Quand Ben Cohen de Ben & Jerry’s dit : « J’aime Jésus-Christ »
Ben Cohen, cofondateur de la célèbre marque de crème glacée Ben & Jerry’s, a récemment fait une apparition remarquée sur le talk-show de Tucker Carlson. Connu pour ses positions progressistes, Cohen a pourtant partagé certaines convictions qui semblent s’écarter du discours habituel des cercles de gauche, notamment sur la foi chrétienne et la géopolitique américaine.
Durant l’entretien, d’abord centré sur son opposition au financement militaire américain et à l’engagement dans la guerre en Ukraine, Cohen a été invité à s’exprimer sur ses convictions spirituelles. Sa réponse a surpris plus d’un : « Je suis né juif. J’aime Jésus-Christ », a-t-il déclaré, tout en précisant ne pratiquer aucune religion en particulier. Il a exprimé une admiration sincère pour les enseignements du Christ, en particulier ceux contenus dans le Sermon sur la montagne, qu’il considère comme des principes moraux universels et puissants.
Cohen a aussi critiqué les institutions chrétiennes organisées, les accusant de ne pas toujours être fidèles aux valeurs fondamentales du message de Jésus. « Si nous suivions réellement ces paroles, nous n’agirions pas comme nous le faisons aujourd’hui », a-t-il ajouté, dans une critique implicite des politiques actuelles, notamment en matière de guerre et de justice sociale.
Les propos spirituels de Cohen prennent un relief particulier dans le contexte de son passage chez Carlson, une personnalité médiatique qui a déjà été accusée à plusieurs reprises de donner une tribune à des figures antisémites. Ce contraste interroge d’autant plus que Cohen, avec son partenaire Jerry Greenfield, a régulièrement invoqué son identité juive pour défendre certaines positions politiques, notamment le boycott des colonies israéliennes en Cisjordanie, une décision soutenue par leur entreprise en 2021.
Cette prise de position avait alors suscité un tollé parmi les associations juives plus modérées ou conservatrices. Elle avait aussi donné lieu à plusieurs batailles judiciaires. Bien que Cohen et Greenfield aient vendu Ben & Jerry’s au géant Unilever il y a plusieurs années, ils restent des figures associées à l’image militante de la marque. Cohen aurait d’ailleurs envisagé récemment un rachat de la société.
Dans une tribune publiée à l’époque dans le New York Times, les deux hommes affirmaient que leur soutien au boycott ne devait pas être perçu comme une forme d’antisémitisme, mais au contraire comme un engagement éthique inspiré des valeurs du judaïsme. Ils y affirmaient aussi leur soutien à l’existence de l’État d’Israël, tout en revendiquant le droit d’en critiquer la politique.
Lors de l’interview, Cohen n’a pas clairement affirmé s’il se considérait encore comme un partisan d’Israël. Il a néanmoins évoqué une relation problématique entre les États-Unis et l’État hébreu, allant jusqu’à suggérer que les armes américaines serviraient à alimenter ce qu’il qualifie de « génocide ». Il a mentionné la notion de « Grand Israël », sans toutefois se prononcer précisément sur le concept, se disant mal informé mais préoccupé.
Plus tard, il a élargi sa critique en attaquant le rôle des États-Unis dans le commerce international des armes. Selon lui, « être Américain aujourd’hui, c’est soutenir la plus grande armée du monde, exporter des armes massivement, et participer indirectement à des massacres, notamment à Gaza ». Des propos virulents, dans la continuité de ses précédentes déclarations : en mars dernier, il avait comparé les conséquences de la guerre à Gaza à celles de la Shoah, provoquant une vive controverse.
Carlson, dans cet entretien, n’est pas revenu sur ces accusations graves. Il s’est plutôt montré réceptif aux paroles de Cohen sur Jésus-Christ, un terrain d’entente rare entre deux figures médiatiques aux parcours très éloignés.
Par ailleurs, Cohen s’est récemment lancé dans la promotion d’un site lié à DOGE, un projet soutenu par Elon Musk visant à réduire l’empreinte de certaines institutions gouvernementales. Ce site, qu’il a relayé sur son compte X (ex-Twitter), n’a pas encore donné suite aux demandes de commentaires à son sujet.
L’apparition de Ben Cohen dans cette émission conservatrice, couplée à des propos aussi personnels que controversés, illustre une évolution singulière de son engagement public. Ancien symbole de l’activisme progressiste dans l’industrie alimentaire, Cohen semble désormais occuper un espace idéologique plus complexe, où se croisent convictions humanistes, critiques géopolitiques et réflexion spirituelle.
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Pour un Cohen il se trompe de synagogue.