« Pourrir la vie du gouvernement »: Marine Le Pen

 

Les élections régionales qui vont connaître leur dénouement ce dimanche nous donnent à voir à nouveau l’impasse dans laquelle se trouve la société française depuis environ déjà 30 ans. Il faut en effet replacer la période actuelle dans cette longue perspective pour comprendre quelque chose à l’énigme objective qui caractérise la situation. 

Quelle est-elle en effet? Depuis 30 ans le jeu politique se structure autour de la « menace » que le FN fait peser sur la République, alors que depuis 30 ans il n’accède pas au pouvoir, comme il est fort possible que cela soit le cas dimanche.

L’exception de 1986, qui avait vu Mitterrand instaurer la proportionnelle intégrale aux Législatives et permis l’élection de 35 députés FN, marque une étape importante dans ce processus. Elle jette une lumière sur les origines de la véritable hypothèque que le lepénisme fait peser sur la politique française.

Le Mitterrand du milieu des années 1980 avait opté pour une nouvelle stratégie, celle du Front antifasciste. Son but? Rameuter le centre droit autour du PS en difficulté après la fin de l' »état de grâce » et prendre la droite en tenailles en la sommant de choisir entre l’extrême droite et la République, soit le PS. La droite en est sortie laminée, mais il apparût plus tard que le PS se retrouvait aussi pris en tenailles par son extrême gauche. Le pouvoir personnel de Mitterrand était en tout cas assuré.

Mitterrand inventa ainsi la menace lepéniste à partir de rien. Le FN était en effet, alors, insignifiant. La création de SOS Racisme par l’Elysée en 1984 s’ajouta au tableau. Elle lui permit à la fois de juguler la « Marche des Beurs » de 1983, source de troubles à venir, et à l’inscrire dans la mouvance du PS. L’ennemi archétypique du FN se voyait ainsi campé dans l’arène de l’opinion (bien plus que dans l’arène partisane). Les immigrés devinrent ainsi un enjeu politique central auquel Mitterrand rajouta les Juifs, à travers l’UEJF d’alors qui forgea l’équivalence « Juifs= immigrés ». Les bons mots cycliques de Le Pen suffirent à créer un climat.

Le paysage était campé, dans lequel nous nous trouvons toujours. Entre-temps la mécanique du « pas d’amalgame avec  le FN » sapa le système des partis aux yeux des électeurs en alignant les deux  partis de gouvernement sur des postures quasi semblables, ce qui acheva de paralyser toute véritable alternance du pouvoir et qui fit, mécaniquement, du FN l’alternative non pas à d’autres partis mais à tout le système.

Comme le lepénisme s’était investi totalement dans la question de l’identité nationale à l’heure où elle se posait réellement , et notamment sous l’impact de l’unification européenne et de l’affaiblissement des Etats nations, les autres partis la négligèrent gravement, voire la combattirent, au point que le FN devînt le seul parti exprimant, à travers sa propre grille idéologique, le refoulé de toute la société française qui s’est interdit d’assumer le problème réel, le livrant ainsi à tous les dévoiements possibles.

Le politiquement correct médiatique (« pas d’amalgame avec l’islam », cette fois-ci) finit en effet par rendre impossible toute confrontation avec le réel, tout de même la seule façon de trouver des solutions aux problèmes.

Nous sommes à nouveau rattrapés par ce cercle vicieux  dont l’aboutissement risque d’être inquiétant pour des raisons évidentes, du fait de l’augmentation permanente du poids de l’électorat du FN.

En effet sa mise au ban médiatique et sa diabolisation permanente ne font que confirmer qu’il est la seule alternative à un « système » aujourd’hui sans ressort. Cette exclusion-élection (on ne parle que de lui en politique) ne peut être comprise par les supporters du FN que comme une injustice commise envers un parti que la République n’a pas interdit et qui reste dans la légalité et, de ce fait, entraîner un ressentiment profond.  Combien de temps pourra durer l’absence au parlement de représentants de 6 millions d’électeurs sans finir par provoquer des troubles extra-parlementaires, j’entends : dans la rue?

C’est ce qu’annonce Marine Le Pen en promettant de « pourrir la vie du gouvernement »

L’électeur pris dans la nasse de ce système ne trouve pas dans l’arène politique d’offre politique qui soit une nouvelle donne qui le ferait sortir d’un cercle vicieux fatal. Elle ne sera possible que si l’on a le courage de se confronter au problème réél, c’est à dire le destin de l’Etat-nation français dont l’affaissement silencieux ouvre la voie à la décomposition de la société. La présente mobilisation anti-Le Pen ne fait donc que repousser à plus tard l’échéance. Faut-il attendre après-demain? Quand il sera trop tard.

 

*Chronique sur Radio J du 11 décembre 2015.

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Jcg

De meme que les politiques en france ont leurs Juifs pour pourrir la vie des Juifs. C est diabolique ,et ca marche ,d ailleurs dans d autres pays aussi.