Les Frères musulmans ont réussi leur coup : une énorme affluence – plus de 150 000 personnes, paraît-il – à leur 33ème Rassemblement annuel des musulmans de France (RAMF), qui s’est tenu du 13 au 16 mai, comme d’habitude au Bourget, sous l’égide de leur appellation hexagonale, l’Union des organisations islamiques de France (Uoif). Le RAMF peut s’enorgueillir d’être la plus grande manifestation musulmane d’Europe. De conférences-débats en meetings, l’Uoif tisse ainsi d’année en année la toile des Frères musulmans à travers la France.

Se sachant dans le collimateur de ceux qui combattent l’islamisme, c’est-à-dire de l’islam politique, les organisateurs avaient renoncé in extremis à faire intervenir les prédicateurs les plus sulfureux et obscurantistes de leur mouvance.

Mais l’incontournable Tariq Ramadan était évidemment à l’honneur. Tout comme les tenues dites «pudiques», qui dominaient largement chez les femmes, le plus souvent voilées mais dont les plus zélées étaient revêtues du sinistre jilbab noir. Ce même jilbab sous lequel s’étaient dissimulées un groupe de Femen qui s’en sont soudainement débarrassées en grimpant sur la tribune pour le coller sur la tête de Frère Tariq. Coup d’éclat qui a certainement dû choquer les braves jeunes filles qui tenaient le stand de l’association Coexister – spécialisée dans le vivre-ensemble des bigoteries –, lesquelles portaient pratiquement toutes le voile et donnaient du «ma sœur» par-ci, du «ma sœur» par-là à toutes celles qui passaient à leur portée dès lors qu’elles étaient elles aussi affublées d’un voile, et plus encore si ce gage de «modestie» recouvrait la chevelure de bonnes petites françaises du terroir. La frérosphère a de solides alliés qui coexistent en toute quiétude avec l’islam intégriste.

Il y eut au Bourget des débats, l’un évoquant la nécessité pour les musulmans de s’engager sur les questions politiques, un autre questionnant la notion d’ «islam français». Passons sur les réponses des intervenants, assurant bien entendu que leur religion avait toujours su se plier aux différents contextes et périodes dans lesquels elle se développait.

Car l’intéressant, le plus intéressant, était ailleurs. Très exactement dans le bâtiment consacré aux activités commerciales. Celui où, entre autres, les époux musulmans pouvaient choisir de riants burkinis pour madame, des produits halal pour la barbe de monsieur, et où les célibataires avaient l’occasion de s’inscrire à une agence matrimoniale strictement labellisée musulmane. Ce bâtiment accueillait aussi et surtout un vaste espace consacré aux livres, et c’est dans les rayons des librairies que s’exposait une partie essentielle de l’orientation politique réelle de ce grand raout de l’islamisme.

Quelle littérature y trouvait-on ? Evidemment les ouvrages de Tariq Ramadan, mais aussi de Hassan al-Banna, son grand-père et fondateur des Frères musulmans, de son père Saïd Ramadan qui en avait pris le relais, de Youssef al-Qaradâwî, théologien ultra-fondamentaliste. D’autres aimables auteurs prônant fermement la charia étaient bien en vue sur les rayonnages. Rien, au fond, que de très normal.

Plus remarquable, en revanche, était la quantité de livres d’auteurs français de l’ultra-droite antisémite. Etaient ainsi proposés au chaland du Maurice Bardèche, grand collabo devant l’Eternel, du Roger Garaudy, fine fleur du négationnisme, sans oublier Paul-Eric Blanrue avec son «Jean-Marie, Marine et les Juifs», le national-socialiste Alain Soral et les ouvrages que publie la société d’édition qu’il dirige, Kontre Kulture, ainsi que de nombreux autres auteurs moins connus du public comme Anne Kling, Webster Tarpley, Christophe Oberlin… Bref, négationnisme et conspirationnisme antisémites étaient représentés en force, tout ce petit monde partageant comme il se doit la dénonciation du fameux «complot sioniste».    

Cette littérature écœurante n’est pas tombée du ciel dans les présentoirs. Il a bien fallu que les éditeurs jugent utile de l’y proposer, et que les responsables des librairies (les deux principales étant liées à l’Uoif) l’acceptent. A moins que ce ne soit l’inverse, les  libraires du RAMF sollicitant des éditeurs se faisant une joie d’envoyer leurs livres. 

Toujours est-il que ces ouvrages ont bénéficié au Bourget d’une exposition que leurs maisons d’édition n’auraient osé espérer même dans leurs rêves les plus fous. Mieux qu’à n’importe quel minable anniversaire de Rivarol, mieux qu’aux fêtes des «Bleu-Blanc-Rouge» de la grande époque de Jean-Marie Le Pen. Là ce sont plusieurs dizaines de milliers de personnes qui pouvaient se procurer la crème de la propagande d’extrême droite.

Pour que cela se sache, il a fallu la présence sur place des observateurs attentifs du site Ikhwan Info, qui suit de près l’islam politique et les activités des Frères musulmans (et dont proviennent les photos illustrant cet article). Les internautes ont ainsi rapidement été informés à travers les réseaux sociaux de la place accordée à la lie de l’antisémitisme durant le Rassemblement annuel des musulmans de France.

Les lecteurs du Monde, de Libération ou de La Croix, eux, n’en sauront rien. Leurs envoyés sur place étaient du genre très spécial : ils n’en ont soufflé mot dans leurs articles respectifs. Et pourtant dans celui de Libération étaient précisément évoqués les stands des libraires «historiques», avec indication de leurs «difficultés» à la suite des attentats jihadistes de novembre. Il paraît même, à en croire ce même article, que «pas mal d’intellectuels musulmans ont l’habitude de faire le tour des libraires», à l’instar de Tareq Oubrou, le recteur de la Grande mosquée de Bordeaux. Ils n’ont apparemment pas remarqué toute cette littérature crapuleuse.

Sans vouloir blesser personne et en toute modestie, nous conseillons à ces quotidiens de faire couvrir le prochain RAMF par des journalistes. Car hélas pour vos lecteurs, le week-end dernier La Croix, Libé, Le Monde vous n’avez rien vu au Bourget.

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André

Ni Libé, ni Le Monde et encore moins La Croix (des juifs?) n’en parlent car il ne faut surtout pas stigmatiser ces pauvres petits musulmans à l’enfance malheureuse, innocentes créatures discriminées… n’est pas monsieur Plenel ?

BERNARD Gilbert

que la presse n’a pas vus : Je me permets de rectifier le titre, il fallait écrire N’ONT PAS VOULU VOIR.

Ces journaleux-là sont assez doués pour aller dénicher ce qu’ils subodorent comme contraire à leurs ideos (pas idéaux), mais ils se garderaient bien d’enquêter sur ce qui pourrait leur être contraire à leurs objectifs.

Ce ne sont pas des journaleux de recherche ou d’inspection, mais plutôt d’ INQUISITION, et quand ils ne veulent pas voir, ils se font ou se déclarent aveugles.

disraeli

Et pourquoi le Parquet ne s,est-il pas saisi, ni spontanément, ni à la requête du Garde des Sceaux ? Voilà comment on applique les lois sur l’antisémitisme en France.
Du bla-bla qui satisfait les instances communautaires sortant de l’Élysée ou de Matignon et rien de concret !