Omar Diaby : le djihadiste mort-vivant vote Le Pen ©

NICE, France  – Ils savent tous dans ce snack-bar des faubourgs de Nice qu’Omar Diaby s’était installé là, entre divers passages en prison et avant son départ pour la Syrie en 2013, pour devenir le recruteur Numéro Un de jihadistes en France.

Des rumeurs ont circulé en août dernier que Diaby, le fameux Superjihadiste, également connu sous le nom de Omar Omsen, le cerveau précurseur de propagande qui a commencé à propager des vidéos pro-djihadistes et anti-occidentales en 2012, bien avant l’émergence du soi-disant Etat Islamique, plus largement connu sous l’acronyme Daesh, était mort. Mais, la semaine dernière il s’est avéré que Diaby avait simulé sa propre mort – et il s’est tourné vers la Télévision française pour en débattre. 

Lorsque le Daily Beast l’a contacté par Skype, samedi 4 juin, Diaby nous a dit qu’il avait menti en disant qu’il était mort, pour pouvoir se rendre en Turquie ne faisant profil bas parce qu’il avait besoin de subir une opération médicale.

« J’avais besoin de m’éloigner durant quelques mois pour une opération et cela aurait pu faire de moi une cible facile », nous a déclaré Diaby, depuis une localité qu’il nous a décrite comme située en Syrie près de la frontière turque.

Diaby n’est pas a priori impliqué dans aucun des attentats majeurs de l’an dernier en France. Mais dans son interview rendue à France 2, il a fait l’éloge de ceux qui ont assassiné l’équipe du magazine satirique Charlie-Hebdo en janvier 2015.

« Ceux qui ont insulté le Prophète ont été exécutés »,a t-il déclaré, « j’aurais souhaité être choisi pour le faire », a t-il ajouté.

Mais est-ce que les reportages à propos de la vraie-fausse mort de Diaby jouent un rôle beaucoup plus compliqué que Diaby ne veut bien l’admettre? Est-ce possible que ce djihadiste devenu célèbre autrefois,  et surtout réputé pour produire des vidéos de recrutement de style Michael Bay [célèbre pour ses effets spéciaux :  a réalisé des films d’action et catastrophe à effets spéciaux. Ses films, qui comprennent Bad Boys, Armageddon, Pearl Harbor, Transformers et « 13 Hours« ] était en perte de vitesse et qu’il avait besoin de faire remonter sa côte, par une fausse mort et une résurrection tout ce qu’il y a de « sexy »?

Les avis et bavardages allaient bon train, samedi, au snack-bar où la plupart des clients connaissaient Diaby depuis le temps et dont beacoup avaient subi des pressions pour le rejoindre dès qu’il est parti en Syrie.

Parmi la clientèle, on trouve des salafistes, des Musulmans ordinaires et des amis d’adolescence que Diaby  recrutait. Tout en descendant des hamburger et des frites, ils discutent du rôle et du  statut actuel de Diaby en Syrie.

Certains s’interrogent sérieusement pour savoir si Diaby ne serait pas en train de collaborer avec les autorités françaises, dans le but de conclure un accord afin de revenir à Nice, où son snack-bar animé était et reste un lieu de prédilection d’un quartier populaire, à moins de 15 minutes par tramway des plages magnifiques de la Côte d’Azur.

D’autres sources à Nice disent que Diaby aurait rompu avec le Jabhat al Nusra, appartenant à Al Qaïda en Syrie. « Il s’est fait marginaliser », confie un ancien ami de Diaby au Daily Beast. « Il se retrouve comme un type sans Etat, sans cause à défendre. Il n’est plus avec al Nusra et il n’est définitvement pas non plus avec Daesh. Il a besoin d’améliorer son profil médiatique et de regagner un peu de son prestige ».

« Non » déclare Diaby, 41 ans, au Daily Beast. « Je devais suivre un parcours médical et j’avais besoin de temps sans qu’on ait le regard sur moi. C’est tout. Rien de plus que ça », dit-il.

Mis il reconnaît aussi souffrir du mal du pays.

« La socca me manque vraiment! », dit-il en faisant référence à cette crèpe de pois chiche, spécialité niçoise. « J’aimerais vraiment m’en avaler une, là maintenant! ».

Selon l’enquête diffusée la semaine dernière sur France 2, filmée par un caméraman syrien, Diaby est revenu en Syrie avec un bulletin médical de bonne santé et il règne en tant  que chef d’un petit grouper de djihadistes français – ses « potes » – qui proviennent tous du même quartier de Nice. Ils vivent à présent selon un mode de vie complètement différent, dirigé par la Chari’a dans une série de tentes blanches de l’arrière-pays syrien.

Le documentaire tourné par France 2 semble complètement scénarisé et contrôlé par Diaby. Beaucoup de ses hommes, dont la plupart ont un peu plus de vingt ans, sont mariés à des femmes qui portent leNiqab complet, couvertes de la tête aux pieds. On voit des bébés portés par ces femmes en noir à travers le campement.

Bizarrement, ces Français sont dépeints en train de passer du bon temps en plongeant joyeusement dans le grand lac, mangeant des crèmes glacées et conduisant leurs jeeps en plein air à travers l’arrière-pays. Peu d’indices de féroces combats contre les troupes d’Assad, l’une des raisons invoquées par Diaby pour prendre le chemin de la Syrie.

« Il est bien difficile de voir précisément ce que sont leurs objectifs en regardant ce documentaire », affirme Jean-Charles Brisard, Président du Centre d’Analyse du Terrorisme. « Ils disent être engagés dans des combats en Syrie, mais on ne voit rien de tout cela. Je pense que ce qui est évident c’est que Omar Diaby a besoin de reconquérir son statut précédent de combattant étranger de haute valeur ».

France 24, la chaîne internationale, a rapporté que le retour de Diaby de trépas supposé à la vie coïncide exactement avec le point de lancement d’un procès à Strasbourg de sept Français soupçonnés d’avoir voyagé en Syrie pour rejoindre l’Etat Islamique. Parmi les suspects, on trouve le frère de l’un des attaquants terroristes du 13 novembre et on pense qu’ils ont tous été recrutés par l’ancien lieutenant de Diaby, Murad Fares.

Bryan, 20 ans, a été recruté par Diaby il y a trois ans et il est interviewé dans le documentaire.  Beau gosse, brandissant une Kalachnikov, il a à peine 17 ans quand il met ses affaires dans un sac à dos et s’en va pour l’Aéroport International de Nice, où il prend un avion pour la Turquie, avant de traverser la frontière syrienne.

Bryan, comme la majorité des adolescents recrutés par Diaby, était Chrétien de naissance et converti à l’islam après avoir visionné des vidéos de propagande propagées par Equipe 19HH, le sigle attaché aux vidéos diffusées par Diaby.

« 19HH » fait référence aux 19 terroristes du 11 septembre 2001 qui ont participé à la destruction du World Trade Centre.

La mère affolée de Bryan, depuis Nice, lui parle de temps en temps par Skype, mais il y a toujours quelqu’un derrière lui, dit-elle. Elle veut qu’il rentre à la maison, mais Bryan n’est pas de cet avis.

« Sa mère ne va pas bien du tout,mais elle espère encore que Bryan va revenir un jour ou l’autre à la maison », confie Samia Maktouf, une avocate très connue à Paris, qui conseille la mère de Bryan. « Cet homme, Omar Diaby est très dangereux, il a une énorme influence sur les jeunes ».

Mais encore, Bryan semble vouloir (de lui-même) rester en Syrie, où on dit qu’il s’est marié et aurait un bébé.

« Je ne me vois pas revenir à la maison », déclare Bryan à Fr 2. « Je ne veux tout simplement pas y revenir ».

Le cousin de Bryan, un adolescent jouant au basketball, était, dans ce snack-bar, samedi. « Ma tante se sent mieux », dit-il. « Mais la plupart d’entre nous se demande vraiment si Bryan va vraiment revenir un jour (ou jamais) ».

Pour les résidents locaux de ce quartier de St Roch, Diaby, né au Sénégal, qui a passé ses années de formation de ce que les Américains appelleraient un « projet de logement » (une cité) – au nom particulièrement à propos de « Bon Voyage » – avait une réputation de « voyou » typique parmi les policiers et avocats de la défense locaux.

« C’était juste un gosse avec de nombreuses difficultés », a affirmé Richard-Dixon Pyné, son ancien avocat à Nice, vendredi, au Daily Beast, dans ses bureaux en centre-ville. « Ce n’était pas un mauvais gosse. Il s’asseyait là comme vous. Poli, tranquille, rien qui sortait de l’ordinaire, sinon un casier judiciaire à rallonge ». 

Ceux de sa bande le voyaient différemment.

« Omar, c’étaitune légende, ici », proclame Ahmed, ce samedi, en déversant de la sauce algérienne sur son hamburger. « Tout le monde et surtout les plus jeunes le regardait avec admiration. C’était un grand mec, très charismatique. Tout le monde le connaissait. Il avait beaucoup de pouvoir parmi les gens d’ici ».

Les vidéos de Diaby ont obtenu des centaines de milliers de vues et on pense que c’est une des raisons pour lesquelles autant de Français ont quitté la France pour aller se battre en Irak et en Syrie.

Mais cela a quand même été une surprise et non des moindres que Diaby déclare sa flamme et otut son soutien, sur Fr 2, à Marine Le Pen, femme politique de la droite anti-immigration.

« Si les Français ne veulent pas la guerre, ils doivent voter pour Marine Le Pen », affirme Diaby, en faisant référence à l’engagement français dans les opérations militaires anti-djihadistes en Syrie et en Afrique. « Cette femme a demandé aux troupes françaises de rentrer à la maison parce que cette guerre n’est pas leurs affaires. Eh bien, elle a absolument raison ».

Omar Diaby, clairement, est un homme plein de surprises et de ressources.

06.06.16 7:03 AM ET

via FranceTv/Youtube