Un montage de citations démontre la folie nazie.  Avec «Transcription», Heimrad Bäcker, un repenti des jeunesses hitlériennes devenu éditeur, livre un document édifiant.

 

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Victor Klemperer a analysé la langue du IIIe Reich. Heimrad Bäcker la montre à l’œuvre. Transcription est composé uniquement de citations, qui sont en lien avec la «solution finale». Elles sont de tous ordres, souvent très brèves.

Ce sont des fragments de règlements, d’ordres ou de protocoles, qui manifestent le caractère systématique de l’organisation nazie et sa folie: modalités du port de l’étoile jaune, détails techniques concernant les méthodes d’extermination, critères d’appartenance à la race juive, etc.

Les listes sont très nombreuses: patronymes, noms de lieux, nombre de morts par heure, par jour, par semaine, chiffres dépourvus de signification immédiate mais dont on devine qu’ils cachent des réalités glaçantes. Les énoncés sont parfois tronqués, laissés en suspens, comme au bord de l’abîme.

Témoignages factuels, brefs, hors contexte: «D’ici un an, nous en aurons certainement fini avec le déplacement de la population juive; dès lors, plus aucun ne se déplacera.» Certains sont extraits de procès ultérieurs: «Après quoi il fallait ratisser la place à l’intérieur du camp II afin de lui rendre son aspect anodin pour le groupe suivant.» Et là au milieu, une ou deux petites phrases en yiddish comme celle-ci: «Mir viln nischt shtarbn!»: «Nous ne voulons pas mourir!»

L’horreur dans sa nudité

Heimrad Bäcker est né en Autriche en 1925, dans un milieu pauvre. Il a fait partie des jeunesses hitlériennes, puis il a adhéré au parti nazi en 1943. Recruté par les Américains pour travailler dans le camp de Mauthausen, il a pris conscience de «l’inimaginable». Devenu éditeur, il a surtout publié de la poésie concrète et visuelle – tout lyrisme étant devenu caduc.

Transcription ne comporte aucun mot de lui, pourtant, dans sa composition, dans ses non-dits, dans la manière dont les documents se répondent ou sont disposés sur les pages, c’est une œuvre, un immense poème, qui laisse surgir l’horreur dans sa nudité, une fois dépouillée de ses habits rhétoriques. Pour Bäcker, effectuer ce travail était «une nécessité éthique» après «son aveuglement juvénile». C’est un document d’une force exceptionnelle.

Source :www.letemps.ch


« C’est donc vrai que nous allons à la mort ? » C’est par cette question cruciale que débute transcription, ouvrage majeur de l’écrivain autrichien Heimrad Bäcker (1925-2003), publié en deux volumes en langue allemande (en 1986 puis 1997) et enfin traduit en français par Eva Antonnikov, par ailleurs traductrice du poète américain Charles Reznikoff (1894-1976).

La mention de ce dernier est ici tout sauf fortuite, puisqu’on est en droit d’inscrire le travail de Bäcker dans la lignée de l’objectivisme poétique et du traitement du matériau génocidaire, lesquels ont abouti, chez Reznikoff, à ses deux livres majeurs que sont Témoignage (1965 ; POL, 2012) et Holocauste (1975 ; Unes, 2017).

Si la question du rapport entre langue et génocide s’est posée très tôt à certains écrivains, en particulier aux poètes désireux de réagir à la fameuse formule d’Adorno selon laquelle « Ecrire un poème après Auschwitz est barbare », c’est également afin d’affronter la perversion euphémistique à laquelle se sont livrés les nazis sur leur propre langue, travail explicité et dénoncé dès 1947 par Victor Klemperer dans son livre LTI, la langue du IIIe Reich. Carnet d’un philologue ¬(Albin Michel, 1996). Ces jalons posés, tentons d’aborder l’entreprise radicale qu’est transcription.

Né en 1925, Heimrad Bäcker fait partie de ces Autrichiens dont la famille a vu son niveau de vie grandement s’améliorer à partir de l’Anschluss. Très jeune, il est incorporé dans les Jeunesses hitlériennes, au service de la propagande, puis rallie le parti nazi à 19 ans. A la fin de la guerre, les Américains le réquisitionnent lors de la libération du camp de Mauthausen, situé non loin de Linz, où réside Bäcker. Dès le début des années 1950,…

le 23 Dec 2017

Source :www.lemonde.fr

 

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Macronyme-Crimeur-Contre-L'Humanité

Victor Klemperer repenti ? LOL
Si les nazis avaient gagné la guerre, ce même personnage aurait-il fait la même chose que maintenant ?
Elle a bon dos la repentance.