En 1492, les juifs étaient expulsés d’Espagne et se réfugiaient en Turquie ottomane. À Madrid, le Parlement s’apprête à accorder la nationalité espagnole à leurs descendants.

Bülent Arinç, vice-Premier ministre turc, le 26 mars, durant la réouverture de la synagogue d'Edirne | Murad Sezer/REUTERS

En 1492, le roi Ferdinand et la reine Isabelle de Castille ont beau être surnommés les «rois catholiques», ils ont l’amour universel et le sens de la charité sélectifs. En témoigne ledécret de l’Alhambra signé cette année-là sitôt après la prise de Grenade et la Reconquistaachevée. Publié le 31 mars, le texte stipulait que tous les juifs devaient quitter le territoire des souverains d’ici à la fin du mois de juillet. Si le pouvoir royal répondait de leur sécurité jusqu’à cette date, à partir d’août, tout juif arrêté serait condamné à mort. Une conversion au christianisme était seule à même de les sauver.

Ces dispositions expliquent que l’Espagne du XVe siècle se soit alors vidée de beaucoup de ses ressortissants juifs, ceux-ci trouvant alors asile dans l’Empire ottoman, où l’herbe était plus verte et surtout les autorités plus tolérantes. 

Aujourd’hui, le parlement espagnol songe à faire amende honorable en accordant la nationalité aux descendants de ces juifs expulsés. L’idée n’est pas tout à fait neuve, puisque le gouvernement Rajoy l’avait exprimée il y a un an. Si la loi est bien adoptée, la classe politique espagnole marcherait dans les pas des Portugais, qui ont pris la même décision en janvier.

Une mesure qui ne laisse pas insensibles les Turcs d’obédience juive, rapporte Haaretz. Selon le quotidien israélien, ils sont de plus en plus nombreux à songer à quitter le pays, lassés d’un antisémitisme qui irait en augmentant et des sorties déplacées du président Erdoğan et de son parti l’AKP.

Relations tendues avec Israël

La communauté hébraïque turque ne représente plus que 17.000 personnes, alors qu’elle montait à 19.500 en 2005, selon le New York Times. Les années 2000 ont vu les tensions grimper et le malaise croître au sein de la population juive locale. En novembre 2003, des attentats prenaient pour cible deux synagogues d’Istanbul tuant 23 personnes dont 6 juifs. 

Les relations tendues entre Erdoğan et Israël sont aussi un problème-clé. Le président turc, et ancien Premier ministre, avait comparé la politique militaire de l’État hébreu à celle d’Hitler, en août 2014, au moment du conflit dans la bande Gaza. En 2010, la mort de neuf Turcs du bateau Mavi Marmara, venu briser le blocus imposé à Gaza, dans des affrontements avec les forces israéliennes, avait indigné la Turquie et compliqué la vie de ses juifs. En 2013, Recep Tayyip Erdoğan voyait même la main «d’un lobby du taux d’intérêt» derrière les manifestations contestant son gouvernement. Beaucoup avaient considéré que la mention de ce «lobby» était une référence à la communauté juive.

Émigration

Si les juifs turcs sont de plus en plus enclins à quitter leur terre natale pour retrouver celle de leurs lointains ancêtres ibériques, cet élan ne se traduit pas dans les statistiques pour le moment. En attendant la décision espagnole, Israël reste à ce jour la destination qu’ils privilégient. Et encore, elle attire moins qu’auparavant. Selon des chiffres annoncés par Times of Israel, les juifs ont été 204 à quitter la Turquie pour la terre promise entre 2012 et 2014, soit 50% de moins que les 416 qui firent leurs valises durant la période 2009-2011. 

Le nombre de juifs turcs à avoir émigré en Israël entre 2012 et 2014

Sami Aker, un journaliste cité par le site et qui est revenu en Turquie après avoir émigré, explique cette rareté de velléités de départs dans la communauté:

«Il ne s’agit pas d’une communauté post-Holocauste, où le terme d’“émigration” fait partie du vocabulaire.»

Les foyers juifs vivent, en effet, en Turquie depuis plusieurs siècles. De plus, ces dernières années, le gouvernement turc a fait quelques pas en direction des juifs locaux, comme le financement de la restauration de la synagogue d’Edirne et la commémoration de la Shoah sur le plan national en 2015, pour la première fois

SLATE.fr

 

 

 

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