Deux tableaux exposés au musée des Beaux-Arts de Rouen auraient été volés par les nazis
De Charlotte Coutard
Le musée des Beaux-Arts de Rouen et la métropole ont entamé en 2022 un vaste travail de « recherches de provenance » des 3.141 œuvres exposées au musée rouennais. Deux tableaux auraient été volés à des familles juives par les nazis pendant la Seconde guerre mondiale
Le musée des Beaux-Arts de Rouen recherche les propriétaires d’œuvres exposées au musée, potentiellement spoliées pendant la Seconde guerre mondiale par les nazis à des familles juives. Entre 1933 et 1945, le régime nazi a volé environ 100.000 œuvres d’art à des familles juives en France. Certaines sont susceptibles d’avoir ensuite été achetées par des musées français, sans savoir qu’elles avaient été dérobées.
Le musée et la métropole de Rouen ont entamé cette recherche il y a quasiment deux ans, en 2022, avec l’aide de trois chercheuses indépendantes. Deux œuvres ont été identifiées comme assurément spoliées ou avec un très fort doute de spoliation: il s’agit d’un pastel d’Armand Guillaumin de 1888 et d’une huile sur toile de Pierre-Auguste Renoir, deux œuvres du 19e siècle, qui auraient été volées par les nazis à leurs propriétaires, puis acquises par le musée des beaux-arts de Rouen. Des recherches complémentaires sont en cours, soit pour rechercher les héritiers, soit pour confirmer le vol.
Portrait de Madame Guillaumin, par Armand Guillaumin © Radio France – Charlotte Coutard
Un cartel explique l’histoire de l’oeuvre © Radio France – Charlotte Coutard
Femme au miroir, par Pierre-Auguste Renoir © Radio France – Charlotte Coutard
Un cartel explique l’histoire de l’oeuvre. © Radio France – Charlotte Coutard
3.141 œuvres expertisées
Il a fallu expertiser les 3.141 œuvres du fond de peinture du musée des beaux-arts de Rouen, classées en fonction du risque de spoliation du vert au rouge. Seules ces deux œuvres sont en rouge, mais le doute persiste pour cinq autres œuvres, explique Robert Blaizeau, directeur des musées de la Métropole Rouen Normandie.
Le travail d’expertise se poursuit pour ces deux œuvres, avant la recherche des ayants droits et la restitution des œuvres.** Des recherches encadrées par Corinne Hershkovitch, avocate au barreau de Paris.
Une première pour un musée en dehors de Paris
Ce travail de recherche est une première pour un musée en région, il n’y a pas d’équivalent ailleurs en France à part aux musées du Louvre et d’Orsay à Paris. Ce travail a été entamé avant même le vote, le 22 juillet dernier, de la loi sur la restitution des biens culturels spoliés dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945.
Le premier audit est désormais terminé, il a couté 40.000 euros, entièrement financé par la Métropole de Rouen. Une deuxième phase commence et va durer six mois : les trois chercheuses vont désormais se pencher sur les cinq œuvres, classées en « jaune orangé », pour lesquelles les doutes persistent, le vol n’a pas été exclu. Là encore, une enveloppe de 40.000 euros a été débloquée, la Métropole espère obtenir une subvention du ministère de la Culture.
Neuf œuvres dites « Musées Nationaux Récupération » à Rouen
Les nazis avaient volé 100.000 objets d’arts aux Juifs en France, 60.000 ont été restituées à la fin de la Seconde guerre mondiale. Parmi ces œuvres, il existe des œuvres dîtes MNR, « Musées Nationaux Récupération », récupérées en Allemagne après la guerre, volées par les nazis de manière certaine. Elles ont été mises en dépôt dans les musées français après la guerre, en attendant de trouver les propriétaires. Mais ces œuvres ne sont pas inscrites officiellement dans les collections publiques, elles n’appartiennent pas à l’État. Il y en a encore 2.000 en France, dont 9 MNR à Rouen, du provisoire qui dure depuis 80 ans.
Le directeur des musées de la Métropole de Rouen, devant deux tableaux sans doute volés par les nazis pendant la seconde guerre mondiale. © Radio France – Charlotte Coutard
JForum.fr avec www.francebleu.fr Charlotte Coutard
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