Cette péricope succède à celle des chefs de tribus et des offrandes qu’ils ont présentées. Or, ici il est principalement question du candélabre d’or qui a sa place dans le Tabernacle et dont le Cohen Gadol est chargé d’allumer chaque jour les sept lumières.
Que la Lumière de la Menora nous éclaire toujours (vidéo)
D’après le recueil de midrashim qu’est le Yalkouth Shimôni, ce luminaire compte sept branches car il est directement lié aux 7 jours de la Création, cependant que pour d’autres Sages du Midrash, ce sont les 7 astres dont les noms sont rappelés chaque jour de la semaine auxquels il est ici fait allusion : la branche centrale représentant le soleil et les autres branches (dont les flammes se tournent toutes vers l’axe central) pour les six autres astres1.
C’est alors que les avis de Sages divergent selon les traités de Guemara où les différents rabbins commentent le fait qu’il y ait 7 branches sur la Menorah et dans quelle optique et veulent expliquer le fait que dans le premier temple, Shlomo HaMelekh a posé 10 menoroth (lampes) sur le candélabre (5 de chaque côté)2. La différence résiderait en ceci : en allumant les 7 branches du chandelier selon le midrash, il y avait une volonté de transcender les 7 peuples qui se trouvaient en Canaan, alors que pour Salomon, son dessein était de régner sur les 70 peuples étrangers lorsque chacune des dix bobèches des deux chandeliers de Salomon représentait 7 peuples d’où, au total 70.
Rashi et d’autres commentateurs s’interrogent sur la raison pour laquelle, cette sidra se trouve juste après celle des nessiim (Nasso) : en effet, il existe un motif très puissant pour cela : en voyant tous les sacrifices – sur lesquels nous reviendrons dans un instant – Aharon s’adressa à HaShem alors qu’il ressentait en lui-même une grande peine : « toutes les tribus T’ont présenté des sacrifices en dehors de la tribu de Lévy ». Mais HaShem rassura le grand prêtre immédiatement en lui disant : BEHAALOTEKHA ce mot qui illustre le fait que le Cohen fait « monter » les lumières, contient le mot עולה(ôla) qui désigne l’une des catégories de sacrifices lui faisant entendre que l’allumage des lumières de la menora n’est pas un acte simple, mais qu’il équivaut à un sacrifice essentiel.
De plus, HaShem renforça le sentiment intime d’Aharon qui craignait que l’Eternel tienne encore rancune au frère de Moïse pour la faute du veau d’or mais, le D des Patriarches lui fit remarquer que si le veau d’or avait surgi du feu dès qu’Aharon y avait fait fondre les bijoux offerts par le peuple, il aurait pu être tenu comme coupable mais, en réalité, il n’est rien sorti du feu d’or jusqu’à ce que Mikha ait jeté au feu le parchemin sur lequel Moïse avait écrit les mots : « Taureau3 surgis » ! et c’est alors que d’entre les flammes se dressa ce veau d’or.
HaShem consola encore le grand pontif en lui précisant qu’il était apprécié à tel point que même lorsque les Temples seraient détruits il resterait encore une tâche très importante aux cohanim : bénir le peuple de manière à faire descendre l’abondance du 6ème ciel, sur ce monde dans lequel nous évoluons.
Lorsqu’HaShem explique à Moïse comment « fabriquer » la Menora, le plus grand des prophètes de tous les temps éprouve certaines difficultés de conception. Or, il semblait que les trois enfants de Yokhéved et d’Amram devaient avoir une part chacun dans cette création : c’est pourquoi, Betsalel, petit-fils de Myriam fut chargé d’élaborer ce luminaire dont l’importance symbolique est plurielle et de très haute valeur.
Dans la sidra Behaalotekha, tout comme dans la parashat Emor, le mot menora est inclus 4 fois dans le texte de la Torah de manière à faire entendre combien la menora et l’allumage des bobèches est important et combien il convient d’y consacrer toute son attention.
Le Ohr HaHayim4 fait ressortir dans son commentaire que les bobèches de la menora faisaient partie du travail supplémentaire du cohen gadol qui devait mettre chaque jour des mèches dans les bobèches et de l’huile. Ceci étant, le texte précisant lors de l’emballage des ustensiles du Temple la menora et les bobèches, il est donc clair d’après le Ohr HaHayim que les bobèches étaient à part de la menora.
Pour sa part, le Ari5 zal, rabbin cabbaliste s’est livré à une analyse très ésotérique des secrets auxquels se rattache ce candélabre si particulier pour prouver à quel point chaque détail est pensé profondément et que rien n’est un hasard. Ainsi écrit-il :
Dans la Menora :
il y a 7 branches qui sont reliées au premier verset du houmash Bereshit qui comporte 7 mots,
il y a 11 boutons qui sont reliés au premier verset du houmash Shemot qui comporte 11 mots,
il y a 9 fleurs qui sont reliées au premier verset du houmash Vayikra qui comporte 9 mots,
la hauteur du chandelier est de 17 tefahim (et un peu plus) qui est reliée au premier verset du houmash Bamidbar qui comporte 17 mots,
et les 22 gueviim se rapportent au premier verset du houmash Devarim qui comporte 22 mots. Ainsi comprend-on aisément que la construction de la menora suit mot pour mot l’observance de la Torah tout entière.
L’un des rabbins de la Guemara du nom de Rabbi s’attache, pour sa part, à un enseignement qui met en exergue le fait que dans cette péricope behaalotekha se trouvent les « noun » renversés…. Pour Rabbi, il n’est point de houmash (pentateuque) mais, la Torah est bien partagée en 7 parties de cette manière :
Bereshit, shemot et vayikra puis bamidbar jusqu’au verset « vayehi binessoa aharon » cela fait 4 et 5 puis ces deux versets qui sont mis en exergue par la présence de ces deux parenthèses (noun renversé) est un livre en lui-même puis après « vayehi ha’am kemit’onnenim » jusqu’à la fin de Bamidbar cela fait 6 et Devarim cela fait 7 dit-il !!! Et, en conséquence la menora avec ses 7 branches est en rapport avec la Torah tout entière puisque pour Rabbi, les deux versets entre les noun renversés sont équivalents à son sens un septième de la Torah….
Les commentateurs ajoutent que la pensée du Ari zal s’attache également au fait que si la supputation de la période de l’Omer est un tout dans lequel ne doit intervenir aucune interruption pour pouvoir jouir pleinement du don de la Torah le cinquantième jour de l’Omer.
Pour la plupart des exégètes, il convient de rappeler que les 40 années dans le désert ont été si longues à cause du caractère versatile du peuple car, normalement le peuple aurait pu se retrouver sur cette terre offerte par HaShem 11 jours seulement après le don de la Torah.
Le peuple a joui d’une existence dans le désert moins pénible grâce aux grands mérites des 3 frères et sœur : grâce à Aharon, ils jouirent de la présence des 7 nuées qui les préservèrent le jour et la nuit, grâce à Myriam, ils avaient de l’eau fraîche jusqu’à la porte de leur tente, grâce à Moïse ils purent manger de la manne pendant toutes ces années.
Les 7 flammes de la Menora rappelaient les 7 nuées divines.
Caroline Elishéva REBOUH
1 A droite : Shabtaï (Saturne), Tsedek (Jupiter) et Madim (Mars) et à gauche : Noga (Vénus), Kokhav (Mercure) et Levana (la Lune).
2 Les Rois I chapitre 7.
3 Emblème de Joseph lorsqu’il fallut faire surgir des flots du Nil le sarcophage renferment les ossements de Joseph au moment de la sortie d’Egypte.
4 Rabbi Hayim ben Attar (1696 Maroc – 1743 Jérusalem)
5 Rabbi Itshak Ashkénazi Louria surnommé le Ari zal ( 1534 Jérusalem – 1572 à Safed).