Oeil d’aigle

Les combattants du bataillon Ayit sont responsables de la surveillance et de la direction des tirs dans le secteur qui s’étend du mont Hermon au triangle frontalier Syrie-Jordanie-Israël.  Ce sont donc eux qui ont relevé les coordonnées sur le terrain et passé les instructions indispensables aux avions venus pilonner les positions irano-syriennes, le 2 juin 2019 au petit matin, en représailles à des tirs de roquettes la veille.

« Le Hezbollah se cache sous la couverture fournie par l’armée syrienne« , a déclaré le commandant du bataillon dans une interview spécialement accordée à IsraelDefense.

Les opératrices de surveillance du bataillon Ayit en action (Photo: Meir Azulay)
« Aujourd’hui, les développements en Syrie sont moins dynamiques et moins imprévisibles par rapport aux sept dernières années », a déclaré le lieutenant-colonel Yuval Litvin, commandant du 595ème bataillon du renseignement de combat Ayit (= Eagle/Aigle) dans une interview accordée à IsraelDefense . « Les Syriens ont fait un pas impressionnant entre juin et août en reprenant 600 kilomètres carrés dans le sud de la Syrie. À certains endroits – lors de négociations de reddition, ou à la suite de combats féroces avec le soutien de la Russie. Aujourd’hui, l’armée syrienne est en train de reconsolider ses positions. Les mêmes brigades qui étaient déployées ici avant la guerre civile sont de retour sur la ligne de front, à l’exception d’une brigade qui a été éliminée et d’une nouvelle formée à sa place. « 

Forcer la construction de l’autre côté

« La Syrie construit la même armée qu’elle était avant 2012. Les premières brigades de contact sont déployées le long de notre frontière avec les divisions derrière elles et les réserves du QG derrière les divisions », explique Litvin. « Les Syriens construisent et reconstruisent des bases et des postes. La réhabilitation de l’armée est effectuée conformément à la réalité actuelle. L’armée syrienne n’était pas une force militaire faible, et ce n’est pas une force militaire faible aujourd’hui non plus. Au contraire – vous voyez des soldats bien équipés qui savent se battre et possèdent un esprit combatif. Cette armée est issue de six années de guerre. Elle est expérimentée et dotée d’un esprit combatif. Elle n’a pas remplacé l’ensemble de l’armée, mais elle a beaucoup appris au cours de ces combats.

Dans la reconquête du sud de la Syrie, face à l’Etat islamique, nous avons constaté une utilisation massive de la puissance aérienne et du feu, des efforts de localisation, des assauts. Ils ont appris ces tactiques des Russes. Nous avons assisté à des opérations interarmes et à des combats interarmes. Ils ont également appris les tactiques de guérilla du Hezbollah, ce sur quoi ils n’étaient pas si bons auparavant. « 

Le bataillon Ayit est responsable de la surveillance et de la direction des tirs (une capacité unique du bataillon du renseignement de combat déployé dans le secteur syrien), du mont Hermon au triangle frontalier Syrie-Jordanie-Israël. La longueur de cette frontière est de plusieurs dizaines de kilomètres et ces dernières années, depuis 2012, elle est devenue une frontière très chaude, voire bouillante. « Entre 1974 et 2012, la situation était calme. Nous disposions de quelques ressources de surveillance dans ce secteur, ainsi que de nombreuses ressources des Quartiers Généraux qui s’intéressent profondément au territoire syrien », explique Litvin. « En 2013, les Forces de défense israéliennes ont compris que les pièces du jeu d’échecs avaient été déplacées et ont constitué ce bataillon.

Je parle de la période qui a précédé la création de la 210ème division de Tsahal .

 » Initialement, le bataillon était établi comme un petit organe avec des opérateurs de surveillance et des combattants. Aujourd’hui, nous parlons environ de cinq à six fois plus de nombre de troupes. Le bataillon compte plusieurs centaines de soldats de l’armée régulière et des centaines de réservistes supplémentaires. L’intensité des combats en Syrie a été déterminante pour pousser à l’intensification de l’ordre de bataille du bataillon. A présent, nous attendons de voir comment les combats en Syrie se stabiliseront avant de prendre la moindre décision de modifier notre ordre de bataille. « 

Opérer en face de tant d’organisations oblige les combattants du bataillon à comprendre qui est qui dans le jeu. Dans la partie sud du secteur, l’État islamique était déployé sous différents noms. Au centre – Jabhat al-Nusra, et au nord – l’axe radical (Iran / Hezbollah). Litvin explique que l’effondrement de l’armée syrienne n’a pas eu lieu en un seul jour. Le processus a commencé lorsque des unités de l’armée syrienne ont commencé à faire défection et à adopter une identité locale. À certains endroits, les officiers originaires d’un village spécifique ont fait défection et ont créé une unité locale. A d’autres endroits, des unités contrôlaient des zones un peu plus vastes.

« Et ainsi, peu à peu, l’armée syrienne s’est effondrée », a déclaré Litvin. «L’État s’est désintégré en zones secondaires qui ont assumé l’identité tribale locale. À partir d’une situation où vous aviez eu affaire à une armée marquée en rouge, vous avez soudainement été confronté à 14 ou 15 couleurs différentes. Cela change votre perception et vous empêche de produire une image claire de l’état des forces en présence. Des changements ont eu lieu ici à intervalles d’une semaine ou moins. C’est un scénario complexe pour tout effort de collecte de renseignements. « 

 

Afin de fournir aux combattants, exerçant leur surveillance sur cette situation de guerre, les connaissances dont ils avaient besoin, une nécessité de partage des connaissances s’est faite sentir. La solution est venue du commandant de la 210ème division de Tsahal, qui a décidé d’aller plus loin dans la coopération en exerçant moins de compartimentage. « Les murs de compartimentage sont relativement bas entre le bataillon et la brigade et les autres services de renseignement », explique Litvin. « Les servantes du bataillon sont subordonnées à l’officier du renseignement de la division. Nous avons mis en place une cellule de collecte du renseignement multidimensionnelle composée de toutes les agences de recouvrement dans un format permettant au chef d’équipe en bout de ligne de comprendre ce qui intéresse le commandant de la division et réciproquement : il y a de la tension et c’est un défi. C’était une décision du commandant de la 210ème division, résultant de l’émergence de la réalité qui existait ici. Nous avons ici des femmes de service qui ont des classifications de haute sécurité ».

Une partie des activités de routine du bataillon, au cours des dernières années, a consisté à fournir un soutien en matière de renseignement pour l’évacuation des blessés de Syrie. Au cours de la guerre civile en Syrie, Israël a évité d’intervenir dans les combats mais a fourni une aide humanitaire, y compris l’évacuation de quelque 5 000 blessés vers des hôpitaux en Israël. « Lorsque vous évacuez des blessés de Syrie, vous voulez fournir aux forces d’évacuation des renseignements précis, de peur que les blessés ne mettent nos forces en danger. C’était notre responsabilité », a déclaré Litvin. « Cette activité représente un défi pour la collecte de renseignements, pour déterminer ce qui est irrégulier et ce qui ne l’est pas. Si aujourd’hui j’aperçois des individus armés suspendus autour de la barrière, je peux déterminer qu’il s’agit d’un événement irrégulier – et y répondre.

Couverture pour le Hezbollah

Le redéploiement de l’armée syrienne sur le plateau du Golan présente un défi majeur : la couverture que l’armée syrienne apporte au Hezbollah. « Nous estimons que l’armée syrienne est revenue de la guerre très endettée envers le Hezbollah », a déclaré Litvin. « L’armée syrienne s’est engagée envers le Hezbollah à considérer cela comme une opportunité. Premièrement, le Hezbollah a trouvé une occasion d’établir un système de collecte de renseignements auprès d’Israël le long de la frontière syrienne. Aujourd’hui, ils disposent des mêmes ressources qu’au Liban. Ensuite, le Hezbollah peut tirer parti de ce secteur pour organiser des attaques depuis le territoire syrien. Le Hezbollah peut, à long terme, constituer une force en Syrie qui nous attaquerait, dans le contexte d’une guerre future avec le Liban. Ils peuvent aussi décider, selon leurs propres intérêts, où vous «poignarder», tout le long d’un secteur qui s’étend depuis la Méditerranée jusqu’à Hamat Gader, sur près de 200 km.

Pour faire face aux menaces, une autre compagnie spécialisée a été créée au sein du bataillon. « Dès que je suis entré en fonction, je me suis rendu compte qu’un changement avait eu lieu. Dans le passé, l’ennemi nous tournait le dos. L’Etat d’Israël était secondaire en ce qui le concernait, ce qui nous permettait de surveiller de manière relativement ouverte. Les différentes organisations syriennes étaient occupées à traiter les unes avec les autres et ne voulaient pas engager le jeu avec l’armée israélienne. Nous savions que cela ne les intéressait pas. Aujourd’hui, le Hezbollah opérant clandestinement le long de la frontière syrienne, sous la couverture fournie par l’armée syrienne, c’est un scénario qui nous oblige à renforcer nos équipes consacrées à cette mission : nous avons deux compagnies dédiées composées d’équipes, deux équipes composées d’opératrices qualifiées du Grade 05 en tant que fusiliers, capables d’exploiter toute la gamme de nos capacités, auprès des éléments camouflés sur le terrain, de piloter des drones à distance, ou de superviser des ressources de surveillance de types variés, des plate-formes à voilure fixe, un aérostat de Shilat Optronics (ballon dirigeable d’observation) et bien d’autres ressources », explique Litvin.

Comme indiqué, le bataillon est également responsable de la direction des tirs d’artillerie dans le secteur du plateau du Golan. C’est une capacité unique du bataillon Ayit. « Nous avons un officier de soutien au feu dans notre bataillon, notre propre officier de liaison d’artillerie. Nos équipes constituent un outil important pour diriger les tirs dans ce secteur, quel que soit le champ de tir. Si la 210e Division a l’intention d’exploiter quoi que ce soit, nous exécuterons les efforts de surveillance préliminaires et la gestion de l’incrimination, de la direction du feu et de l’évaluation des dégâts causés lors de la bataille (Battle Damage Assessment – BDA) « , révèle Litvin « Nous avons plusieurs centres de surveillance dans le secteur. Chacun d’entre eux sait comment fonctionner face au commandant de bataillon en charge du secteur.

Chaque centre de surveillance occupe une structure en béton armé qui lui permet de passer facilement d’une opération de routine à une opération d’urgence. Le centre est divisé en postes de travail gérés chacun par un opérateur de surveillance. Le système informatisé attribue des événements aux opérateurs de surveillance selon une échelle d’importance déterminée par le quartier général du bataillon de surveillance et chaque événement fait l’objet d’une enquête. « Les opérateurs de surveillance disposent de trente secondes pour décider s’ils gèrent un événement irrégulier. Tout événement autre qu’un événement irrégulier sera acheminé vers les archives où il sera stocké à tout moment pour un compte rendu ultérieur, le cas échéant », explique Litvin.

« Les opérateurs de surveillance travaillent quatre heures, suivies de huit heures de repos. Nous leur avons construit un nouveau logement, semblable à un hôtel, adjacent au centre de surveillance, afin de leur assurer les meilleures conditions de vie possibles. L’une des spécialités professionnelles les plus difficiles de l’armée israélienne est de s’asseoir face à un écran pendant quatre heures, de rester vif et alerte tout au long de cette période, de quoi déterminer, pour chaque événement, ce qui est irrégulier et ce qui ne l’est pas – ce n’est pas une mission simple. »

Les centres de surveillance permettent au commandant de brigade et au commandant de bataillon de recevoir des informations en temps quasi réel sur tout événement se déroulant dans le secteur. « Chaque événement irrégulier m’est signalé en quelques secondes », explique Litvin. « En fonction de l’événement, le commandant de brigade peut visualiser l’affichage de tout poste de travail d’opérateur qu’il souhaite voir sur un grand écran, et il peut également demander à voir les événements qui se déroulent dans le présent ou ceux qui se sont déroulés dans le passé. le fait que tout le monde partage le même espace permet un partage très rapide des informations. Dès qu’un événement irrégulier se produit, deux à quatre clics font en sorte que les informations soient diffusées via le système Masu’ah à l’ensemble de Tsahal. « 

israeldefense.co.il

Adaptation : Marc Brzustowski

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