La paix ne se décrète pas. Au bout de 75 ans, ce principe qui est volontairement ignoré a été la raison de tous les échecs sur ce sujet. Ni l’Arabie saoudite, ni les États-Unis, ni l’Europe, encore moins la Chine ou d’autres n’y changeront rien.
Le problème, et éventuellement la solution, ce sont les Palestiniens eux-mêmes. Ils sont LE problème, par leur désunion, la haine qui les gangrène entre eux et leur incapacité à voir un avenir de paix, tant la violence reste leur premier réflexe pour régler leurs problèmes internes et externes. Le seul à avoir plus ou moins réussi à les fédérer était Yasser Arafat, d’où les petites avancées. Mais, lui-même était sous la pression des extrémistes palestiniens, des frères musulmans, et de ceux qui ont cherché à les gouverner à bon compte, comme d’abord la Jordanie et l’Égypte, qui ont transmis le fardeau au Qatar, à l’Arabie saoudite, aux Émirats, et à ceux en capacité de financer cette cause perdue d’avance.
Le règne déclinant d’un Mahoud Abbas, devenu sénile, va lever le voile sur les guerres fratricides qui vont finir par achever la cause palestinienne. Ce qui se passe au Liban, dont les médias ne parlent surtout pas, avec le risque de fermeture de l’important camp palestinien d’Aïn el-Héloué, après celui de Syrie, et sans doute ceux de Jordanie, va mettre un terme à l’illusion entretenue de manière éhontée, relative à un retour qui n’aura jamais lieu. Comme d’habitude, les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent. Ce qui se passe en ce moment au Liban résume bien cette situation et indique explicitement pourquoi la paix avec ce que l’on appelle les Palestiniens est et restera impossible.
La succession de Mahmoud Abbas, véritable enjeu des derniers affrontements à Aïn el-Héloué
Jusqu’à aujourd’hui, le Hezbollah était convaincu que les développements à , notamment les deux rounds armés en juillet et en août, ne s’inscrivent pas dans le cadre d’un vaste plan régional visant à fermer les camps de réfugiés palestiniens au Liban pour porter un coup fatal à leur droit au retour. Cette approche est certes possible, estiment les cadres du parti, mais pour l’instant, il n’y a pas d’indices concrets permettant de la confirmer.
Pour le Hezbollah, les affrontements dans le camp de Aïn el-Héloué restent limités à un conflit interpalestinien avec des dimensions arabes régionales. Certes, dans tout ce qui touche aux réfugiés palestiniens, les enjeux régionaux ne sont jamais très loin et ce qui s’est passé à Aïn el-Héloué ne peut qu’être lié aux équilibres dans la région, d’autant que chaque partie palestinienne bénéficie d’un appui arabe différent.
Par exemple, traditionnellement, le Fatah, principale composante de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), est appuyé par l’Égypte, alors que le Hamas, né bien après l’OLP, est appuyé par le Qatar et la Turquie, puisqu’il évolue dans la mouvance des Frères musulmans.
Mais même au sein du Fatah, il existe plusieurs courants qui sont d’obédiences différentes. À Aïn el-Héloué, par exemple, les partisans du Fatah sont divisés en trois groupes.
Le premier est lié directement au commandement traditionnel et à l’Autorité palestinienne et dont le leader est pratiquement Fathi Abou al-Ardate, chef de ce qu’on appelle la sécurité nationale.
Le second est sous la direction du fameux « Lino », surnom de Mohammad Abdel Hamid Issa, commandant du Kifah al-Moussallah (la lutte armée), et il s’inscrit dans la mouvance de l’ancien chef des SR palestiniens Mohammad Dahlan, désormais appuyé par les Émirats arabes unis.
Le troisième est mené par l’ancien chef militaire du Fatah, Mounir Maqdah, qui s’est rapproché ces dernières années de la mouvance islamiste.
Selon des sources palestiniennes, la véritable cause du déclenchement des affrontements en juillet – en dehors des frictions sur le terrain, qui constituent les motifs concrets du lancement des hostilités – est le fait que la succession du président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas est désormais clairement ouverte, en raison de son état de santé. Or, il existe une idée courante chez les Palestiniens qui dit que le fait de contrôler le camp de Aïn el-Héloué, la plus grosse agglomération populaire palestinienne en dehors de la Palestine, est un élément de force dans la lutte pour la direction du Fateh, voire de la succession de Mahmoud Abbas lui-même.
Or, depuis quelque temps, le Fatah traditionnel a vu son influence baisser au sein de ce camp pour différentes raisons, dont justement la présence des groupes islamistes qui ont, à différentes périodes, été appuyés par plusieurs États du Golfe, comme les Émirats, le Qatar… On parle même de l’Arabie saoudite et de la Turquie.
Avec la fermeture du camp palestinien de Yarmouk près de Damas, les combattants palestiniens, appartenant généralement à la mouvance islamique, se sont réfugiés à Aïn el-Héloué . Ils ont aussi commencé à grignoter l’influence du Fatah, d’abord en augmentant le nombre de leurs partisans et ensuite en infiltrant le Fatah lui-même.
Plusieurs incidents ont précédé le déclenchement des hostilités, d’abord une attaque contre une figure importante de la mouvance islamique, suivie de l’assassinat d’un responsable du Fatah dans le camp, Abou Achraf al-Armouchi, avec quatre de ses compagnons. En principe, dans les négociations qui ont suivi le premier round, il avait été convenu de remettre aux autorités libanaises les auteurs des deux crimes.
Même si les représentants des groupes islamistes avaient assuré que ce ne sont pas leurs partisans qui ont organisé l’assassinat d’al-Armouchi, mais plutôt une troisième partie dans le but justement de provoquer des combats entre eux et le Fatah. Toutefois, cette version n’a pas pu être confirmée et l’assassinat d’al-Armouchi n’a pas été revendiqué par une partie précise.
Les négociations se sont poursuivies sur fond de combats et de destructions et, finalement, elles ont abouti à un cessez-le-feu conditionné par la livraison des coupables aux autorités libanaises. Cette condition n’ayant pas été remplie, les combats ont éclaté pour un second round qui a duré quelques jours et les combats se sont arrêtés sur un accord qui reprend la même condition : livrer les coupables aux autorités libanaises. En principe, cette condition doit être remplie avant la fin du mois de septembre. Mais, jusqu’à présent, rien n’indique qu’elle sera respectée.
Selon les sources palestiniennes précitées, tant que le problème du contrôle du camp de Aïn el-Héloué n’est pas réglé, toute trêve reste précaire. Or, jusqu’à présent, il est clair qu’aucune des deux parties en conflit, à savoir le Fatah et les groupes islamistes, n’a pu éliminer l’autre du camp ou en tout cas y imposer son autorité. De plus, un nouvel élément est apparu et il consiste dans le rôle nouveau donné au Hamas dans les négociations pour aboutir à un cessez-le-feu.
Jusqu’à récemment, le Hamas n’avait pas une influence considérable à Aïn el-Héloué, n’ayant pas de véritables positions militaires dans ce camp. Le mouvement islamiste s’est en effet, installé dans le camp après avoir été chassé de Syrie (en 2008) et il a fallu d’immenses efforts de la part de l’Iran et du Hezbollah pour pacifier les relations avec cette organisation, qui ne devait pas se lancer dans des conflits avec les autres composantes palestiniennes. Désormais, le Hamas s’impose comme un élément important des négociations et cette organisation est considérée comme la représentante des groupes islamistes.
Toujours selon les sources précitées, le Qatar s’est ainsi introduit en force dans le dossier de Aïn el-Héloué et grâce au Hamas il est devenu incontournable dans ce camp. Pour certains, cette nouvelle donne pourrait compliquer les négociations. Cependant, pour d’autres, au contraire, elle devrait faciliter le retour au calme, car il y a dorénavant une autorité à laquelle on peut recourir en cas de reprise des accrochages.
Le test véritable aura lieu à la fin du mois, mais, toujours selon les mêmes sources, si une des parties concernées se sent assez forte pour imposer son autorité sur le camp, elle n’hésitera pas à le faire. Cependant, il est de plus en plus clair qu’aucune partie n’est en mesure de faire cela. Aïn el-Héloué, comme le reste du Liban, voire la plupart des pays de la région, est dans une phase de préparation du terrain pour les solutions… ou pour les conflits à venir.
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