Le «corridor» iranien est un projet central pour les mollahs en Irak et en Syrie, impliquant une autoroute qui relierait Téhéran à Damas.

L’Iran est très investie dans la construction d’une route terrestre qui relie son territoire à la Syrie et à la Méditerranée en passant par l’Irak. Cela a été rendu possible sous couvert de la lutte contre l’Etat islamique, qui a permis au régime iranien de présenter sa participation aux combats en Syrie comme un devoir légitime et international.

L’objectif de cette route, qui est un territoire iranien entièrement contrôlé à toutes fins utiles, est de garantir l’accès de l’Iran au Hezbollah, quelle que soit la situation de combat en Syrie, ainsi que de permettre à l’IRGC de renforcer ses efforts pour établir une présence permanente sur le sol syrien. Ces efforts sont déjà manifestes dans les hauteurs du Golan syrien, qui constituent une position clé, dans le contexte de l’ambition de l’Iran de créer une capacité de renseignement et une infrastructure militaire offensive vis-à-vis d’Israël et un potentiel subversif envers la Jordanie.

En décembre 2017, le projet de route iranienne a été considérablement renforcé lorsque l’armée syrienne et les forces pro-iraniennes, notamment le Hezbollah libanais et les milices chiites irakiennes al-Nujaba ‘et Kata’ib Hezbollah, ont pris le contrôle du passage frontalier reliant l’Irak et la Syrie (al-Qa’im du côté irakien, Abu-Kamal du côté syrien) ,contre l’Etat islamique et ont commencé à l’utiliser comme moyen de transférer des armes.

Dans le contexte des efforts israéliens déterminés à contrecarrer le projet de création de forces iraniennes en Syrie, diverses frappes ont été lancées contre des cibles associées à la Force Quds du Corps des Gardiens de la Révolution, aux milices chiites et au Hezbollah. Dans ce contexte, il est signalé qu’en juin 2018, une installation utilisée par la milice de Kata’ib Hezbollah a fait l’objet d’une frappée près d’Abou Kamal, à la frontière syro-irakienne.

Pour éviter les frappes aériennes israéliennes, les Iraniens ont mis en place un pont aérien à destination de Damas, Alep et Beyrouth, à travers lequel ils continuent de fournir des technologies de missiles et d’autres armes, missiles, roquettes et munitions diverses. Ils bénéficient de la coopération de l’armée libanaise, également responsable de l’aéroport de Beyrouth. Néanmoins, l’Iran continue de travailler avec acharnement à l’établissement de la route terrestre, qui peut être utilisée plus largement que le transport aérien – lequel ne peut transporter que des quantités et des types limités d’équipement militaire.

La planification de l’intégralité du projet a été avancée lors d’une réunion entre les chefs d’état-major d’Iran, d’Irak et de Syrie à la mi-mars 2019 en Syrie. Lors de la réunion, ils ont annoncé l’ouverture d’un passage terrestre entre l’Irak et la Syrie. Les sources irakiennes ont révélé aux médias que, sur les trois points de passage entre l’Irak et la Syrie, ce serait al-Qa’im qui serait utilisé à cette fin.

Le quotidien qatari al-Arabi al-Jadid, basé à Londres, a relaté le 26 mars un récit exclusif, selon laquelle l’Iran avance actuellement des plans pour la construction d’une autoroute qui relierait Téhéran à Damas via l’Irak, avec une extension future au Liban. Des sources irakiennes ont déclaré au quotidien que la construction de la route était ancrée dans un accord récemment signé entre l’Iran et l’Irak. Une mission technique iranienne s’est récemment rendue en Irak et a rencontré de hauts responsables gouvernementaux. Le projet envisagé aurait apparemment été évoqué lors de la visite du président Rouhani en Irak à la mi-mars 2019, dans laquelle il avait également invité le gouvernement irakien à réaliser la construction d’une liaison ferroviaire entre Shalamcheh et la frontière irano-irakienne à Bassorah, et, de là, vers la Côte syrienne à Lattaquié, un projet promu par l’Iran depuis 2013.

Actuellement, les Iraniens discutent avec la partie irakienne du tracé de l’autoroute et d’autres aspects techniques liés au projet. Ils ont suggéré aux Irakiens deux itinéraires optionnels, tous deux partant de la province de Kermanshah, à la frontière irano-irakienne.

Premier itinéraire supposé – Qasr-e Shirin à Deir al-Zor

Cet itinéraire commencerait de la ville de Qasr-e Shirin dans la province de Kermanshah, de là à Kalar en Irak, puis à TuzKhurmatu, de là à la chaîne de montagnes Hamrin, à Ninive et finalement au gouvernorat de Deir al-Zor en Syrie.

 

Deuxième route supposée – Kermanshah à al-Qa’im

Cette route a servi de voie de communication officielle entre l’Irak et la Syrie jusqu’à l’éclatement de la guerre civile en Syrie en 2011. Elle entre en Irak par la province de Diyala, à la frontière irano-irakienne, au nord de Bagdad, d’Abou Ghraib, de Faluja et de Ramadi. Puis elle entre en Syrie par Al Qaïm.

Selon le rapport, la principale préoccupation de l’Iran est de maintenir la route aussi éloignée que possible des bases américaines et de la présence militaire américaine, ainsi que de tous les autres membres de la coalition anti-Daesh. De plus, l’Iran – actuellement sous un régime de sanctions qui se ressent déjà sous divers aspects budgétaires – préférerait utiliser l’infrastructure routière existante pour réduire les coûts.

Selon des sources irakiennes, les Iraniens, maintenant plus désireux que le camp irakien de faire avancer le plan, offrent au gouvernement irakien des incitations économiques qui découleraient de ce projet. Celles-ci incluraient des opportunités de travail pour les Irakiens, l’utilisation de camions irakiens du secteur privé et une possibilité pour les autorités irakiennes de percevoir des redevances et taxes sur les voitures allant en Syrie.

Apparemment, la fuite répercutée par al-Arabi al-Jadid au sujet des projets d’autoroute provenait de sources irakiennes opposées au projet. Elles ont déclaré au quotidien que le projet ne visait clairement pas à répondre aux besoins commerciaux des deux pays, mais à être utilisé par le Corps des Gardiens de la Révolution et les milices chiites appuyées par la force Qods. Ainsi, Muhammad Nuri Abed-Rabbo, haut responsable de la faction al-Nasr dirigée par l’ancien Premier ministre irakien Hayder al-Abadi, a exprimé, dans une interview accordée au quotidien, une ferme opposition au projet, qu’il a qualifié de dangereux pour la sécurité irakienne et ses intérêts économiques. Il a donc appelé à une discussion approfondie des implications du projet, plaçant les intérêts de l’Irak au-dessus de ceux de l’Iran. Il l’a décrit comme conçu pour renforcer le contrôle iranien sur une partie du territoire irakien et l’a défini comme faisant partie de la vision iranienne du «croissant chiite».

Harakat Hezbollah al-Nujaba

L’administration américaine est apparemment consciente du danger naissant, émanant de l’Iran et des milices chiites à son service et a donc choisi d’inclure dans la liste des sanctions, au début du mois de mars 2019, la milice chiite irakienne d’al-Nujaba‘, soutenue par la force Quds. Même si elle a pris part aux combats contre l’Etat islamique en Irak, les principales activités de cette milice ont été menées en Syrie, où elle a joué un rôle majeur dans les activités militaires pro-iraniennes. En janvier 2019, le président Trump aurait demandé à l’Irak de dissoudre les 67 milices chiites qui constituent les «forces de mobilisation populaires» (al-Hashd al-Sha’abi), une initiative qui a conduit à des menaces de la part des milices chiites irakiennes contre les forces américaines en Irak. Compte tenu de cette vulnérabilité en Irak, les États-Unis ne peuvent pas poursuivre activement les conséquences de cette demande.

La promotion du projet d’autoroute Téhéran-Damas pourrait renforcer la présence iranienne en Irak et en Syrie et contredire directement les intérêts américains dans la région. L’administration et le Congrès devraient donc envisager des mesures visant à déjouer le projet, en exerçant de fortes pressions sur le gouvernement irakien dirigé par le Premier ministre Adel Abd al Mahdi. Faire avorter le projet servirait la politique américaine en Irak, qui vise à renforcer la souveraineté irakienne, comme l’a expliqué le secrétaire d’Etat Pompeo lors d’une conversation téléphonique avec Abd al-Mahdi en début mars.


Les documents géopolitiques de JISS sont publiés grâce à la générosité de la famille Greg Rosshandler.


photo: Google Maps

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Dr. Yossi Mansharof

Jérusalem Institue For Strategy and Security,

 

Expertise : Iran révolutionnaire, islam chiite politique, réseaux transnationaux chiites.

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Ratfucker

Les mollahs peuvent compter sur les Kurdes et les terroristes de Daesh résiduels pour transformer cette autoroute en coupe gorge. Sans compter les ponts et tunnels à portée des fusées israéliennes. La distance de Téhéran au Golan est de 1.500 km: combien de camionneurs en reviendront vivants?

Asa

N’est ce pas les clergés iraniens ont des ambitions conquérants, mais dans cette ambition d’origine religieuse le peuple iranien sont volontairement oublié. L’islam n’a jamais rien apporté à l Iran sauf malheure .