Michel Nawfal : Même s’il y a d’autres attentats, la stratégie turque vis-à-vis des Kurdes ne changera pas

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Un attentat-suicide a visé hier un centre culturel dans la ville de Suruç, en Turquie, à quelques kilomètres de la frontière syrienne. Au moins 30 personnes ont péri et une centaine de blessés ont été conduits à l’hôpital, selon des sources officielles. L’attaque, qui s’est produite à midi, visait un groupe de jeunes volontaires, proches du Parti des travailleurs kurdes (PKK), qui s’apprêtaient à se rendre à Kobané, en Syrie. Quelques instants à peine après l’attentat, c’est la ville syrienne qui a assisté à une attaque terroriste perpétrée par un kamikaze qui a fait exploser un véhicule piégé à un point de contrôle, tuant deux combattants kurdes.
Si la paternité des deux attentats n’a toujours pas été revendiquée, les autorités turques ont directement pointé du doigt l’État islamique (EI). Ce serait la première fois depuis son émergence que le groupe islamiste radical commet une attaque sur le sol turc. L’analyste Michel Nawfal, spécialiste des questions turques et auteur du livre « Le Retour de la Turquie en Orient », répond aux questions de L’OLJ.

Quel message pourrait faire passer l’EI avec ces attentats ?

Le groupe EI veut montrer, surtout à travers l’attentat qui a eu lieu à Kobané – qu’ils ont perdu au profit des Kurdes –, qu’il est bien présent dans la région. L’attentat en Turquie semble être un double message. D’une part, l’EI a cherché à faire le plus de victimes possible du côté des Kurdes ; d’autre part, cela pourrait être une réponse au changement, perçu comme radical par l’EI, de la politique du gouvernement islamo-conservateur turc à son égard.

 

Pensez-vous que cet attentat conduira à une détérioration des relations turco-kurdes, déjà très fragiles, et un changement de stratégie aux frontières syriennes ?

Au niveau des frontières syriennes, nous assistons en ce moment à un statu quo. La Turquie ne veut clairement pas intervenir en Syrie, vu que l’Otan ne s’est jamais prononcée sur le sujet et que le dirigeant de l’armée turque est contre.

Même s’il y a d’autres attentats, rien ne va modifier la stratégie du gouvernement d’Erdogan vis-à-vis des Kurdes. Le déploiement militaire turc aux frontières syriennes a pour fonction principale de rééquilibrer les rapports de force et d’empêcher la continuité d’une ligne kurde tout au long de ces frontières, donc elle reste indépendante des événements d’hier.

Cet attentat poussera-t-il la Turquie à agir plus fermement vis-à-vis de l’EI ?

Ankara se montre de plus en plus ferme vis-à-vis de l’EI. Cette politique de démantèlement des cellules jihadistes turques et de contrôle des frontières est très importante aux yeux de l’Europe, qui accuse la Turquie de faciliter l’expansion de l’EI dans la région. Cette politique de démantèlement s’inscrit également dans le contexte de la formation d’une coalition gouvernementale. On assiste depuis l’accord sur le nucléaire iranien à un changement global des rapports de force régionaux. Une nouvelle alliance anti-Daech, à laquelle s’ajoutera désormais l’Iran, pourra pousser la Turquie à entrer dans les rangs, si elle compte se faire respecter par les Occidentaux.

 

Source : lorientlejour.com

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