Vayechi (5774) –
Beréchit s’achève sur une note sublime de réconciliation entre Joseph et ses frères. Ses frères étaient effrayés à l’idée qu’il ne leur avait pas vraiment pardonnés de l’avoir vendu comme esclave.
Ils craignaient qu’il n’ait, simplement, que reporter le moment de sa vengeance,
“N’ayez pas peur.
C’est la seconde fois qu’il leur dit ce genre de choses. Plus tôt, il s’est exprimé de façon identique, lorsqu’il a, pour la première fois, dévoilé qu’il – cet homme qu’ils pensaient être un vice-roi d’Egypte
“Je suis votre frère Joseph, celui que vous avez vendu en Egypte! Et maintenant, ne vous affligez pas et ne soyez pas en colère contre vous-mêmes pour m’avoir vendu ici, parce que c’était pour sauver des vies que D. m’a
C’est un moment crucial de l’histoire de la Foi. Cela marque la naissance du
Mais, il s’instaure aussi un autre principe important : l’idée de D.ivine Providence. L’histoire n’est pas ce que Joseph Heller a appelé : « un sac plein d’absurdités et de
La grandeur de Joseph est qu’il a su le pressentir. Rien, au cours de sa vie, sait-il désormais, ne s’est produit par accident. Le complot pour le tuer, qu’il soit vendu comme esclave, les fausses accusations de la femme de Poutiphar, sa longue peine de prison et son espoir déçu que le majordome se souviendrait de lui et assurerait sa libération – tous ces évènements qui pouvaient le plonger dans un abîme encore plus profond de perplexité et de désespoir, se transforment rétrospectivement en étapes nécessaires du trajet qui débouche sur le fait qu’il devienne le
Joseph avait, dans une double mesure, l’un des dons indispensables à un chef de file : la capacité de persister en dépit des oppositions, de la jalousie, des fausses accusations et des revers répétés. Tout dirigeant qui se tient debout, face à tout, rencontrera une opposition. Cela peut constituer un véritable conflit d’intérêts. Un dirigeant élu pour rendre la société plus équitable remportera, avec une quasi-certitude le soutien des pauvres et l’antagonisme des riches. Un autre, qui sera élu pour réduire le fardeau des impôts fera le contraire. On
Tout leader élu pour quelque programme que ce soit, ou mieux aimé ou plus doué que d’autres, sera confronté à la jalousie, à l’envie. Ses rivaux diront : «
Ainsi en va t-il des fausses accusations qui se sont produites plus qu’à leur tour, au cours de l’histoire. Jehanne d’Arc a été accusée d’hérésie et brûlée sur-le-champ. Un quart de siècle plus tard, elle a été déclaré innocente à titre posthume par une enquête officielle du tribunal. Plus d’une vingtaine de personnes ont été conduites à la mort, à la suite des procès pour sorcellerie de Salem, en 1692-3. John Hale a reconnu : « Ainsi en était-il de l’obscurantisme de cette époque… Nous marchions dans le brouillard et ne pouvions pas discerner vers où menait notre chemin ». La plus célèbre fausse accusation des temps modernes surgit avec le procès d’Alfred Dreyfus, un officier français d’origine juive accusé d’être un espion allemand. L’affaire a secoué la France durant les années 1894 et 1906, avant que Dreyfus soit finalement acquitté.
Les revers aussi font partie intégrante de l’histoire de vie de ceux qui réussissent le mieux. Le roman initial « Harry Potter » de J.K Rowling a fait l’objet d’un rejet de la part des douze premiers éditeurs à qui elle avait envoyé son manuscrit. Un autre écrivain d’un livre pour enfants a subi 21 rejets. Le livre s’appelait « Le Seigneur des Mouches » et son auteur, William Golding, a, ensuite, obtenu le Prix Nobel de littérature.
Dans son célèbre discours inaugural à l’Université de Stanford, le regretté Steve Jobs a raconté l’histoire des trois revers de fortune qui ont façonné sa vie : se faire radier de l’université, être licencié d’Apple, l’entreprise qu’il a fondée, et recevoir, en pleine figure, le diagnostic d’un cancer pancréatique. Plutôt que de s’avoue vaincu, il a transformé ces moments pour les retourner et nourrir sa créativité.
Durant trente-deux ans, il a vécu près
“Tout cela explique la remarque ironique importante de Winston Churchill disant que : «
Cela pourrait bien être ce qui soutient les gens, à force de revers répétés, pour continuer à croire en eux-mêmes, ou est-ce de la ténacité à l’état pur, ou encore un manque d’autres alternatives. Ainsi, ce qui a maintenu Joseph debout, c’est sa confiance en la Providence d.ivine. Un plan guidait vers des fins qu’il ne pouvait que faiblement discerner, mais arrivé à un certain stade, il semble avoir réalisé qu’il était l’un des principaux personnages d’un drame bien plus vaste et que tous les mauvais coups qui lui étaient arrivés étaient nécessaires pour que le dénouement prévu puisse s’accomplir. Comme il l’a déclaré à ses frères : « Ce n’est pas vous qui m’avez vendu, mais D. ».
Cette volonté de laisser les évènements se réaliser par eux-mêmes, en concordance avec la D.ivine Providence, cette intime conviction que nous ne sommes, au mieux, que les co-auteurs de nos vies, ont permis à Joseph de survivre sans ressentiment à propos du passé ni désespoir face à l’avenir. La foi en D. lui a donné une force immense, celle-là même dont nous aurons besoin si nous voulons oser faire de grandes choses. Quelle que soit la ruse ou le mal que les autres recèlent contre nous – et plus nous réussissons, plus il y a de coups bas – si nous pouvons dire : « Vous aviez l’intention de me faire du mal, Mais D. l’a prévu pour le bien », nous survivrons, notre force est intacte, notre énergie n’est pas entamée.
Rabbin et Lord Jonathan Sacks
rabbisacks.org Article original
Adaptation : Marc Brzustowski
cette histoire de Joseph m’a toujours particulièrement impressionné. j’ai entendu un jour prêcher un homme qui disait que Joseph n’a jamais dit « pourquoi ». à la sortie de la salle je l’ai interpellé et lui ai dit: « les textes ne disent pas cela, à mon avis il a du dire 10 000 fois « pourquoi », cette réflexion l’a mis mal à l’aise. c’est bien beau de présenter ces personnages comme des surhommes, mais cela substitut Dieu à l’homme ce qui est en soit blasphématoire. ce qu’a accompli Joseph, ce que les textes relatent n’est tout simplement pas humain. je crois que sa caractéristique première est la foi et plus que cela une soumission, une confiance totale à Dieu.
mais il est vrai que une des leçon à retenir est que les voies divines sont bien souvent très loin de ce que nous aurions choisi, et incompréhensible à l’homme.