Valérie Fourneyron : droit au but ! La gauche au pouvoir serait multiculturaliste, forcément multiculturaliste, si j’en crois mes camarades de jeu néo-réacs ainsi que le think tank de la Gauche Populaire, décidé à prendre en compte les angoisses identitaires, réelles ou supposées, d’un peuple qui serait systématiquement oublié dans les discours du PS et du Front de Gauche.On dit parfois que l’amour n’existe pas, qu’il n’existe que des preuves d’amour. Je vais finir par croire que le multiculturalisme, c’est la même chose. Pour l’instant, le gouvernement Hollande n’en a donné aucune preuve et vient même d’aller à l’opposé de ses tropismes supposés par un geste éminemment républicain.
Un geste qui ne va pas particulièrement rendre la France populaire dans les pays musulmans voire chez certains de ses partenaires européens pour qui le multiculturalisme est une seconde nature, dont le libéralisme économique s’accommode par ailleurs très bien, chaque communauté étant à la fois considérée comme une niche marketing et un moyen bien pratique d’octroyer des droits particuliers plutôt que de l’émancipation pour tous.
En s’opposant fermement et définitivement à l’autorisation donnée par la FIFA aux joueuses de foot féminin de porter le voile, la ministre des sports, Valérie Fourneyron, a été on ne peut plus claire :
Dans la foulée, la FFF, qui est sous tutelle directe de la ministre des sports, a interdit à ses propres joueuses de porter le voile.
A travers cette question du voile, du sport et des femmes se trouve posée la question centrale de l’émancipation, et en particulier de l’émancipation des « filles des quartiers ». La position de Fourneyron est d’autant plus courageuse que la FIFA présente cette autorisation du voile pour les joueuses comme une démarche précisément émancipatrice.
De manière particulièrement retorse, le prince Ali Ben Al-Hussein de Jordanie, vice président de la FIFA et principal artisan de cette décision, a ainsi accordé un entretien au Monde dans lequel il inverse dialectiquement les données du problème en présentant le voile « comme une liberté de choix » pour les joueuses.
On aurait pu accepter, à l’extrême rigueur, une argumentation fondée sur l’idée qu’il valait mieux, dans des pays comme l’Iran ou l’Arabie Saoudite, régulièrement disqualifiés dans les compétitions internationales pour cause de voile, que des femmes jouent au football au lieu d’être absentes des terrains. Pour le coup, la discussion aurait été possible.
Mais pour le prince Ali Ben Al-Hussein, nous sommes dans le meilleur des mondes footbalistiques possibles puisque porter un foulard, comme chacun sait, « n’est ni un slogan ni un symbole religieux, c’est une pratique culturelle ».
Alors, devant une si tranquille hypocrisie qui veut faire croire que onze filles voilées courant derrière un ballon dans une compétition internationale n’est pas un « slogan », on pourrait, pour une fois, se féliciter collectivement de la décision de la ministre des sports et de la FFF.
En France, le football féminin ne confondra pas respect de la différence avec soumission à la domination masculine. Bref, il restera républicain.
Jérôme Leroy est écrivain et rédacteur en chef culture de Causeur.
Article original
Mots-clés : Ali Ben Al-Hussein de Jordanie, football féminin, Islam, multiculturalisme, Valérie Fourneyron