Israël : « La guerre des berceaux tourne à l’avantage des Juifs ».

Alors qu’ils n’étaient que 158 000 en 1949, les Palestiniens citoyens d’Israël sont presque deux millions désormais. Une dynamique qui a longtemps fait espérer aux dirigeants palestiniens un retournement du rapport de forces. Mais la réalité est beaucoup plus nuancée. Explications du démographe Youssef Courbage.

Malgré le rôle de Mansour Abbas, nouveau ministre chargé des Affaires arabes, dans la formation de la coalition qui a poussé Netanyahou vers la sortie, les Palestiniens d’Israël souffrent toujours d’une certaine discriminations de la part de l’État.

Un enjeu qui prend aujourd’hui toute son importance : Israël compte presque 2 millions de Palestiniens en son sein, contre 158 000 en 1949. Lors des derniers événements à Jérusalem et à Gaza, des Israéliens d’origine arabe ont même, quelques heures durant, pris le contrôle de leurs villes respectives, un fait inédit dans l’histoire de l’État hébreu, révélateur d’une « menace » intérieure croissante du point de vue de la droite israélienne.

Qu’en est-il réellement ? L’idée d’un Israël majoritairement musulman d’ici quelques décennies est-elle crédible ? Jeune Afrique a fait le point avec Youssef Courbage, directeur de recherche retraité à l’Institut national d’études démographiques de Paris.

Jeune Afrique : Qu’est-ce qui explique la présence de Palestiniens en Israël ?

Youssef Courbage : C’est plutôt l’inverse. La présence des Juifs en Palestine au XIXe siècle était marginale, de 18 % en 1918. Mais les Juifs n’ont jamais cessé leur présence en Palestine depuis des millénaires. Les premières implantations juives démographiquement significatives ont débuté pendant la deuxième moitié du XIXe siècle. La présence juive en Palestine a commencé à croître dans la mouvance du mandat britannique après la Première Guerre mondiale, qui a encouragé l’immigration juive, mais aussi de populations arabes voisines attirées par une certaine prospérité engendrée par l’activité des juifs. De plus les Juifs persécutés en Europe à cause de l’avènement du nazisme se sont exilés aux quatre coins du monde et notamment en Palestine. En 1947, ils représentaient 32 % de la population palestinienne.

C’est donc la proclamation de l’État d’Israël qui a rendu les Juifs majoritaires en Palestine ?

Absolument. En 1948, les armées juives étaient plus vaillantes que les forces arabes qui étaient intervenues en Palestine. Cela explique que les premières aient défait les secondes, issues d’Égypte, d’Irak, de Syrie, du Liban, de Transjordanie, et accompagnées de volontaires palestiniens, sur le terrain. Les accords d’armistice consécutifs ont concédé 78 % de la Palestine à Israël, tandis que les 22 % restants seront ultérieurement annexés par la Transjordanie. La quasi-totalité des Palestiniens a été expulsée. On estime entre 750 000 et 800 000 le nombre de Palestiniens réfugiés.

L’IDÉAL POUR BEN GOURION AURAIT ÉTÉ DE NE GARDER QUE LE MINIMUM DE PALESTINIENS.

Une partie de la population arabe a quand même décidé de rester dans ce qui était devenu l’État d’Israël. 

L’idéal pour Ben Gourion et les autorités israéliennes aurait été de ne garder que le minimum de Palestiniens. Mais il existait des contraintes, internationales notamment, qui rendaient leur expulsion totale impossible, de sorte qu’environ 148 000 d’entre eux sont restés après 1948. Ils sont aujourd’hui 2 millions au sein de l’État d’Israël. On en a beaucoup parlé pendant les derniers combats, parce que la population, d’habitude assez calme, s’est beaucoup manifestée. Il y a eu des incidents violents entre Juifs et Palestiniens à Lod, Haïfa, Akko, etc.

Peut-on imaginer qu’en Israël, la population devienne majoritairement arabe ?

Une majorité arabe est exclue. Certes, les Palestiniens, depuis 1948, essayaient de se défendre par leur forte natalité. À tel point que leur indice de fécondité a atteint un record planétaire, de l’ordre de 9 enfants par femme. Même si la fécondité juive était forte comparée à celle des Juifs de la diaspora, elle était bien plus basse que celle des Palestiniens.

Aujourd’hui, la situation est bien différente : la « démographie explosive » n’est plus de mise. La fécondité des Palestiniens en Israël diminue tandis que celle des Juifs d’Israël s’épanouit pour diverses raisons. Palestiniens et Juifs, qui se livraient à une « guerre des berceaux », voient celle-ci tourner à l’avantage des Juifs. Les chiffres les plus récents sont éloquents : la fécondité juive dépasse celle des Palestiniens.

L’enjeu démographique donne-t-il lieu à des choix politiques de la part des Palestiniens d’Israël ?

Oui. Cela a toujours été exprimé, notamment par Yasser Arafat. Il parlait pour la Palestine et au-delà. Il affirmait que la famille palestinienne devait avoir douze enfants, deux pour la famille et dix pour la « cause ». Or les Palestiniens ont fini par tourner le dos à l’idéologie.

Les populations arabes du centre qui se sont rapprochées du Nord ont-elles vu le Liban comme une porte de sortie possible ?

Non. Il y a eu très peu de migration palestinienne à l’intérieur d’Israël. Se déplacer c’est prendre le risque de perdre sa propriété. S’enraciner, bouger le moins possible, avoir une forte natalité ont constitué des atouts pour la persistance de la présence palestinienne. Ne pas émigrer a permis à la population de croître. Les Juifs n’ont pas cherché à s’installer dans une ville arabe comme Nazareth, ils en ont créé une autre, proche et assez peu peuplée : Nazareth Illit.

S’ENRACINER, NE PAS ÉMIGRER, AVOIR UNE FORTE NATALITÉ, ONT CONSTITUÉ DES ATOUTS POUR LA PERSISTANCE DE LA PRÉSENCE PALESTINIENNE

Pour le futur, l’atout démographique des Palestiniens en Israël n’est plus tellement la forte natalité mais leur enracinement, alors qu’il y a une très forte émigration des Juifs hors d’Israël. On estime à près de 1 million le nombre d’Israéliens vivant à l’étranger.  Par contre de nombreux juifs continuent d’afluer en Israël, et le solde des arrivées est bien supérieur à celui des départs qui reste négligeable.

Pourquoi les Juifs émigrent-ils ?

Les raisons sont majoritairement économiques. Pour certains l’herbe est plus verte ailleurs. Ce qui à présent est totalement faux puisqu’Israël est un pays classé parmi les meilleurs en terme de revenus par habitant.

Le nombre de Juifs arrivant en Israël reste important, et cela reste constant voire grandissant.

 

La communauté juive est-elle unie en Israël ?

La société israélienne n’est pas très homogène. Les laïcs sont plutôt des Juifs d’origine européenne, alors que les Juifs sépharades seraient plus religieux. Les sensibilités « ethniques » ont joué. Golda Meir [Premier ministre israélien de 1969 à 1974] disait : « Enfin de vrais Juifs émigrent en Israël » quand les Russes ont commencé à arriver. Mais la société israélienne a un ennemi commun avec les Palestiniens de cis-jordanie.

Y a-t-il des possibilités d’entente entre Juifs et Arabes ?

La gauche israélienne, souvent plus attentive au sort des Palestiniens, a pratiquement disparu aujourd’hui. Il existe des associations, comme B’Tselem, où Juifs et Palestiniens travaillent ensemble pour défendre les intérêts des Palestiniens, notamment dans le domaine des expropriations, dernièrement dans le quartier de Sheikh Jarrah à Jérusalem par exemple. Mais à présent plus d’un arabe sur trois a abandonné l’idée d’un état palestinien, et cherche à travers une coopération avec les israéliens une forme d’intégration.

Les Palestiniens d’Israël sont-ils discriminés du point de vue institutionnel ?

Non du point de vue institutionnel ils ont les mêms droits malgré la proclamation de l’État-nation en 2017. Mais les formations politiques arabes se sont divisées. Aux précédentes élections, ils ont réussi à faire élire quinze députés. Le fait que le parti islamiste, qui a rejoint la coalition de droite et d’extrême-droite de Yaïr Lapid, se soit désolidarisé des autres formations palestiniennes a fait beaucoup de mal à la cause.

Dans les territoires occupés, la naissance du Hamas a été encouragée par les Israéliens, pour affaiblir le Fatah et diviser les Palestiniens.

Qui soutient les Palestiniens en Israël aujourd’hui ?

Plus personne. Les pays arabes se méfiaient des Arabes israéliens. L’idée qu’un Palestinien ait un passeport israélien ne passait pas.

Jeune Afrique – Corrigé

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franck

pourquoi les chretiens
traitre en quoi
ils ont peur tout simplement ,ils ne sont pas tous installes en Israel
et ceux qui y sont, vivent dans des villages ou quartiers ou les musulmans sont superieur en nombre
ls parlent arabe hebreux et anglais une education examplaire
parcequ ils parlent arabe il y a une barriere entre nous et eux

Victor PEREZ

« Le fait que le parti islamiste, qui a rejoint la coalition de droite et d’extrême-droite de Yaïr Lapid, »

Ha Ha Ha Ha Ha Ha Ha

LE CHAT DORT

les zARABES musulmans, comme chrétiens-les champions de la traitrise- n ont rien a faire en Israel

les Druzes, comme les Tcherkesses y ont toute leur place

vite! vite! transformer « la mère du charbon » en un champ de ruines comme ces dizaines de villes style Foureidis ou jazirate el zerga