Michaël Bar Zvi, chroniqueur à Radio J
Les récentes échéances électorales dans plusieurs pays occidentaux ont dévoilé une réalité que l’on soupçonnait depuis quelque temps. Les démocrates ont un problème avec la démocratie, et on se demande s’ils n’envisagent pas d’en changer les règles afin que les résultats correspondent à leurs attentes.

Les fondements de la démocratie sont simples, même si elle connaît des régimes divers à travers le monde. L’essence de la démocratie est qu’il s’agit avant tout d’une méthode pour traduire la volonté générale d’un groupe, nation ou fédération de peuples, à travers le choix de représentants ou de leaders. Le principe de cette méthode est que les règles sont connues et acceptées à l’avance par les participants.

L’autre fondement de la démocratie est la séparation des pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le juridique. La publication des résultats officiels d’une élection implique qu’ils sont validés sur le plan juridique et politique. On peut être déçu du résultat, mais le contester revient à remettre en cause les bases de la démocratie, à savoir l’égalité absolue entre les voix des électeurs, et l’idée que la personne et le parti élus obtiennent la charge de gérer les affaires. Si l’on rejette ces principes, parce que le résultat n’est pas politiquement correct, ou parce qu’il exprime des idées que l’on ne partage pas, on met en danger la démocratie et on prépare l’avènement d’une dictature ou d’une tyrannie.

L’histoire a montré que le jeu démocratique pouvait être instrumentalisé par des ennemis de la démocratie, et c’est la raison pour laquelle il est indispensable que la pensée politique lui fournisse des garde-fous contre de telles dérives.

Il ne suffit pas de dénoncer le populisme, la démagogie ou l’intolérance pour répondre aux questions qui inquiètent les sociétés occidentales aujourd’hui. Prononcer de tels anathèmes ne sert qu’à couvrir de honte les électeurs tentés par ces populistes et démagogues et à exacerber leur dégoût de la politique.

De plus, et cela explique les erreurs monumentales des instituts de sondages, cette délégitimation imposée par une pensée dominante instaure de facto une forme d’auto-censure qui encourage le vote de rejet. Plus ce qu’ils croient est illégitime aux yeux des bien-pensants, plus ils seront enclins à cacher leurs intentions. Le pire n’est pas la colère des perdants, que l’on peut comprendre, mais le réel danger pour la démocratie c’est l’arrogance des élites à l’égard des petits, des faibles.

Descartes se trompait peut-être lorsqu’il écrivait que le bon sens est la chose la mieux partagée, car la bêtise est tout aussi répandue. Rien de plus méprisable que de croire à la supériorité de son intelligence, que l’on soit journaliste ou philosophe. L’erreur est humaine dit-on, mais elle devient une faute morale lorsqu’on refuse de la reconnaître.

Le résultat des dernières consultations par les urnes en Israël, en Angleterre, aux Etats-Unis, a démontré l’inanité des analyses politiques et surtout révélé qu’elles ne rendaient plus compte de la réalité. Il sonne le glas du politiquement correct et d’une domination culturelle en fin de règne, mais qui continue à sévir dans nos sociétés profondément divisées. La politique peut et doit sauver, si elle est capable de sortir du carcan dans lequel quelques intellectuels dogmatiques l’ont placée.

Les démocraties modernes ont inventé leur propre instrument de destruction, et en soi cela ne serait pas si grave si elles laissaient le champ libre à un autre régime garantissant la liberté. Mais elles musèlent les libertés en imposant le politiquement correct, la moralité factice des belles âmes et le vivre-ensemble de surface. Enfin et, ce n’est pas le moindre, elles ne combattent pas les idées de leurs adversaires, mais humilient ceux qui les portent ou les partagent.

Michaël Bar-Zvi   

RADIO J/Chronique du 17 novembre 2016

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