Le Discours de l’année

L’équipe Obama a réussi à transformer l’allocution de Netanyahu en évènement mondial. 

Les allocutions de dirigeants étrangers, lors de rassemblements bipartisans du Congrès sont des évènements qui relèvent de la routine, et souvent, ils font partie du lot de ceux qui seront parmi les plus vite oubliés. C’est ce qui aurait dû se produire, avec le discours de Premier Ministre israélien Binyamin Netanyahu, devant le Congrès, mardi prochain. Mais l’on doit reconnaître aux sorciers de l’Administration Obama le don de l’avoir transformé en évènement diplomatique mondial de l’année. 

Israeli Prime Minister Benjamin Netanyahu ENLARGE
Premier Ministre Benjamin Netanyahu. PHOTO: ASSOCIATED PRESS
 

 

Cette semaine, à nouveau, l’Administration n’a pas manqué de déclencher une cinglante attaque personnelle et politique qui est sans précédent, à l’encontre d’un proche allié. La Conseillère à la Sécurité Nationale,  Susan Rice, est même allée jusqu’à déclarer que ce discours est purement et simplement « destructeur du tissu même de la relation » entre Washington et Jérusalem. 

Dès le moment où le porte-parole du Congrès John Boehner a invité M. Netanyahu, l’Administration Obama a fait clairement comprendre son désagrément, en commençant par accuser le gouvernement israélien d’avoir violé toutes les conventions protocolaires et en comptant sur les Représentants démocrates au Congrès pour le boycotter

C’est ainsi que certains ont prétendu s’élever contre un simple discours et cela vaut la peine de se demander pourquoi l’Administration en est venue à de telles extrémités pour l’étouffer. On s’attend à ce que M. Netanyahu soutienne le dossier contre l’accord imminent du Président Obama sur le nucléaire iranien et, peut-être que l’Administration sait à quel point elle est vulnérable à une telle critique. 

En janvier, la Commission des Banques du Sénat a voté à 18 contre 4 en faveur du projet de loi bipartisan Kirk-Menendez, visant à imposer de nouvelles sanctions contre l’Iran si les négociations échouent et d’autres Sénateurs travaillent sur un autre texte bipartisan pour s’assurer que le Sénat soit en mesure de voter un accord final, comme cela a été le cas pour d’autres pactes de contrôle des armes nucléaires. 

La tactique de l’Administration semble être de rallier certains de ces Démocrates, en accusant M. Netanyahu d’injecter un parti-pris et de faire de l’ingérence dans la politique américaine. Mais le Premier Ministre n’a rien fait d’autre que d’accepter une invitation d’une branche égale du pouvoir politique, ce qui fait intégralement partie de son rôle en politique étrangère. S’il y a là un quelconque parti-pris, c’est de la part d’un Président dont la politique iranienne n’obtient plus l’aval de beaucoup de membres de son propre parti. 

L’Administration semble aussi penser que de fabriquer de toute pièce une crise dans les relations pourrrait provoquer la défaite de M. Netanyahu, lors des élections du mois prochain. Une crise identique entre le Premier Ministre d’alors, Yitzhak Shamir et l’Administration de George H.W Bush avait bien contribué à la défaite de Shamir en 1992. 

Cette manoeuvre pourrait bien marcher, une fois encore, puisque les Israéliens sont naturellement  inquiets de la brouille constante avec leur allié le plus important. Mais d’autre part, les Israéliens sont encore plus inquiets de la menace que représente un Iran nucléaire et un récent sondage du Times of Israel a démontré que 72% des Israéliens « ne croient pas » M. Obama en mesure d’assurer que l’Iran n’acquerra pas la bombe nucléaire. Environ 59% des Israéliens ont un avis défavorable s’agissant du Président américain. 

Cela suggère que les tentatives de M. Obama d’interférer dans la politique israélienne en personnifiant ses divergences avec le Premier Ministre peuvent avoir un effet-boomerang. M. Netanyahu n’a rien eu à faire pour que l’intérêt consacré à ce discours, de la part de l’opinion publique, monte en puissance, et peu importe le nombre exact de Démocrates qui le boycotteront [s’il est entendu par le peuple américain]. De récents sondages démontrent que les Américains sont, à une majorité écrasante, favorables au fait d’accorder au dirigeant israélien une écoute équitable au Congrès. 

En supposant que la valeur des arguments et de la rhétorique employée par M. Netanyahu soit à la hauteur de l’évènement, M. Obama aurait tout gagné en lui accordant, ainsi qu’à la cause qu’il défend, ses faveurs politiques. 

wsj.com

Adaptation : Marc Brzustowski.

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

S’abonner
Notification pour
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires