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L’Amérique en pleine crise de Berlus- Trump ©

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Etats-Unis : à l’heure de la Trumposcopie?

Après des années de fiascobama, l’Amérique va t-elle plonger dans la comédie italienne du Berlustrump?

 

 

Donald Trump, cc Gage Skidmore, https://creativecommons.org/licenses/by-sa/2.0/

L’Italie a souvent été considérée comme un laboratoire politique, un endroit où on expérimente les idées les plus radicales, qui ensuite produisent les transformations les plus radicales ailleurs. Le concept d’une « République des Sénateurs » et des représentants du peuple a commencé à Rome, comme celui des factions -ou partis- politiques ainsi que la grande idée d’un pays gouverné par le Droit (romain). Le Fascisme a d’abord été une expérience italienne qui s’est étendue à l’Espagne, au Portugal et dans une partie de l’Amérique latine (s’infiltrant aussi en amérique du Nord plus tard), pour se métamorphoser en Nazisme en Allemagne.

Donald Trump, lui aussi, n’est pas un phénomène aussi nouveau que cela. L’Italie a déjà fait l’expérience de sa propre version d’un pouvoir à la donald Strump, incarné par Silvio Berlusconi, un magnat des médias et de la communication prétendant disposer de toutes les réponses aux crises et d’être en mesure de faire usage d’un charisme indiscutable pour l’emporter dans toutes les situations. Personne ne devrait donc être surpris que l’expérience Berlusconi se repète et soit encore magnifiée si et quand Trump remporterait la désignation comme candidat présidentiel aux primaires républicaines américaines. Il y a même de grandes chances de le voir frapper un grand coup et de parvenir parun score écrasant à la Maison Blanche : le Président « Donalvio Berlustrump ».

En effet, le phénomène Donald Strump n’en finit pas de grandir jour après jour et d’atteindre des proportions gigantesques. Il est de loin le candidat le plus populaire dans les sondages en vue de la nomination républicaine. Dans un sondage du 27 août, Trump jouit d’un soutien à 28%, alorsque son second se retrouve à seulement 12%. Les autres, dont Jeb Bush, Ted Cruz et Marco Rubio parviennent difficilement à montrer les dents et faire la brèche à 7% chacun. Pour les Républicains traditionnellement et socialement conservateurs, Trump fait le spectacle et ils n’ont aucune idée sur la façon de pouvoir l’arrêter, sans compter sur leur incapacité à le mettre en pièces. Comme sil se moquait de ses rivaux, dont la plupart se roulent dessus en affichant leurs lettres de créances chrétiennes,Trump a récemment déclaré que son livre favori n’est autre que la Bible – parce qu’il le trouve encore meilleur que son propre « art de la négociation ». Trump pourrait bien être l’antidote ou l’évolution naturelle vers le Tea Party, en tout cas, ce qui est certain c’est que son appel ne cesse de plus en plus audible. Plus les Républicains traditionnels l’attaquent, plus les électeurs sont convaincus qu’il est le seul à défier l’appareil conformiste du politiquement correct.

Il véhicule aussi un nouveau style de populisme, fondé sur le discours d’extême-droite anti-immigration, tout en se faisant le champion des attrape-nigauds de la gauche sur la surtaxation des riches et des fonds de pension. En fait, plutôt que de mener aux résultats présumés qui feraient que le phénomène Trump pourrait faire triompher Hillary Clinton dans un fauteuil, cette dernière est en train de dégringoler dans les sondages. En Europe et tout particulièrement en Italie, la comparaison entre l’ascension de Trump et celle de Berlusconi en 1994 est déjà visible, excepté que la course présidentielle de Trump est encore plus remarquable. Berlusconi disposait de trois chaînes de télévision nationale – à une époque où le peuple manquait de distractions, telles que l’Internet ou Netflix – et d’une équipe de football gagnante en Champions’league pour bâtir sa marque déposée en Politique. Trump est une personnalité de la TV mais n’est pas patron de chaînes de télévision. Dès qu’il s’est trouvé au pouvoir, Berlusconi a continué à faire usage de son empire médiatique pour dominer le discours politique, alors qu’il existe des lois aux Etats-Unis afin d’éviter ce genre de conflits d’intérêts.

Pourtant, il y a des similitudes frappantes entre eux deux qui vont au-delà du partage d’une même expérience dans l’immobilier et la maîtrise de l’auto-promotion grandiloquente tout en simplifiant les problèmes à l’extrême. Comme Berlusconi, Trump est une bête de scène experte en One man’show et il accomplit une performance où le protagoniste peut dire absolument n’importe quoi sans faire froncer le moindre sourcil de son auditoire. L’acension de Trump, comme Berlusconi à son apogée, est le symptôme de la haine envers la professionnalisation en politique, qui s’est constituée aux Etats-Unis.

La leçon que l’Italie peut apprendre aux Etats-Unis, c’est que les électeurs peuvent prendre Trump au sérieux, en particulier ces électeurs qui ne souhaitent pas vraiment le voir déménager pour le 1600 Pensylvania Avenue en 2017. Les américains commencent à s’apercevoir que Le Donald n’est plus un phénomène temporaire et qu’il s’agit d’un véritable candidat à la Maison Blanche. Il présente une image qui provoque la perplexité, avec ses cheveux en bataille et tout le reste – incidemment, la chevelure était une obsession majeure de Berlusconi, bien que dans son cas, le problème éétait plus la calvitie, et par conséquent plus proche de George Costanza que de Trump.

Ses collègues du parti républicain, avant leur premier débat au début août le considérait comme un clown du rodéo parce qu’ils percevaient sa campagne comme une sorte de cirque ambulant : bruyant, brutal et ignorant. Mais, à présent, ils sont en rivalité avec lui et c’est lui qui dictera l’envergure et le ton des questions évoquées. Alors que Berlusconi affichait une image de force, tout comme Mussolini dans les années 1920-1930, qui fasait appel à l’Italien moyen, particulièrement quand il se dissimulait sous les métaphores footbalisitiques, l’image de Trump fait appel, de la même façon, à l’un de ces films qu’apprécie l’Américain moyen, qui met en scène un type de la rue, un opprimé qui brise les codes de l’élite dans l’establishment, comme Rodney Dangerfield dans « Back to School » (Retour à l’Ecole) où un milliardaire audacieux s’empare d’un collège de l’élite dans le Nord-Est des Etats-Unis. Tout comme Berlusconi, le discours de Trump est dépourvu de tout contenu sérieux. On doit simplement considérer comment Trump a déconstruit l’accord nucléaire avec l’Iran, en citant des détails inexacts sur la façon dont les Iraniens contrôlent eux-mêmes leurs sites nucléaires, pour comprendre ce que les électeurs ont bien envie d’entendre.

A la tête des sondages, les gaffes et erreurs de Trump ne font que propulser sa campagne. Il a réussi à gagner des points, même après avoir refusé de présenter ses excuses pour avoir insulté la modératrice du débat sur Fox News en insinuant qu’elle avait ses règles, quand ses questions devenaient trop pointues pour lui. Il a balayé d’un revers de manche ces demandes en contre-attaquant et en disant : « C’est elle qui devrait me présenter ses excuses! ». Le commentaire infâme dont il s’est fendu consistait à dire que Megyn Kelly « perdait du sang » à chaque fois qu’elle le questionnait au cours du débat républicain. Habituellement, les américains sont très pointilleux sur de tels sujets, mais Donald Trump a usé de ruse pour dominet le spectacle politique en devenant son acteur principal et celui qui, comme Berlusconi pouvait s’en sortir avec n’importe quoi dans toutes les situations. Ses commentaires à l’encontre de Megyn Kelly ont pu attirer ses opposants politiques et une petite portion du public, mais ils n’ont pas provoqué une seule bosse dans la base de son électorat potentiel. Le fait est que l’ascension d’un magnat fait la démonstration d’un profond changement dans la fabrique sociale des Etats-Unis. En effet, le parallèle convient avec l’Italie, où le Showbiz ou le Cirque dominent la scène depuis plus de vingt ans, à commencer par Berlusconi, un milliardaire qui a débuté sa carrière en chantant sur le pont des navires de croisière et qui a fait sa fortune dans l’ombre. Mais ce phénomène s’est déjà répandu dans d’autres parties du monde démocratique.

Au Mexique, Trump pourrait être confronté à un sérieux challenger,sous les traits du comédien de télévision Victoir Trujillo, qui est devenu le commentateur politique le plus influent dans son pays. Alors que le dirigeant de la droite dure aux Pays-Bas, Geert Wilders, a quelque chose du rocker punk. Tous ces personnages ont fait du « populisme », de la haine et du ressentiment envers l’élite politique et par conséquent contre le jeu politique traditionnel – leur carte maîtresse.

 

Ce phénomène, de façon plus spécifique, est un rejet, voire même une révolte contre le professionnalisme politique,alors que les dernières prospectives en matière d’offre de vrais leaders  démontrent qu’elles en manquent sérieusement, en passant leurs partisans par la balustrade sur la questions des migrants. Ce nouveau populisme peut ne pas être un phénomène néfaste en soi. On peut même le considérer comme un médicament (une médecine) que doivent avaler les politiciens traditionnels, après avoir tiré parti des électeurs depuis trop longtemps et s’être distancés de la réalité quotidienne du peuple.

Mais si ces hommes politiques « classiques » ne se réveillent à temps et ne commencent pas sérieusement à envisager les besoins de leurs électeurs avant ceux de leurs groupes d’intérêts (lobbies), ils pourraient bien finir par compromettre l’intégrité même de la démocratie.

31 août 2015

Alessandro Bruno

geopoliticalmonitor.com

Adaptation : Marc Brzustowski

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