Rabbi Eliézer, les Sages et les disciples à Bné-Brak

La Haggada de Pessa‘h fait une place de choix à rabbi El‘azar ben ‘Azarya, le premier à y avoir inscrit son nom (Michna Berakhoth 1, 5).

Comme Tanna de la deuxième génération, au premier siècle de l’ère commune, il a été le contemporain de rabban Gamliel de Yavné, de rabbi Eliézèr ben Horkenos et de rabbi ‘Aqiba dont il était l’aîné (Sanhédrin 101a). Descendant d’Ezra (Berakhoth 27b), il était très riche (Chabbath 54b, Beitsa 23a).

Rabbi El‘azar ben ‘Azaryase présente dans la Aggada comme « étant comme âgé de soixante-dix ans ». Cette présentation, qui reprend mot pour mot les termes d’une Michna (Berakhoth 1, 5), reflète une situation de crise à laquelle ce Sage a été mêlé malgré lui et que raconte la Guemara(Berakhoth 27b et 28a) :

L’académie de Yavné était alors dirigée par rabban Gamliel, qui portait le titre de Nassi (« Prince »).

En cette qualité, il s’opposa à plusieurs reprises à rabbi Yehochou‘a, son aîné, et notamment sur la fixation du calendrier. Celui-ci ayant une fois fixé pour Yom kippour une autre date que celle que lui-même avait arrêtée, il l’obligea à se présenter devant lui le jour en question avec sa bourse et sa canne.

Cette sévérité, pour injuste et choquante qu’elle fût, était justifiée. Le judaïsme venait de traverser l’une des pires catastrophes de son histoire : la destruction du Temple, dont l’une des conséquences avait été la disparition de son organe législatif, le Sanhédrin.

Il fallait à tout prix préserver l’unité du peuple juif, et c’est l’objectif qui avait animé rabbi Yo‘hanan ben Zaqaï, l’un des prédécesseurs de rabban Gamliel, lorsqu’il avait sollicité et obtenu de Vespasien, qui assiégeait Jérusalem, la permission de transférer les Sages à Yavné.

Or, l’une des conditions du maintien de cette unité était la préservation d’un seul calendrier, respecté par tous les Sages et par l’ensemble de la communauté juive. C’est cette préservation qui a permis, au fil des siècles, le maintien de cette unité malgré la multiplicité des obédiences qui se sont partagé la communauté juive, et il est remarquable de constater qu’il n’existe aujourd’hui encore qu’un seul calendrier juif, respecté par tous, qu’ils soient orthodoxes, massortis ou libéraux.

Une autre raison qui peut expliquer la sévérité de rabban Gamliel peut être recherchée dans les progrès des multiples sectes de l’époque, contre lesquelles il fallait impérativement opposer un front uni.

Toujours est-il que les Sages ont décidé de destituer rabban Gamliel de ses fonctions de Nassi.

Encore fallait-il lui désigner un successeur.
On ne pouvait investir rabbi Yehochou‘a, trop impliqué dans cette affaire. On ne pouvait pas non plus désigner rabbi ‘Aqiba, le plus grand Sage de l’époque : Descendant d’une famille de convertis, ses mérites ne pouvaient se mesurer à ceux de rabban Gamliel, issu d’une lignée illustre.

On se tourna donc vers rabbi El‘azar ben ‘Azarya, compte tenu de la lignée de laquelle il descendait, ainsi que de sa richesse.

Il commença par répondre, réaction inattendue à une époque caractérisée par son machisme : « Il faut que j’aille consulter ma femme. »

Celle-ci commença, avec beaucoup de bon sens, par lui opposer plusieurs objections : Ne risquait-il pas d’être déposé à son tour comme son prédécesseur ? Et n’était-il pas trop jeune, comme en témoignait la couleur de sa barbe ?

En dépit de ces objections, rabbi El‘azar ben ‘Azarya accepta son investiture et, la nuit suivante, sa barbe devint blanche par miracle.

Voilà comment comprendre l’expression qu’il a utilisée : « Je suis comme âgé de soixante-dix ans. Je n’en ai que dix-huit, mais j’ai l’air d’en avoir beaucoup plus ».

Il n’occupa cependant pas ses fonctions très longtemps, les Sages ayant rapidement réinvesti rabban Gamliel.

Et pour que cette nomination ne soit pas considérée, aux yeux du public, comme un blâme infligé à rabbi El‘azar, il fut décidé de lui attribuer le titre de Av beith din et de lui permettre de prendre la parole le Chabbath à raison d’une fois sur quatre (ou une fois sur trois selon une autre opinion), rabban Gamliel s’exprimant trois fois sur quatre (ou une fois sur trois selon une autre opinion).

Jacques KOHN Zal

via chiourim.com

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