Principale pierre d’achoppement dans les négociations de paix avec la Palestine, l’exigence formulée par Benyamin Nétanyahou n’est pas partagée par tous ses compatriotes. POUR •

Une condition incontournable de la paix

—Ari Shavit—Ha’Aretz (extraits) Tel-Aviv
L’ancien chef du Mossad renseignements israéliens »>Article original Meïr Dagan estime que l’exigence de reconnaître Israël comme Etat juif est un non-sens. Ce n’est pas un non-sens, mais l’exigence la plus naturelle et légitime possible. Pour quatre raisons.

Première raison : le conflit israélo-palestinien n’a pas débuté en 1967 et il ne concerne pas que l’occupation et les implantations colonies »>Article original. C’est un conflit national, religieux, culturel et social profond qui repose sur l’aveuglement. Pendant des décennies, le sionisme a refusé de voir le peuple palestinien et, ce faisant, son droit à un Etat palestinien. Le mouvement national palestinien refuse encore de voir le peuple juif et, ce faisant, son droit à un Etat juif. C’est ce double aveuglement persistant qui est à la base de la guerre de cent ans entre eux et nous. Pour mettre un terme à cette guerre, nous devons reconnaître leur identité nationale et leur Etat, et ils doivent reconnaître notre identité nationale et notre Etat.

Deuxième raison : la grande réussite des accords d’Oslo 1993″>Article original a été d’amener les Israéliens à reconnaître qu’il existe dans ce pays un peuple palestinien avec des droits légitimes. La grande réussite du sommet de Camp David 2000″>Article original a été la reconnaissance par Israël de la nécessité d’un Etat palestinien. Les résultats cumulés d’Oslo et de Camp David ont débouché sur une révolution israélienne. Le peuple vivant à Sion a finalement vu qu’il existe dans ce pays un autre peuple et admis son droit à un Etat exprimant son droit à l’autodétermination. Dès lors, il n’y a pas de raison que le peuple vivant en Palestine ne puisse ouvrir les yeux, voir qu’il se trouve en ce pays un autre peuple et reconnaître son droit à un autre Etat exprimant son droit à l’autodétermination. Ceux qui pensent qu’Israéliens et Palestiniens sont égaux ont le devoir moral d’exiger des Palestiniens exactement ce qu’ils exigent des Israéliens.

Troisième raison : les Palestiniens ne renonceront jamais à leur exigence du droit au retour. La Nakba exode palestinien de 1948 suite à la première guerre israélo-arabe »>Article original est leur traumatisme fondateur et le statut de réfugiés est l’expérience qui les a forgés. Aucun dirigeant palestinien ne déclarera jamais que les Palestiniens ne reviendront jamais dans les villes et les villages qu’ils ont perdus en 1948. S’il y a une solution au problème des réfugiés, elle ne sera jamais que superficielle. Mais, comme il est effectivement impossible d’exiger des Palestiniens qu’ils changent de peau et convertissent leur identité, il est permis d’exiger qu’ils reconnaissent ceci : le peuple juif est un peuple de ce pays et il n’est pas venu de la planète Mars. Ils doivent admettre que le peuple juif a sa propre histoire, sa propre tragédie et sa propre légitimité. Il n’y aura pas de paix si les enfants qui grandissent à Deheisheh camp de réfugiés palestiniens, en Cisjordanie »>Article original ne savent pas que l’Etat de l’autre côté de la frontière est l’Etat juif légitime d’un peuple juif réel.

Quatrième raison : un accord de paix israélo-palestinien est dans une large mesure un accord unilatéral dans lequel Israël donne et les Palestiniens reçoivent. Seule la reconnaissance d’Israël comme Etat juif peut transformer cet accord tant attendu en acte bilatéral. Tandis qu’Israël cédera à son voisin des actifs réels, des territoires et des droits souverains, les Palestiniens feront à Israël le seul don qu’ils sont en mesure de faire : la légitimité. Sans reconnaissance par les Palestiniens de notre nom, de notre identité et de nos droits, il n’y aura pas de paix.

—Ari Shavit
Publié le 13 février

CONTRE •

L’étincelle qui mettrait le feu aux poudres
—Roy Isakowitz—Ha’Aretz (extraits) Tel-Aviv

Un Etat qui s’arroge le droit d’intervenir en faveur de ses “compatriotes” ethniques, où qu’ils se trouvent, cela n’a rien de neuf. L’Histoire a été témoin des conséquences d’une telle prétention. L’exemple le plus célèbre fut l’occupation des Sudètes par Adolf Hitler, sous prétexte de sauver les Allemands ethniques Volksdeutsche »>Article original de Tchécoslovaquie de leur détresse. Ce fut l’un des facteurs clés dans le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale.

NDLR – Stupide ! Tout état, a pour obligation de défendre les intérêts de ses concitoyens, et du peuple dont il est l’incarnation. L’exemple est outrageant volontairement pour valider une thèse qui ne tient pas la route. Hitler a voulu tester les Européens et a constaté leur lâcheté. Israël s’est quant à elle retirée de plusieurs territoires, alors qu’il aurait pu imposer la paix du vainqueur.

Plus près de nous, le président russe, Vladimir Poutine, a envahi et annexé la péninsule de Crimée sous le prétexte officiel de protéger les Russes ethniques contre les agressions supposées d’un gouvernement néofasciste installé à Kiev. Les arguments invoqués par Poutine sont intéressants, dès lors qu’ils se basent sur deux concepts qui ne sont pas inconnus dans notre partie du monde : la revendication de droits historiques sur un territoire relevant d’une autre souveraineté et le droit affirmé à intervenir en faveur de “compatriotes” ethniques vivant dans un autre pays.

Fait suffisamment inhabituel pour être souligné, Israël est resté silencieux quant à l’occupation de la Crimée par la Russie. Il s’agit sans doute d’une position diplomatique habile, Israël n’ayant rien à gagner à s’aliéner quelque belligérant que ce soit, et n’ayant pas davantage de leçons de morale à donner.

NDLR – C’est là manifestement du hors sujet. Comparaison n’est pas raison. Rappelons de plus que le peuple palestinien n’a jamais existé, ce qui n’est pas le cas d’Israël. C’est par le seul bon vouloir d’Israël que cette reconnaissance peut se concrétiser.

Néanmoins, ce silence a quelque chose d’inconfortable et d’embarrassant. Si l’on remplaçait “Russie” par “Israël” et “Crimée” par “Palestine”, le discours de Poutine devant la Douma aurait pu être prononcé par Nétanyahou. A présent, la Russie réaffirme qu’elle ne lèvera pas sa menace d’attaquer l’Ukraine orientale tant que les Ukrainiens n’auront pas adopté le fédéralisme et accordé une large autonomie aux provinces abritant d’importantes communautés russes ethniques. En d’autres termes, l’existence de Russes ethniques donne à la “mère patrie” le droit de déterminer la structure et le fonctionnement d’un gouvernement étranger et souverain.

Imaginez que la Chine s’arroge le même droit d’ingérence. Selon la doctrine Poutine – et donc, selon la doctrine Nétanyahou, toute menace réelle ou supposée envers les Chinois ethniques dans la dizaine d’Etats voisins suffirait à justifier une intervention militaire de Pékin. Il n’y a pas et il ne peut y avoir de correspondance absolue entre un Etat-nation moderne et un groupe ethnique. Toute tentative par un Etat-nation d’étendre sa juridiction à ses “compatriotes” ethniques au-delà de ses frontières est un défi lancé au fragile équilibre du système international.

C’est dans ce contexte qu’il faut replacer non seulement la crise actuelle entre la Russie et l’Ukraine, mais aussi et surtout l’exigence formulée par Nétanyahou à l’adresse des Palestiniens pour qu’ils reconnaissent Israël comme foyer national juif. En refusant le 10 mars dernier »>Article original cette exigence, Mahmoud Abbas le président palestinien »>Article original exerce son droit souverain et évite à toute la communauté internationale de devoir avaliser un précédent éminemment dangereux.

Les Nations unies représentent des Etats, pas des groupes ethniques. Aucun membre de l’ONU n’a jamais exigé d’être reconnu comme entité nationale et encore moins comme entité ethnique. L’ONU ne fonctionne pas et ne peut fonctionner sur une telle base. L’exigence de Nétanyahou pourrait être l’étincelle qui mettrait le feu aux poudres d’un système international laborieusement mis en place depuis la Seconde Guerre mondiale.

Sa reconnaissance en tant qu’Etat juif donnerait de facto à Israël le droit d’intervenir dans les affaires de tout Etat où il estime que la communauté juive est discriminée. Pas dans le cadre d’un consensus international, mais simplement parce qu’Israël représenterait les Juifs où qu’ils soient. Ce n’est un gage ni de paix ni d’harmonie.

NDLR – Tout état

—Roy Isakowitz

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