Immobilier : les promoteurs chinois menacent le monde d’une nouvelle crise de « subprimes »
Kaisa, un promoteur de Shenzen, a suspendu sa cotation à Hong Kong parce qu’il se trouve en risque de défaut de paiement. Après la défaillance d’Evergrande, le géant asiatique de l’immobilier, la menace d’un nouveau « krach subprime » chinois se précise et toucherait alors la planète toute entière ( on parlerait de près de 1000 milliards de dollar.)
Que les promoteurs immobiliers fassent faillite relèverait normalement de l’accident local auquel la plupart des dirigeants occidentaux donneraient assez peu d’importance. Seulement, quand on sait que les professionnels de l’immobilier chinois se sont mis à spéculer comme des laquais sur des champ de course et qu‘ils l’ont fait avec de l’argent emprunté à l’étranger, à New-York comme à Londres ou à Paris, certaines institutions financières occidentales commencent à paniquer. L’immobilier chinois représente des milliards de dollars américains, européens, saoudiens ou qataris investis depuis une dizaine d’années.
Et le marché Chinois est devenu fou par la spéculation, les promoteurs immobiliers ont construit à tout va, encouragés par le gouvernement, et maintenant les plus gros promoteurs ont du mal à honorer leurs engagements.
Ça ressemble étrangement à ce qui s’était passé en 2009 au départ des États-Unis. Noyés sous les crédits immobiliers, le système financier a craqué, et en craquant, il a entrainé le monde entier qui avait acheté de la dette subprime titrisée. Les Chinois sont en train de faire la même chose.
Fin août, 623,5 millions de mètres carrés de logements étaient invendus, soit 11,4 millions de mètres carrés de moins par rapport au mois précédent.
Le marché chinois de l’immobilier a été tellement dominé par la spéculation que la plupart des grands promoteurs menacent de craquer.
A la veille de ce week-end, c’est Kaisa, un promoteur chinois qui a été obligé de suspendre sa cotation à la Bourse de Hong-Kong, ainsi que la cotation de toutes ses filiales, parce qu’il n’a pas pu honorer le remboursement de sa dette. On saura la semaine prochaine si les autorités chinoises lui ont trouvé une solution.
Le groupe chinois n’a donné aucune explication. Ce que l’on sait simplement, c’est que ce groupe a été dans l’incapacité d’honorer un remboursement de garantie sur des produits de gestion de patrimoine. En termes clairs, on est exactement dans le logiciel des subprimes. Le promoteur a emprunté de l’argent. Cet argent a été titrisé, et la dette a été vendue aux quatre coins du monde, là où il y a de l’épargne disponible et liquide : en Occident. Du coup les banques prêteuses ont pris peur et le titre en bourse a chuté.
Il a chuté d’autant plus violemment que le groupe chinois avait indiqué, dans les jours précédents, être en face « d’une pression sans précédent sur ses liquidités ». Ce qui a entrainé un abaissement de la notation par les grandes agences internationales, dont Fitch.
Cette affaire survient dans un climat déjà plombé par les difficultés du numéro un de l’immobilier chinois Evergrande. Depuis deux mois, ce promoteur, qui est le plus important d’Asie, court apres les liquidités pour faire face à l’obligation de payer des coupons à ses banquiers internationaux. La semaine dernière, le groupe Evergrande a réussi in extremis à honorer une échéance de 45 millions de dollars. Et il a pour la troisième fois évité le défaut de paiement.
Ce groupe est plombé par une dette abyssale de 300 milliards de dollars. Il vient de réussir à boucler son échéance de 45 millions, mais d’autres échéances vont forcément continuer à défiler. Une semaine auparavant, le groupe a repoussé une échéance de 85 millions de dollars pour laquelle il a demandé un délai de grâce.
Depuis six mois maintenant, le groupe est toujours en retard pour payer ses intérêts.
Ce qui passe vraiment mal dans l’affaire Evergrande, c’est que non seulement le groupe est très endetté auprès des institutions étrangères et doit livrer des appartements à des milliers de Chinois, mais son président et fondateur rechigne à mobiliser sa fortune personnelle pour éponger une partie de sa dette, alors qu’il continue de s’attribuer des dividendes plantureux. Au cours des douze dernières années, Hui Ka Yan, c’est son nom, aurait touché plus de 7 milliards de dollars en revenus, alors que sa participation au capital reste minime. Alors que l’entreprise reste écrasée par la dette et par le ralentissement de l’activité.
Les autorités chinoises ne cachent pas le risque d’une faillite qui aurait alors des effets systémiques : sur l’économie chinoise, sur la croissance et sur l’équilibre financier de beaucoup d’institutions étrangères.
C’est la raison pour laquelle les difficultés de Kaisa ont crédibilisé cette descente aux enfers. Mais tout le monde est convaincu que le 1er trimestre de l’année prochaine sera très compliqué, à moins que le gouvernement chinois n’intervienne pour éviter une crise qui ferait plus de dégâts financiers que la crise du Covid.
Pour l’instant, Pékin n’a pas réagi mais les grands acteurs de l’immobilier chinois comptent leurs jours. Ils se mettent à l’abri mais ils auront du mal à échapper à la tempête. Ou alors ils bluffent.
ATLANTICO