origine de l’impopularité de votre présidence et toutes les élections intermédiaires perdues pendant le quinquennat ? Les socialistes, qui détenaient tous les pouvoirs en 2012, n’en ont plus aucun aujourd’hui. Voilà qui n’est pas un simple effet du « procès en illégitimité » intenté à la gauche, du bashing médiatique, de l’immaturité des frondeurs ou de la malchance pluvieuse. Un président devrait aussi dire ça.

Sylvain Courage

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

S’abonner
Notification pour
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

1 Commentaire
Le plus récent
Le plus ancien Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Filouthai

Le Gras de la Corrèze laisse -t- il des recettes de cuisine intéressantes ?
C’est le seul domaine où il peut avoir un vrai avis, vu son embonpoint.

Pour la cuisine politique, son œuvre reste un désastre même s’il refuse de le reconnaître comme à son habitude.