CPI : la thèse des accusateurs d’Israël ne tient pas

Le 9 avril 2020, la Revue des Droits de l’Homme a publié un article rédigé par Ghislain Poissonnier et Eric David (éminents juristes en Droit européen) qui posent la question : «  les colonies israéliennes en Cisjordanie, un crime de guerre ? ». Le document, présenté sous la forme de conclusions (vraisemblablement déposées devant la Cour Pénale Internationale), se termine de la manière suivante : « les développements qui précèdent montrent que la politique de colonisation israélienne en Cisjordanie constitue un crime de guerre… » (Sic). En réalité, l’argumentation des juristes repose sur des postulats faux et des contre vérités historiques qui les ont, manifestement, égarés. La Cour Pénale Internationale ne se laissera pas abuser.

Ghislain Poissonnier (Magistrat français) et Eric David (Professeur émérite de Droit international public et Président du Centre de Droit international de l’Université libre de Bruxelles) se sont penchés sur la question actuellement examinée par la Procureure (Fatou Bensouda) de la CPI : « La politique de colonisation israélienne en Cisjordanie constitue-elle le crime de transfert, direct ou indirect, par une Puissance occupante d’une partie de sa population civile, dans le territoire qu’elle occupe ? ». Pour répondre (positivement) à la question, les juristes ont essayé de démontrer que les trois critères de l’infraction, en l’occurrence les éléments, légal, matériel et intentionnel, étaient réunis. Manifestement, les juristes se sont mépris sur chacun d’eux. La Procureure de la CPI constatera qu’aucun des critères n’est rempli.

L’élément légal : les juristes ont tout d’abord fait état de l’article 49, § 6, de la 4e Convention de Genève (CG) du 12 août 1949 qui prévoit que « la Puissance occupante ne pourra procéder à la déportation ou au transfert d’une partie de sa propre population civile dans le territoire occupé par elle ». Ils ont ensuite rappelé le Droit international humanitaire (DIH) coutumier (codifié par le CICR en 2005), qui prévoit que « les États ne peuvent déporter ou transférer une partie de leur population civile dans un territoire qu’ils occupent ». Enfin, ils ont mentionné le 1er Protocole du 8 juin 1977 additionnel (PA I) aux CG qui a ajouté à la liste des « infractions graves » prévues par les CG et notamment « le transfert par la Puissance occupante d’une partie de sa population dans le territoire qu’elle occupe ».

Dans un second temps, ils ont cité le Statut de Rome et notamment l’article 8, § 2, b), viii), du Statut qui prévoit que « le transfert, direct ou indirect, par une puissance occupante d’une partie de sa population civile, dans le territoire qu’elle occupe, (…) » constitue un des crimes de guerre punissables dans le cadre d’un conflit armé international. Bien évidemment, ces textes sont inapplicables.

En effet, Ghislain Poissonnier et Eric David ont oublié de se poser deux questions essentielles : celle de savoir si la Cisjordanie est un « territoire occupé, ou non » et, en tout état de cause, si elle dépend de l’Etat de Palestine. En effet, c’est la Jordanie qui était occupée en 1967 (dans sa partie occidentale) puisqu’elle avait annexé la Cisjordanie le 24 avril 1950. Or, la Jordanie a cessé de l’être, le 31 juillet 1988, lorsque le Royaume hachémite a renoncé a sa souveraineté sur la Cisjordanie. Mieux, pour palier à la nature de « biens sans maître » qu’était devenue la Cisjordanie, les accords israélo palestiniens de paix d’Oslo ont organisé les prérogatives sur le territoire cisjordanien. Plus précisément les accords dits « Oslo II » du 28 septembre 1995, ont réservé à Israël l’intégralité des prérogatives, administratives et militaires sur la zone C de Cisjordanie, soit 60 % de sa surface. Israël n’est donc pas une puissante occupante en Cisjordanie : sa présence se fonde sur les accords de paix, opposables à la CPI. En tout état de cause, la Cisjordanie n’a jamais dépendu de la souveraineté de l’Etat de Palestine (reconnu par l’Onu le 29 novembre 2012, sans territoires spécifiques). Dès lors, non seulement l’élément légal fait défaut mais en outre, l’Etat de Palestine n’a pas qualité à agir.

L’élément matériel : Ghislain Poissonnier et Eric David ont rappelé que l’élément matériel supposait la réunion de deux conditions : une situation d’occupation résultant d’un conflit armé international et le transfert d’une partie de la population sur ce territoire. Or, pour illustrer le premier point, ils ont fait état du conflit international …. « Israélo-arabe », en 1967, qui opposait Israël à la Jordanie, l’Égypte, la Syrie et l’Irak. La CPI ne manquera pas de relever qu’il ne s’agissait donc pas de l’Etat de Palestine (qui n’existait pas en tant qu’Etat et qui d’ailleurs, depuis sa naissance en 2012, ne s’est toujours pas vue affecté de territoires).

Par ailleurs, les juristes se sont fourvoyés sur un autre point. Ils ont avancé : « Or, depuis 1967, aucun élément de fait ou de droit n’est venu mettre fin à la situation d’occupation et en particulier au contrôle territorial effectif de la Cisjordanie par les forces armées israéliennes ». Bien sur que si : la Cisjordanie a été annexée par la Jordanie en 1950 (annexion reconnue par l’Onu en 1955). Or, le 31 juillet 1988, la Jordanie s’est déliée de ses liens avec ce territoire. C’est donc à cette date que l’occupation de la Jordanie a cessée. Jamais il ne s’est jamais agi de la Palestine.

Plus grave, les juristes ont avancé que : « les accords d’Oslo I et II conclus en 1993 et 1995 entre Israéliens et Palestiniens, qui accordent une autonomie relative à certaines parties de la Cisjordanie, n’y changent rien : la Cisjordanie demeure un territoire palestinien occupé sous contrôle total ou partiel d’Israël. Le sort de ce territoire n’ayant pas été réglé, la situation d’occupation résultant d’un conflit armé international perdure ». C’est une nouvelle fois, faux. C’est précisément parce que la Cisjordanie est devenue un bien sans maître (en 1988) que les accords israélo palestinien sont venus répartir les prérogatives entre Israël et l’Autorité palestinienne. Or, Israël s’est vu attribué le contrôle de la zone C (60 % du territoire cisjordanien). Sa présence résulte donc d’accords de paix, et non d’une soi-disant occupation. Dès lors, et faute d’occupation, il n’y a « aucun transfert de population sur un territoire occupé ». L’élément matériel fait donc, une fois encore, défaut.

Concernant l’élément moral : Ghislain Poissonnier et Eric David ont rappelé que « Pour qu’il y ait crime, l’élément moral de l’infraction doit être établi. Cet élément moral, appelé aussi « élément psychologique »,  peut être défini comme le lien (la volonté ou l’intention criminelle) existant entre l’acte criminel et l’auteur ». Sur ce point, ils ont indiqué « il suffit de prouver, dès lors que l’élément matériel de l’infraction est établi à son égard, qu’il a souhaité procéder au transfert de la population de la Puissance occupante vers le territoire occupé par elle ».

Au cas particulier, faute d’élément légal ou matériel, il n’y a aucun élément intentionnel. Il ne suffit donc pas de mentionner que « la politique de colonisation israélienne en Cisjordanie est officiellement soutenue et revendiquée par les autorités israéliennes » et que cette politique a été « maintes fois déclarée illégale » (notamment dans l’Avis du 9 juillet 2004 de la CIJ qui s’est référée à l’art. 49, § 6, de la 4e CG et observé « qu’à partir de 1977, Israël a mené une politique et développé des pratiques consistant à établir des colonies de peuplement dans le territoire palestinien occupé, contrairement aux prescriptions ainsi rappelées du 6e al. de l’art. 49 »). Rappelons, en effet, que cet avis est juste consultatif, et qu’il s’est  également mépris : en 1977, le territoire était jordanien, et a cessé de l’être en 1988. La plainte est donc, non seulement mal fondée, mais en tout état de cause, définitivement, irrecevable.

Par Maître Bertrand Ramas-Muhlbach

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Johanan

MAIS QUE VALENT TOUTES LES CONFIRMATION LÉGALES ET JURIDIQUES DEVANT L IMPÉRITIE DES CETTE COUR DU ROI PETAUD SURTOUT QUE SES PROCUREURS ET NOTAMMENT LA GROSSE FEMELLE FILLE D ASSASSINS ET SES COMPARSES ET COMPLICES VOUENT LEUR VIE A L INIQUITÉ ?

Hervé

Très juste, ça fait des lustres que je rappelle le massacre des Tutsis par les hutus qui ont reçus 50.000 piolets du sale individu nommé védrine. Les médias francarabia ont rabâché sans arrêt le « massacre » que quelques dizaines de faux « palestiniens » par des Chrétiens au Liban, mais ils ont « oublier » que le massacre ou plutôt le génocide de HUIT CENT MILLE Hutus, s’est déroulé en présence de ce qu’on appelle armée française.

Avigail

Merci de bien vouloir définir qui est ‘Israël’.

Eric

Ces 2 magistrats devraient statuer si la francafric et la participation française au génocide rwandais est un crime contre l’humanité.