Assad est-il en train de négocier sa demande de prêt?

 

L’Iran dépense des milliards de dollars par an dans son soutien au dictateur Bachar al Assad, selon l’envoyé spécial de l’ONU en Syrie, ce que confirment d’autres experts extérieurs. Ces estimations  sont de très loin supérieures à ce que l’Administration Obama, très occupée à négocier un accord nucléaire avec le régime de Téhéran, a implicitement accordé à l’Iran de dépenser dans sa politique de contribution  à la stabilisation du Moyen-Orient. 

Lundi, une porte-parole de l’envoyé spécial de l’ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, m’a confié que l’envoyé spécial estime que l’Iran dépense 6 milliards de dollars par an pour le gouvernement d’Assad. D’autres experts avec lesquels je me suis entretenu élève ce chiffre à beaucoup plus haut. Nadim Shehadi, le directeur du Centre Fares des Etudes sur l’Est de la Méditerranée à l’Université de Tufts, m’a dit que ses recherches démontrent que l’Iran a dépensé entre 14 à 15 milliards de $ en aide militaire et économique, pour le régime de Damas, en 2012 et 2013, même si les banques et réseaux commerciaux d’Iran ont été mis à l’écart du système financier international (officiel). 

De tels tableaux de financement minent totalement les prétentions d’Obama et de ses lieutenants les plus hauts placés, suggérant que l’Iran ne dépense que des sommes dérisoires, afin de défier les intérêts américains et ceux de ses alliés dans la région. Alors que l’Administration n’a jamais dévoilé ses propres estimations pointant les dépenses del’Iran dans son appui à assad et à d’autres de ses complices au Moyen-Orient, Obama en personne a fait en sorte de minorer la dimension financière de ce soutien au régime. 

« Le grand danger auquel la région est confrontée, de la part de l’Iran n’est pas dû au fait que ce pays aurait autant d’argent. Son budget – son budget militaire n’est que de 15 milliards de $, qu’il faut comparer aux 150 milliards de $ dont disposent les Etats du Golfe », a t-il proclamé, lors d’une interview de la semaine dernière, avec la chaîne 2 israélienne. 

Mais les experts le perçoivent d’un tout autre oeil. Le Christian Science Monitor du mois dernier a publié les propos de Mistura à l’intention d’un Think Tank à Washington,disant que l’Iran dépense l’équivalent de trois fois son budget militaire officiel – soit 35 milliards de $ par an – dans le soutien à Assad en Syrie. Lorsque je l’ai interrogée à propos du précédent évènement, Jessy Chahine, la porte-parole de Mistura, m’a renvoyé un message e-mail disant : « L’envoyé Spécial estime que l’Iran dépense 6 milliards de $ par an dans le soutien au régime Assad en Syrie. Il s’agit bien de 6 milliards de $, non pas de 35 milliards de $ ». 

En tout cas, ce tableau est fort significatif. De nombreux membres du Congrès et de proches alliés régionaux ont soulevé leurs inquiétudes que l’Iran puisse bénéficier d’une manne supplémentaire de trésorerie, commme l’une des conditions de la signature de tout accord sur le nucléaire, cet été. Obama en personne a déclaré qu’il y a au moins 150 milliards de $ en valeur monétaire iranienne, qui sont détenus dans des banques à l’étranger, dans le cadre des sanctions paralysantes qui lui sont imposées. Si l’Iran dépense des milliards des ressources limitées dont il dispose actuellement, pour soutenir ses supplétifs au Moyen-Oriennt, il en découlerait qu’il en dépensera encore bien plus dès que les sanctions seront allégées. 

L’Administration Obama n’est pas d’accord avec ces prévisions et les nie avec force. Elle prétend que la somme que l’Iran dépense à répandre le mal dans la région est si faible que tout assouplissement des sanctions, à l’avenir, ne ferait strictement aucune différence dans son comportement. S’exprimant, cetter semaine, lors d’une conférence parrainée par le Jérusalem Post, le Secrétaire du Trésor Jack Lew affirmé que même si l’économie iranienne avait souffert des sanctions, au cours de ces dernières années, ce pays est resté en mesure de maintenir son « faible » niveau d’assistance aux groupes terroristes et à d’autres supplétifs. »La malheureuse vérité demeure que le coût de son soutien reste suffisamment modique pour que nous devions rester vigilants avec ou sans accord nucléaire, dans l’emploi de nos autres outils, afin de le dissuader de financer le terrorisme et la déstabilisation régionale », dit-il. 

Shehadi et d’autres experts reconnaissent que leurs tableaux n’étaient évalués que parce que le régime de Téhéran ne publie pas ses budgets concernant les Corps des Gardiens de la Révolution iranienne, ni les subventions complètes qu’il fournit à ses alliés. Quoi qu’il en soit, dit Shehadi, le soutien iranien à la Syrie, à ce jour, est substantiel, particulièrement lorsqu’il est facturé sur la ligne de crédit, les subventions pétrolières et d’autres formes d’assistance économique que fournit l’Iran au régime syrien. 

Steven Heydemann, qui était Président de Recherche Appliquée sur les conflits à l’Institut américain Pour La Paix, jusqu’au mois dernier, m’a confié, plus tôt, au début de l’année, que la valeur des transferts iraniens de pétrole, ses lignes de crédit, les coûts en personnel militaire et les subventions pour l’achat d’armes à destination du régime syrien, se situe probablement entre 3.5 et 4 milliards de $ par an. Il m’a déclaré que cela ne prenait même pas en compte les sommes dépensées par l’Iran au profit du Hezbollah et d’autres milices qui combattent les opposants d’Assad. Heydamann dit qu’il a estimé ce soutien total de l’Iran à Assad à un pactole situé entre 15 à 20 milliards de $ par an. 

Un rapport du Pentagone diffusé la semaine dernière était tout-à-fait clair sur ce que l’Iran espère réaliser par ces dépenses : « L’Iran n’a pas substantiellement changé de stratégie militaire et de sécurité nationale, au cours de l’année passée. Au contraire, Téhéran n’a fait qu’ajuster son approche pour concrétiser ses objectifs persistants, en augmentant sa sensibilité diplomatique et en modulant sa rhétorique belliqueuse ». Ce rapport dit que la stratégie de l’Iran est destinée à préserver son système islamiste de gouvernance, à le protéger des menaces extérieures, à atteindre la prospérité économique, tout en « instaurant définitivement l’Iran en tant que puissance régionale dominante ». 

Si l’Iran finit par accepter un accord concernant son programme nucléaire, il bénéficiera d’un afflux de liquidités lui permettant de poursuivre et d’accroître son agenda régional. Shehadi que c’est ce qui est conforme à un modèle pour l’instauration et le renforcement des dictatures au Moyen-Orient : elles préoccupent la communauté internationale à cause des tendances à la prolifération d’armements, tout en poursuivant à commettre leurs atrocités en coulisses. 

« Au début des années 1990, Saddam Hussein massacrait son peuple et nous étions inquiets pour les inspecteurs en armements », affirme Shehadi. « Bachar al Assad en a fait exactement autant. Il nous a occupé l’esprit à cause de ses armes chimiques, alors que, pendant ce temps, il massacrait « son » peuple. L’Iran nous occupe, pour que nous obtenions à tout prix un accord sur le nucléaire, alors que nous lui offrons carte blanche en Syrie et dans la région, pour massacrer et attenter à qui bon lui semble ». 

 

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Eli Lake at elake1@bloomberg.net

bloombergview.com

Adaptation : Marc Brzustowski

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