En Israël, compte à rebours de la chute du gouvernement de Naftali Bennett.

Stop ou encore ? En Israël, un an après sa formation, la coalition hétérogène du Premier ministre, Naftali Bennett, enchaîne les déboires. Après avoir perdu sa courte majorité en avril, en passant de 61 à 60 sièges, son gouvernement a essuyé, lundi, deux nouveaux camouflets lors de votes cruciaux à la Knesset.
Peut-il encore gouverner le pays ? La question est sur toutes les lèvres en Israël, où la fragile coalition du Premier ministre, Naftali Bennett, composée de deux partis de gauche, deux du centre, trois de droite et de la formation conservatrice arabe Raam, est sur le point d’imploser.
Au point que certains médias locaux commencent à sérieusement envisager l’organisation prochaine de nouvelles élections législatives, les cinquièmes depuis 2019. Précisément ce que cette coalition avait promis d’éviter.
Sauf que le gouvernement formé par le leader nationaliste Naftali Bennett et le centriste Yaïr Lapid, en juin 2021, uni par la seule volonté de chasser l’inamovible ex-Premier ministre Benjamin Netanyahu du pouvoir, est privé de majorité au Parlement depuis le 4 avril. Ne disposant plus que de 60 sièges sur 120, soit autant que l’opposition, il essuie depuis revers sur revers à la Knesset, dont deux rien que lundi 6 juin.
Réunissant une majorité de voix contre un projet de loi visant à proroger l’application de la loi israélienne aux Juifs de Judée Samarie, l’opposition a infligé un camouflet à Naftali Bennett – alors même que le Premier ministre est également le chef d‘un parti devenu le porte-étendard des Juifs de Judée Samarie.
Le camouflet reste symbolique : le projet de loi pro-colons devrait finir par être voté, car l’opposition de droite, dirigée par Benjamin Netanyahu, avait annoncé vouloir uniquement marquer sa défiance envers le gouvernement. Et prouver surtout que la coalition de Naftali Bennett ne peut ni diriger le pays, ni faire voter des lois tant il est affaibli.
« Bennett, rentrez chez vous. C’est terminé, a lancé le Likoud de Benjamin Netanyahu, dans un tweet publié après le vote. Il est temps de rendre Israël à la droite ».

« Ceux qui ne peuvent pas vivre avec cette coalition doivent partir »

Mais le plus inquiétant pour la coalition, c’est que lundi soir, deux de ses membres, Mazen Ghanaim, un député du parti arabe conservateur Raam, et Ghaida Rinawie Zoabi, une députée de la formation de gauche Meretz, ont voté contre le projet de loi. Les trois autres élus du parti Raam et l’électron libre Idlit Sliman, du propre parti de Naftali Bennett, Yamina, n’étaient pas présents lors de la séance.
Pourtant, le ministre de la Justice Gideon Saar, qui avait supervisé le texte de loi, avait prévenu avant le vote qu’il s’agissait d’un test vital pour la survie de la coalition et de la loyauté de ses membres. En vain : l’opposition a réuni au total 58 voix, contre 52 pour la coalition.
« La situation du gouvernement Bennett est critique, explique David Khalfa, chercheur à l’Observatoire de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient de la Fondation Jean-Jaurès. Sa coalition inédite, qui était traversée depuis sa création par des antagonismes idéologiques assez puissants et des sensibilités très opposées, n’a survécu jusqu’ici que par la crainte de voir revenir au pouvoir un certain Benjamin Netanyahu. Mais les failles qui sont apparues ces derniers mois en son sein sont devenues de plus en plus béantes ces derniers jours, et pas seulement sous la pression de la droite nationaliste ».
« Ceux qui ne peuvent pas vivre avec cette coalition doivent partir », a grondé, mardi, le ministre des Affaires étrangères, Yaïr Lapid, lors d’un entretien télévisé, en référence aux deux parlementaires qui ont voté contre le projet de loi. Ambiance…

Un Premier ministre « qui n’a même pas la mainmise sur son propre camp »

Lundi, après minuit, c’est un autre vote qui a montré les limites de cette coalition. Précisément celui qui devait valider la reconduction du député Matan Kahana au poste de ministre des Affaires religieuses. Sauf que la députée Idit Silman du parti Yamina, celle-là même qui avait quitté la coalition début avril et privé le gouvernement de sa majorité, a voté contre cette reconduction au gouvernement.
Sa démarche a abouti à un vote de 55 voix pour, et 55 contre, et donc, faut d’une majorité simple, à un deuxième revers pour Naftali Bennett au Parlement dans la même soirée.
« Idit Silman, tu es une championne », l’a félicitée Benjamin Netanyahu sur Twitter après les résultats du vote.
Selon le Jerusalem Post, le gouvernement envisage de prendre des sanctions très dures contre la députée rebelle, en la privant dans un premier temps de son poste de présidente de la commission de la Santé à la Knesset. Après cela, il devrait demander au comité de l’assemblée de la déclarer officiellement comme transfuge, c’est-à-dire comme une députée qui a changé d’allégeance.
Conséquence : elle ne pourra pas se présenter aux prochaines législatives sous les couleurs d’un parti déjà présent à la Knesset, comme par exemple le Likoud qui lui fait les yeux doux, ni être désignée ministre dans un éventuel gouvernement dirigé par Benjamin Netanyahu. Ambiance… bis.
Joe Biden devait effectuer une visite en Israël au cours du mois de juin, mais sa tournée au Moyen-Orient a été reportée à juillet. Il se dit dans la presse israélienne qu’à Washington, on attendrait de voir s’il est utile de discuter de dossiers stratégiques entre alliés avec un Naftali Bennett qui pourrait être forcé de quitter le pouvoir d’un jour à l’autre…
« La position du Premier ministre peut rapidement devenir intenable, ajoute David Khalfa, spécialiste de la politique israélienne. Ce n’est pas la première fois qu’un gouvernent israélien parvient à survivre sans majorité, sauf que Naftali Bennett n’a pas la mainmise sur son propre camp, ni même sur son propre parti qui est lui-même minoritaire dans cette coalition. La question n’est pas de savoir s’il y aura de nouveaux ‘déserteurs’, mais quand cela va se produire. »
Selon David Khalfa, certains membres de la coalition semblent, à travers leurs discours, se préparer pour la prochaine campagne électorale et être occupés à assurer leur propre survie politique. « Naftali Bennett lui-même apparaît résigné à participer à un nouveau scrutin et il est déjà en train de créer un récit en forme de bilan de son action gouvernementale qui lui permettrait de survivre politiquement dans le cadre de futures élections », conclut-il.

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