Une clause de révision?

Les nouvelles sur les pourparlers nucléaires avec l’Iran étaient déjà troublantes. On a concédé à l’Iran le « droit à l’enrichissement ». Il aura la permission de conserver et de faire tourner des milliers de centrifugeuses. Il pourra poursuivre la construction du réacteur au plutonium d’Arak. Ainsi, alors que l’Iran faisait déjà fortement obstruction aux inspecteurs de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA), jeudi dernier l’AIEA rapportait ses préoccupations « au sujet de l’existence possible en Iran du développement dissimulé d’une charge nucléaire pour un missile ».

Mince alors. Puis pire encore : Des nouvelles fuitaient lundi sur les éléments d’une « clause de révision ». Le président Obama avait accepté l’exigence iranienne que toute restriction sur son programme soit limitée dans le temps. Après quoi les mollahs pourront mettre en marche leur programme nucléaire à volonté et produire autant d’uranium enrichi qu’ils le veulent.

Sanctions levées. Restrictions abandonnées. Développement nucléaire légitimé. L’Iran reviendrait dans la communauté internationale, comme Obama l’a suggéré dans un entretien en décembre, « en tant que puissance régionale très brillante. « Quelques années – probablement 10 environ – de bon comportement et l’Iran sera libre de faire ce que bon lui semble.

Ainsi l’accord fournira une voie qui ne peut qu’aboutir à l’acquisition de la bombe iranienne. En effet, une voie florissante, avec la reprise du commerce, l’extraction du pétrole et l’investissement extérieur se déverseront dans une économie restaurée.

Pendant ce temps, le programme de missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) n’est sujet à aucune restriction. Il ne fait même pas partie de ces négociations.

Pourquoi l’Iran les construit-il ? Vous ne fabriquez pas des ICBM pour livrer des bâtons de dynamite. Leur seul objectif est le transport de têtes nucléaires. L’Iran n’a pas davantage besoin d’ICBM pour frapper Riad ou Tel Aviv. Les missiles intercontinentaux sont destinés à atteindre, disons, d’autres continents. L’Amérique du Nord par exemple.

Un tel accord signifie aussi la fin de la non prolifération. Quand un Etat voyou défie le monde, poursuit l’enrichissement illégal puis obtient la bénédiction du monde pour un programme final d’enrichissement sans restriction, le Traité de Non Prolifération Nucléaire est mort. Et l’hyper prolifération régionale devient inévitable alors que l’Egypte, le Turquie, l’Arabie saoudite et d’autres cherchent un abri en poursuivant eux-mêmes le nucléaire.

Obama n’était-il pas le grand défenseur de la cause d’un monde débarrassé du nucléaire ? Dans les mois qui ont suivi sa prestation de serment, il est allé à Prague pour le déclarer. Il a ensuite dirigé un Sommet sur la Sécurité Nucléaire avec 50 partis représentés, l’un de ceux dont les réalisations proclamées a conduit le Canada à abandonner l’uranium enrichi.  

Ayant désarmé la menace canadienne, Obama s’est tourné vers l’Iran. L’accord aujourd’hui en jeu avec les ayatollahs confèrera une légitimité à la nucléarisation du plus voyou des régimes voyous : radicalement anti-américain, profondément jihadiste, pourvoyeur de terrorisme de l’Argentine à la Bulgarie, marionnettiste du régime syrien qui se spécialise dans l’envoi de barils de poudre sur des civils. En fait le régime iranien, cette semaine seulement, en annexe de ces pourparlers nucléaires, a simulé une attaque spectaculaire sur une réplique de porte-avion américain près du détroit d’Ormuz.

Eh bien disent les apologistes du gouvernement, quelle est votre alternative ? Voulez-vous la guerre ?

C’est la manoeuvre habituelle, le faux choix subtil d’Obama : soit la compromission, soit la guerre.

Ce n’est pas le cas. C’est vrai, il n’y a pas de bon choix, mais la perspective de l’arrangement d’Obama est le pire possible. Non seulement l’Iran obtient la voie libre vers la bombe mais aussi la levée des sanctions, le retrait de toute pression et la légitimité internationale.

Il y a un troisième choix. Si vous n’arrêtez pas le programme de l’Iran, ne cassez pas la baraque. Maintenez la pression, maintenez les sanctions. Plutôt même, augmentez les. Après tout, les sanctions précédentes ont mis l’Iran à genoux et à la table de négociations en premier lieu. Et cela avant l’effondrement des prix du pétrole, qui aujourd’hui décupleraient l’effet économique de sanctions plus élevées.

C’est justement ce que propose le Congrès. Associé à un pétrole peu cher, cela pourrait autant déstabiliser l’économie iranienne que menacer le régime clérical. C’est le début. Puis offrez de renouveler des négociations sur un allègement des sanctions mais depuis un point de départ très différent – pas d’enrichissement. Ou si préférez, quelques centrifugeuses pour sauver la face.

Ainsi, pas de révision.

Voilà la carotte. Et comme bâton faites tranquillement savoir que les Etats-Unis ne mettront aucun obstacle à une nation menacée qui prend les choses entre ses propres mains. Nous laissons la menace locale aux puissances régionales, disons les bombardiers d’Israël survolant l’Arabie saoudite.

Voyez où nous avons commencé : six résolutions du Conseil de Sécurité de l’ONU exigeant la fin de l’enrichissement iranien. Voyez ce que nous offrons maintenant : un arrangement intérimaire s’achevant par une clause de révision qui autorise aux ayatollahs un solide programme nucléaire, avec une force industrielle, sanctionné au plan international.

Un tel arrangement rend la normalisation avec Cuba et les cessez-le-feu ukrainiens positivement brillants. Nous sommes au sommet d’une capitulation épique. L’Histoire ne sera pas tendre.

Par Charles Krauthammer

Washington Post, Opinion writer ; 26 Fevrier 2015

 washingtonpost.com

Adaptation française de Sentinelle 5775 ©

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