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Tikrit : l’offensive irakienne en panne subit des pertes massives

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L’opération des forces irako-iraniennes, visant à reprendre Tikrit, semble paralysée, alors que les troupes subissent de lourdes pertes, face aux Jihadistes de l’Etat Islamique, soulevant ainsi des inquiétudes quant à l’état de préparation de ces combattants pro-gouvernementaux, tant de l’armée que des milices chiites recrutées par l’Iran et son commmandant en chef Qassem Souleimani, pour mener des offensives plus importantes, comme contre la ville de Mossoul, capitale de Daesh. 

Après deux jours d’activité ralentie sur le champ de bataille, le Ministre de l’Intérieur irakien, Mohammed al-Ghabban, a confirmé lundi, que l’offensive était « tremporairement stoppée ». L’afflux constant de cercueils arrivant dans la ville sainte chiite de Najaf suggère une bonne raison à cette pause ; les préposés aux cimetières attestent que plus de 60 morts durant les combats arrivent chaque jour. 

Depuis la semaine dernière, les forces irako-chiites ont encerclé les jihadistes dans Tikrit, prétendant avoir pris le contrôle de l’essentiel de l’ancien bastion de l’Etat Islamique. Mais cette opération a eu un coût élevé, des soldats confiant que le combat s’est avéré plus âpre que prévu. Alors que l’élan s’est ralenti, certains responsables irakiens ont commencé à appeler publiquement le soutien aérien américain à l’aide. 

Les responsables expriment encore leur assurance dans la possibilité de reprendre la ville, mais le bégaiement de cette offensive  n’est pas de bon augure pour des batailles plus complexes comme contre la ville de Mossoul, ou les zones contrôlées par les Jihadistes, dans la province d’Anbar, censées commencer dans les mois à venir. 

« C’est un combat féroce, pbien plus dur que nous ne le pensions », déclare Taher Sabah, un homme de 25 ans membre de la milice de l’organisation chiite  Badr (de Moqtada Sadr), arrivé à Najaf dimanche, pour enterrer son père, suite à sa mort violente près de Tikrit, la nuit précédente. 

 

« Cela prend tellement de temps », dit-il, « Mais nous continuons ». 

Le gouvernement irakien ne fournit pas de statistiques des pertes sur le champ de bataille. Mais, le cimetière de Wadi al-Salaam, le plus vaste au monde, est le dernier lieu de repos de la majorité des chi’ites d’Irak et, étant donné la conception essentiellement chiite des forces de sécurité du pays, il devient celui d’un très grand nombre de pertes humaines pro-gouvernementales, dans cette guerre. 

Alors que le jour tombait, dimanche soir sur le sanctuaire de l’Imam Ali à Najaf, où les morts sont emmenés avant d’être enterrés, 4 cercueils – entourés de drapeaux qui signalent qu’ils contiennent les corps de combattants qui ont fait l’ultime sacrifice pour leur pays – sont arrivés dans les dernières 20 minutes. 

 

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Le père de Sabah a été tué en même temps que deux de ses proches combattants,alors qu’ils tentaient de ratisser un immeuble de la ville d’Alam près de Tikrit, sans réaliser que 17 Jihadistes étaient retranchés à l’intérieur, selon sa famille. 

Portant le treillis militaire et un drapeau enroulé autour de ses épaules, Sabbah a combattu avec ses proches pour porter le cercueil à travers le dédale de tombes du cimetière. Ils le soulèvent par-dessus les tombes d’autres morts des précédents conflits – les morts des 8 ans de conflit contre l’Iran, ceux tués en montant des attentats contre les forces d’invasion américaine et les victimes des différents bains de sang entre sectes sunnites/chiites qui ont fait suite à l’opération US de 2003. .

Le bureau de réception du cimetière a enregistré 127 morts sur le champ de bataille depuis le début de l’offensive sur Tikrit, au début du mois de mars. Mais ce chiffre n’inclut pas le grand nombre de membres des milices chi’ites, dont l’organisation Badr, Asaib Ahl al-Haq et les « Brigades de la Paix » de l’anti-américain Moqtada Sadr- qui enregistrent le nombre de leurs morts séparément. 

Dans les salles de lavement du cimetière, où la plupart des corps sont déposés pour être péparés avant l’enterrement, les préposés affirment que leur nombre en attente est encore plus important. 

« Entre les quatre principales salles de lavement, il y a actuellement, entre 40 et 60 martyrs par jour qui arrivent de Tikrit », dit un responsable de service, Fadl al-Zubaidi. Il n’y en a qu’une poignée qui appartiennent à l’armée. La plupart des victimes sont des volontaires chiites ou des membres des milices chiites qui mènent le combat. 

Des responsables américains ont évoqué, la semaine denière, le chiffre d’environ 20,000 combattants des milices chiites qui ont rejoint les rangs de la bataille de Tikrit, à comparer à 4.000 hommes de troupes irakiennes. 

Zubaidi a entendu de nombreux détails de la bataille, de la part d’hommes de troupe revenant de guerre pour ramener les morts – des récits d’embuscades, et de combattants pro-gouvernementaux qui sont pris en otage et brûlés vifs. Il soupçonne que, parfois, les autorités retiennent les corps pour éviter tout comptage. 

« Sur le champ de bataille, en un jour, parfois, une centaine de soldats tombent, mais la morgue ne les envoient pas tous en même temps, parce que le sujet est trop sensible », dit-il. 

Hashim Yasser, un autre responsable, a dit que le pic en nombre de pertes, est le pire atteint depuis que l’Etat Islamique a lancé sa charge légère à travers tout le nord de l’Irak en juin.

 « Nous pouvons avoir un aperçu de la façon dont les choses évoluent », dit-il « Ce n’est pas bon du tout ».

A une petite centaine de mètres de lui, Samira al-Timimi, 59 ans, s’occupe seulement des corps de combattants de l’ Asaib Ahl al-Haq, l’une des milices chi’ites les plus notoires. Elle dit que 26 membres du groupe sont morts à Tikrit, jusqu’à présent, dont 3 hauts commandants, tués au cours d’un attentat-suicide, le 5 mars.

Les attentats à la bombe et les tirs de snipers sont les causes les plus répandues de mort parmi les forces dites « pro-gouvernementales », selon les préposés.

L’Appel désespéré à l’aide des Américains

Malgré les pertes en hommes de troupes, l’offensive a évincé une partie de l’Etat Islamique de Tikrit et poussé ses jihadistes à fuir les villages environnants qu’ils tenaient sous leur emprise depuis huit mois. Mais certains responsables réclament plus d’assistance nécessaire à une percée finale dans la ville.

Jassim al-Jabara, chef de la Commission Sécuritaire de la province de Salahuddin, dit qu’il reste confiant que l’opération puisse se terminer dans le laps de quelques jours. Mais il dit aussi que l’aide du soutien aérien de la coalition dirigées par les Américains serait nécessaire pour y parvenir.

 « Nous en avons désespérément besoin, actuellement. Mais certaines personnes y sont opposées », dit-il.

Le Lieutenant-Général Abdulwahab al-Saidi, chef des forces anti-terroristes de la province, a aussi dit à l’AFP, qu’il y avait un besoin urgent de frappes de précision. Cependant, Raed al-Timimi, un porte-parole du Ministère de la Défense irakienne, a déclaré que le gouvernement n’avait pas transmis de requête officielle pour obtenitr une telle assistance.

A Washington, un porte-parole du Pentagone, le Colonel Steve Warren a déclaré aux reporters que les forces américaines n’ont pas mené de frappes aériennes pour soutenir la bataille de Tikrit. « Je ne veux pas spéculer sur ce que nous allons faire à l’avenir, mais je tiens pour un fait établi que nous sommes, évidemment, en contact étroit » avec le gouvernement irakien, a t-il dit. 

Se joindre au combat mettrait les Etats-Unis dans une position malaisée, puisque l’opération sur Tikrit est dominée par les milices chi’ites et supervisée par le commandant iranien Qassem Souleimani. L’Iran chi’ite dominateur est perçu comme le soutien central de ces milices. 

Karim al-Nouri, porte-parole du groupe Badr, mainenait l’idée que les forces irakiennes pouvaient s’en sortir toutes seules. 

Des renforts de troupes fraîches provenant de ces milices ont commencé à arriver dimanche, alors que le groupe Sadr a envoyé ses brigades de la Paix, pour se  joindre au combat. Ce groupe avait gelé leurs activités, il y a juste quelques semaines, en citant des inquiétudes concernant l’image négative créées par d’autres milices accusées de violations avérées des droits de l’homme contre les minorités. .

Ghaban, le Ministre de l’Intérieur, a déclaré lundi que les opérations à Tikrit « reprendraient bientôt », mais que la décision demeurait entre les mains des commandants sur le terrain. Pendant ce temps, dit-il, la focale a été mise sur le maintien de la sécurité dans les zones déjà libérées. 

Alors que Sabah attendait, à la lumière du jour qui déclinait, que la tombe de son père soit creusée dimanche, il racontait qu’il projetait de retourner sur le champ de bataille aussi vite que possible, encore plus motivé par la mort de son père. Lorsqu’il est entré dans la pièce où son père s’est fait tuer, il « s’est vengé » en tuant sauvagement un jihadiste, dit-il. 

« Quand j’ai vu mon père gisant là, je ne pouvais plus continuer », précise t-il. « Mais, maintenant, dès que les funérailles seront terminées, j’y retourne. Nous continuerons et peu importe ce que cela coûtera ». 

 16 Mars

Missy Ryan à Washington et Mustafa Salim à Najaf ont contribué à ce reportage.

washingtonpost.com

Adaptation : Marc Brzustowski

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