La Russie et les Etats-Unis courtisent l’Arabie Saoudite pour qu’elle contribue à sauver Assad – même si cela doit mettre en danger la Jordanie et Israël, dans le Sud de la Syrie. 

Continuant à bâtir sur l’accord nucléaire signé à Vienne le mois dernier, l’Administration Obama est en communion étroite avec Moscou et Téhéran au sujet des avancées régionales visant à sauver le régime Assad, comme clé de leur prochaine politique régionale, comprenant un front uni contre l’Etat Islamique. L’Arabie Saoudite et ses partenaires du Golfe sont courtisés avec assiduité, afin de se conformer à la nouvelle ligne conçue avec cet objectif. L’élément actif qui tente de les réunir est le Ministre des affaires étrangères d’Oman, Khalid bin Mohamed Al-Attiyah, le médiateur secret qui est parvenu à mettre ensemble autour d’une table de négociation l’Iran et les Etats-Unis, pour les conduire à l’accord nucléaire.

Vendredi 7 août, Obama a lancé sa première allusion à cette nouvelle évolution : « Cette fenêtre (d’opportunité) a ouvert une brèche pour que nous trouvions une solution politique en Syrie, en partie parce que la Russie et l’Iran, je pense, reconnaissent que les grandes tendances ne sont pas favorables à Assad », a t-il avancé. « Aucun de ces deux patrons n’est particulièrement sentimental ; ils ne semblent pas préoccupés par le désastre humanitaire qui a été provoqué par Assad, dans ce conflit qui se poursuit depuis plusieurs années,mais ils sont inquiets à cause de l’effondrement potentiel de l’état syrien. Et cela veut dire, je pense, que la perspective de discussions plus sérieuses que celles que nous avons menées dans le passé ». « 

Le Président américain a ensuite affirmé plus fermement, lors d’une interview sur CNN, le dimanche 9 août : Y a t-il une possibilité qu’après avoir commencé à entreprendre des négociations autour de ce problème sensible [ l’accord nucléaire avec l’Iran], on puisse commencer à avoir des discussions plus larges concernant la Syrie, par exemple et la volonté chez toutes les parties impliquées de tenter de parvenir à une transition politique qui veille à l’intégrité territoriale du pays et qui arrête d’alimenter encore plus la croissance de Daesh et d’autres organisations terroristes? Je pense que c’est possible », a déclaré Obama. « Mais je ne pense pas que cela va se produire immédiatement ».

L’Administration et ses partenaires de prospection sont unis par la volonté de détruire Daesh – dans son bastion syrien, pour commencer – mais ils restent divisés sur l’essentiel pour le reste. Et, de ce fait, le processus progresse lentement, par étapes prudentes.

Ils se focalisent d’abord sur la Syrie, ce champ de bataille sanglant qui a fait en moins de cinq ans au moins 300.000 morts et plus de 10 millions de sans-abri.

Le plan sur lequel le groupe a commencé de réfléchir, au cours des dix derniers jours, consiste en un troc aussi simple qu’il est devenu impitoyable : l’Arabie Saoudite et les Emirats Arabes Unis devraient ralentir le rythme de leur assistance envers les groupes rebelles syriens, contre lesquels l’armée du Président Bachar al Assad et ses alliés suspendraient leurs assauts , l’Iran pour sa part, devrait commencer à retirer son soutien aux insurgés houtis du Yémen.

Cette trève informelle en Syrie serait l’étape indispensable avant que le régime Assad et les groupes rebelles commencent à négocier la mise en place d’un nouveau gouvernement faisant une place à l’opposition. Les Islamistes de Daesh et du Front al Nusra d’Al Qaïda ne seraient pas invités.

Au Yémen, Téhéran interromprait l’afflux d’armes et de renseignements qui a permis aux insurgés houtis de faire face aux forces conjointes d’Arabie Saoudite, des Emirats arabes et d’Egypte. Le Président pro-occidental Abd Rabo Mansour Hadi serait restauré dans son Palais de Sana’a et inviterait le chef des insurgés, Abdu Malik Al-Houthi à discuter des conditions de son partenariat au sein d’un nouveau gouvernement.

Cet accord équivaut à une garantie américano-russe conjointe de survie pour Assad, en l’échange d’un pacte entre Téhéran et Riyad de restauration d’Hadi à Sana’a.

Ces arrangements ont été débattus lors d’allers et retours, certains sont restés à demi-secrets, entre les acteurs dominants durant l’essentiel du mois de juillet. La visite à Riyad du chef des renseignements syriens, le Général-Major Ali Mamlouk a été orchestrée par Moscou comme le gage d’une avancée importante.

Ce plan devait être exposé publiquement dans ses grandes largeurs et scellé à Doha, au Qatar, le mardi 3 août, lors d’une conférence à laquelle assistaient le Secrétaire d’Etat américain John Kerry, le Ministre russe des affaires étrangères et le Ministre saoudien des affaires étrangères,  Adel Al-Jubeir et d’autres grands diplomates du Golfe.

Le Ministre iranien des affaires étrangères Javad Zarif n’était pas présent. Mais il a mis un bon coup de rame favorisant ce processus en appelant Muscat, dans l’Emirat d’Oman, la veille de la conférence et, ensuite, le vendredi 7 août. Assad a aussi mis la main à la pâte en envoyant son ministre des affaires étrangères Walid Moallem à Téhéran et Muscat la semaine dernière.

Mais, par la suite, à Doha, alors que toute l’affaire était sur le point d’être dévoilée, le Ministre saoudien des affaires étrangères a fait marche arrière l’a plombée, en émettant deux conditions : a) Riyad ne tolérerait pas que Bachar al Assad reste au pouvoir et b) L’Arabie Saoudite ne conclurait aucun traité avec aucun représentant du régime Assad.

Cela met un sérieux bâton dans les roues de cette initiative et saborde certains des plans secondaires censés en découler.

Mais, pendant ce temps-là, il se passait pas mal de choses sur les théâtres de guerre yéménites et syriens :

1. Les forces blindées saoudiennes et émiraties ont débarqué à Aden et se sont rapprochées de la capitale yéménite, Sana’a. Les rebelles houtis, entraînés et armés par l’Iran, ont été contraints de battre en retraite, sans la moindre négociation quant à leur rôle futur au sein d’un quelconque gouvernement.

2. Les chefs rebelles syriens, sentant la trahison approcher, ont envoyés une délégation secrète à Téhéran pour discuter les termes de négociations ouvertes avec Assad. Eux également sont restés dans l’ignorance des accords en jeu entre Washington, Moscou, Téhéran et Riyad quant à leur propre avenir.

Samedi 8 août, les Russes, encouragés par les Américains, cherchant à faire rentrer Riyad dans la bergerie, ont invité le Ministre des affaires étrangères Al-Jubeir à se rendre en visite à Moscou, mardi 11 août, pour discuter du conflit syrien et de la guerre contre l’Etat Islamique.

Refusant l’idée que cette nouvelle initiative se soit effondrée à Doha, Moscou a présenté cette visite comme le moment de poursuivre ce dialogue engagé sur les questions soulevées lors de cette rencontre.

 

Les sources des renseignements militaires de Debkafile remarquent que ni Israël, ni la Jordanie n’ont été cooptés pour cette initiative des grandes puissances, comme s’ils n’étaient pas directement concernés. Cependant, tous deux ont gros à jouer, suivant les prochaines décisions saoudiennes. Si Riyad se laisse gagner par les flatteries russo-américaines et revient sur sa décision de boycotter Assad, les efforts saoudo-israélo-jordaniens, dans le soutien apporté au contrôle des rebelles syriens sur le sud de la Syrie, tomberont en pièces détachées. Et cela provoquera l’ouverture des deux pays à de nouvelles menaces sur leurs frontières nord.

DEBKAfile Reportage Spécial 9 août 2015, 9:47 AM (IDT)

debka.com

Adaptation : Marc Brzustowski.

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