Renverser l’échiquier stratégique à Gaza

Alors que les développements récents en Iran ne modifient en rien la complexité du dossier gazaoui, il est crucial pour Israël de bien saisir les enjeux de l’après-guerre. Ces derniers jours, la question épineuse du « lendemain » est revenue sur le devant de la scène après les déclarations du ministre de la Défense Yoav Galant, pressant le gouvernement de trancher rapidement.

Selon lui, l’immobilisme conduirait au rétablissement du Hamas au pouvoir, synonyme de défaite stratégique. D’autres voix s’élèvent pour juger prématuré tout choix sur la nature du successeur politique de l’organisation islamiste à Gaza.

Ces analyses négligent une donnée essentielle: le « système de résistance » palestinien fonctionne en deux strates interdépendantes qu’il faut traiter simultanément. Au niveau supérieur, la branche armée du Hamas, véritable machine de guerre comptant 30 000 combattants structurés. Mais cette architecture militaire n’est que la partie émergée d’un iceberg : elle plonge ses racines dans les 2 millions d’habitants de la bande, réservoir intarissable de nouvelles recrues.

Près des deux tiers de cette population sont en effet des jeunes de moins de 30 ans, fervents soutiens de « l’idée de la résistance » qui sous-tend et légitime le projet du Hamas. Une idéologie que l’organisation entretient soigneusement pour assurer son enracinement populaire et sa pérennité.

Nous l’avons constaté en Cisjordanie lors de la seconde Intifada: les opérations antiterroristes les plus dévastatrices n’entamaient en rien ce « baril sans fond » tant que la rue palestinienne restait acquise au mot d’ordre insurrectionnel d’Arafat.

Le renversement de tendance s’amorça seulement après l’avènement d’Abbas, qui promut des perspectives alternatives de « résistance non-violente » et de « construction nationale ». Dorénavant, la fierté des jeunes Palestiniens pouvait s’exprimer autrement que dans la lutte armée. L’attrait du terrorisme s’émoussa au profit d’autres voies d’engagement, civiles ou sécuritaires.

Telle est la clé pour assécher les viviers humains du Hamas à Gaza: imposer une option idéologique crédible, portée par une administration civile palestinienne responsable et légitime, en lieu et place du narratif actuel de la « résistance ».

À cette condition sine qua non d’un assèchement du terrain nourricier de la mouvance islamiste, les efforts purement militaires ne pourront qu’être vains et provisoires.

Selon certaines sources, cette option aurait pu se concrétiser si Israël avait accepté la proposition de reconstruire une Autorité palestinienne réformée à Gaza, sous tutelle arabe et occidentale. Là réside peut-être l’unique voie pour faire advenir un véritable changement de paradigme: un marché global engageant Israël sur la voie d’un arrêt durable des hostilités, en échange de l’émergence d’une force civile palestinienne alternative au projet hégémonique du Hamas.

Pour Israël, l’heure est peut-être venue de revoir ses objectifs stratégiques à Gaza, et d’embrasser résolument la quête d’une issue politique, négociée avec les puissances régionales et les futures élites palestiniennes émancipées du joug islamiste. Rude chemin que seule une réelle vision d’avenir pourra guider dans la complexité.

Il reste cependant difficile de trouver des partenaires arabes véritablement fiables et résolument engagés dans une vision pacifique, reconnaissant et acceptant l’État d’Israël pour coexister pacifiquement à ses côtés. Aujourd’hui encore, nombreux sont ceux dans le monde arabe qui nourrissent l’illusion de pouvoir vaincre militairement Israël. Cela explique la popularité persistante du slogan « de la rivière à la mer », sous-entendu jusqu’à la destruction pure et simple de l’État hébreu, très loin des véritables mots de paix. Dans ce contexte régional tendu, la voie d’une résolution politique apparaît encore semée d’embûches malgré les opportunités qui se font jour. Seul un réel changement de paradigme des mentalités pourra peut-être ouvrir la voie à un avenir apaisé.

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Asher Cohen

Je renvoie à mon post sous l’article précédent concernant la recolonisation. Netanyahou a intérêt, après Rafah, à laisser pourrir la situation à gaza jusqu’à ce que l’Égypte, les pays arabes et l’Europe, finissent par craquer. Très bien d’avoir repris mon point que le socle du hamas est la population gazaouie, et comme on ne pourra pas la changer idéologiquement, la seule solution est de la déplacer par la force. Ici, je rejoins Netanyahou et Ben Gvir-Smotric, plutôt que Gallant.

BOCCARA

Et n’oublions pas que pour Israël toute négociation est synonyme de concessions (courageuses bien sûr comme ils disent mais surtout très très douloureuses) qui se caractérisent par des reculs territoriaux de plus en plus importants contre des chiffons de papiers (on peut être fichtrement inquiet pour les traités de paix avec l’Égypte et l’entité Hachémite vu leur attitude actuelle)ou dès résolutions de L’ONU que seuls les israéliens respectent et que les autres violent a gogo comme au Sud Liban .
Tout le monde semble oublier les propositions démentes de Ehud Barak et de Olmert rejetees avec mépris par les satrapes de ramallah.
Et le résultat catastrophique du retrait de Gaza (merci Sharonqui devait être sacrément diminué deja) devenu le Hamasland et du Sud Liban (merci Barak ET GANTZ déjà mouillé dans cette affaire.(il était chargé de la logistique de la débandade et a été lamentable) devenu le Hezbollahland. Et ni Netanyahou ni Smotrich ni ben Gvir n’y étaient pour rien.

BOCCARA

A cet article il faut en rapprocher un autre qui s’appelle:
« Dans les meandres des négociations »
Difficile de voir avec précision le message que veut faire passer l’auteur qui semble être le même.
Et qui fait partie de la rédaction de Jforum.
Néanmoins il semble qu’on veuille faire passer le message suivant nous indiquer que :
Toute solution militaire est impossible
Une victoire militaire a gaza est impossible de même que le contrôle de la judee et de la samarie
Surtout l’armée et l’establishment sécuritaire semblent en être convaincus et semblent prêts à arrêter la guerre à n’importe quel prix .s’associent implicitement à ce point de vue le parti des US de Biden Blinken Burns à savoir Gantz Eizenkot (peut être même Gallant)et évidemment les chefs de la révolte insurrectionnelle Ehud Barak , Olmert , Yair Golan , Dan haloutz tamir pardo et tous les autres has been .
Et n’oublions pas Lapid qui vient de nous dire que sans ce gouvernement et avec lui à sa place on aurait AUJOURD’HUI MEME la paix , signé un accord avec l’Arabie saoudite , on serait aimé et respecté par le monde entier sans compter la cour internationale de justice et la cour pénale internationale et qu’une force multinationale araboamericaine (alors que Biden se refuse à sécuriser lui même son port artificiel et à simplement envoyer un seul soldat en Ukraine)patrouillerait à Gaza et ailleurs(comme au Sud Liban probablement, et on imagine l’enthousiasme des égyptiens des jordaniens des libanais et des saoudiens et autres arabomusulmans du golfe ou pas du golfe pour patrouiller pour assurer la sécurité de la frontière avec Israël surtout les égyptiens qui à l’évidence ne sont que les collabos du Hamas par l’intermédiaire de plusieurs dizaines de tunnels gigantesques)
Seules des négociations avec l’autorité palestinienne (?) voire carrément le Hamas lui-même et une vision(?) avec l’aide des alliés(?) arabes et le grand ami américain (Biden Blinken Burns Et Obama bien sûr sans oublier Rob Malley le traître à la solde de l’Iran ) peuvent nous amener à la paix et à la sécurité.
Et bien sûr ceux qui bloquent tout sont Netanyahou Smotrich et Ben Gvir .sans eux tout serait réglé depuis longtemps comme nous l’a expliqué Lapid .
Bien sûr on rappelle que en face les interlocuteurs pour réaliser un tel programme de bonne foi ne sont pas vraiment très nombreux .
Néanmoins l’avenir c’est la négociation ce qui veut dire pour Israël :
Négocier après avoir été vaincu à Gaza ,en judee samarie (et autant appeler ça définitivement la Cisjordanie) et au Sud Liban car proclamer que Israël n’aurait pas été batttu partout serait nous faire prendre des vessies pour des lanternes.
Évidemment ces deux articles ne disent pas tout cela mais en le disant quand même plus ou moins ou moins que plus .mais sans trop l’affirmer quand même .